sont des dégonflés !

Frondeurs PS
Xavier leoty / AFP

Chaque matin à 8h24, Hervé Gattegno, rédacteur en chef (Enquêtes/Investigation) à Vanity Fair, décrypte avec impertinence l’actualité politique dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin sur RMC.

Ceux qu’on appelle les « frondeurs » du PS veulent s’abstenir lors du vote de confiance demandé par Manuel Valls à l’Assemblée, qui aura lieu dans une semaine. C’est un désaveu pour Manuel Valls mais en l’état, ça ne ferait pas faire chuter le gouvernement. Votre parti pris : les « frondeurs » du PS sont des dégonflés !

L’abstention n’est pas illégitime, un député a le droit de ne pas avoir d’avis sur un texte de loi – on ne peut pas toujours dire oui ou non. Mais ­­­sur la confiance au gouvernement, c’est injustifiable – on a confiance ou pas, on le sait. Qui plus est, ces députés sont du même parti que le premier ministre mais ils dénoncent sa politique. Ils ne disent pas qu’ils ne veulent pas y être associés, mais qu’elle est injuste, inefficace, qu’elle trahit les promesses de 2012. Mais en s’abstenant, ils ne s’opposeront pas à cette politique, donc ils la laissent s’appliquer. C’est soit de l’incohérence soit de l’inconséquence. Et ça veut dire que ces « frondeurs » sont des phraseurs.

Mais vous savez bien que s’ils votent contre la confiance, ils peuvent faire chuter Manuel Valls et provoquer la défaite de leur propre camp… Vous pensez qu’ils devraient aller jusque là ?

Ils devraient surtout prendre une position lisible. Les frondeurs ont raison de dire que François Hollande a tourné le dos à ses engagements. Et Manuel Valls a raison de les appeler à leurs responsabilités. La discipline majoritaire n’est pas une règle indigne, ni une atteinte à la démocratie – s’y plier n’est pas se déshonorer. Mais ils ne peuvent pas soutenir – comme certains le font – qu’ils s’abstiennent « pour demander un changement de politique ». Il faut juste savoir si les désaccords l’emportent sur les convergences. A entendre les frondeurs, on peut penser que oui. S’ils choisissent l’abstention, c’est que c’est non. On verra s’ils choisissent de rentrer dans le lard ou de rentrer dans le rang.

La menace qui est en filigrane derrière ce débat, c’est la dissolution de l’Assemblée. Vous pensez qu’il ne faut pas la prendre au sérieux ?

Manuel Valls l’a clairement laissé entendre – comme Jean-Marie Le Guen, le secrétaire d’Etat aux relations avec le Parlement (qui est en fait chargé des relations avec la majorité). Mais c’est du poker menteur parce que : 1. Personne n’y a intérêt, ni l’exécutif ni les députés – ce serait la déroute assurée du PS. 2. Ce n’est pas la réponse appropriée dans nos institutions car ce qui pose problème à une partie de la majorité, c’est la ligne fixée par F. Hollande et non pas la conduite de M. Valls. S’y ajoute en plus désormais le discrédit personnel du président de la République. Or avec une dissolution, la majorité et le premier ministre seraient balayés, mais François Hollande, lui, serait toujours là.

Ce serait une drôle de conclusion… Justement, on entend de plus en plus évoquer l’hypothèse d’une crise institutionnelle, voire d’un projet de VIè République (c’est ce que proposent Jean-Luc Mélenchon et Cécile Duflot). C’est réaliste ?

Le numéro de la République importe peu – ce qui compte, c’est le contenu et on sait bien que parmi les aspirants constituants, certains ont surtout envie de faire leur numéro… La réalité, c’est que notre système est au bout du rouleau mais qu’il donne beaucoup de forces à un pouvoir de plus en plus faible – on ne voit pas bien qui voudrait s’en priver. En fait, par la pratique politique, nous avons déjà changé de République sans changer de constitution. Nous avons un régime hybride : avec la verticalité, l’autoritarisme de la Ve ; et la confusion, l’éparpillement de la IVe. Donc ce n’est pas la VIe République mais la IVe et demie – ce qui ressemble assez bien à François Hollande, qui a tendance à faire les choses à moitié.