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Naufrage en Méditerranée : la thèse d'un acte délibéré des passeurs confirmée

« Après avoir touché notre bateau, ils ont attendu pour être sûrs qu'il coule complètement avant de partir. Ils riaient », témoigne un survivant.

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Publié le 16 septembre 2014 à 21h00, modifié le 17 septembre 2014 à 07h23

Temps de Lecture 3 min.

Lors d'une opération de sauvetage de la marine italienne au large de la Sicile, le 14 septembre.

De nouveaux éléments recueillis, mardi 16 septembre, par l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) sont venus confirmer la thèse selon laquelle ce sont bien les passeurs qui ont volontairement embouti le bateau de centaines de migrants avant que celui-ci ne coule.

En plus des témoignages de deux Palestiniens repêchés par un porte-conteneurs, le 12 septembre, l'OIM a pu interroger, mardi, six autres rescapés qui avaient été secourus en même temps mais n'étaient pas conscients lors du sauvetage à cause de l'hypothermie. « Après avoir touché notre bateau, [les passeurs] ont attendu pour être sûrs qu'il coule complètement avant de partir. Ils riaient », a ainsi raconté un survivant à l'OIM, en retraçant les péripéties qui ont conduit au drame.

CHANGEMENTS DE BATEAU À RÉPÉTITION

Le point de départ de ce voyage était la bourgade de Damiette, en Egypte. Quatre bus avaient conduit les migrants jusqu'au port, où ils avaient embarqué dans un bateau de 15 à 18 mètres. Celui-ci était déjà à moitié plein quand ils sont arrivés. Selon les survivants, le capitaine a alors compté entre 400 et 450 passagers de plus de 10 ans. Compte tenu du nombre de familles et de mineurs isolés signalés par les survivants, l'OIM estime qu'il a pu y avoir, en plus, jusqu'à une centaine d'enfants.

Les difficultés ont commencé quand, pendant la traversée, les passeurs ont obligé les migrants à changer à trois reprises de bateau. C'est lors de la quatrième fois, alors que le nouvel esquif semblait trop frêle, que les passagers ont refusé de changer d'embarcation. Les passeurs – une dizaine de Palestiniens et d'Egyptiens qui se tenaient sur un autre bateau, selon ces nouveaux témoignages – ont alors menacé de ramener tout le monde en Egypte.

Ils ont commencé à crier et à lancer des morceaux de bois contre les passagers. Ils se sont rapprochés, et plusieurs migrants ont réussi à sauter à bord. Mais les passeurs les ont poussés à l'eau et ont ensuite foncé sur l'embarcation des migrants, qui a immédiatement commencé à couler.

« L'UN DES PASSAGERS S'EST PENDU PAR DÉSESPOIR »

Selon les survivants, il s'agissait d'un bateau à deux ponts. Quelque 300 personnes étaient sur le pont inférieur, 200 personnes sur le pont supérieur. Celles du pont inférieur se sont retrouvées piégées dès que le bateau a commencé à couler et sont toutes mortes noyées.

Selon la marine maltaise, le bateau se trouvait alors à 300 milles nautiques (555 km) au sud-est de Malte. « Quand le bateau a été touché, l'un des passagers s'est pendu par désespoir », a raconté un rescapé à l'OIM. Un des Palestiniens recueillis en Sicile a survécu grâce à un gilet de sauvetage. Le second a raconté s'être accroché à une bouée avec sept autres personnes, dont un enfant égyptien, mais tous ont succombé à l'épuisement.

Les autres survivants interrogés en Crète – deux Palestiniens, un Egyptien et une Syrienne de 19 ans – ont pour leur part survécu en restant accrochés les uns aux autres. Selon eux, le temps est resté clément mercredi et jeudi, mais vendredi, plusieurs personnes de leur groupe ont lâché prise en raison de la houle et du vent.

ENQUÊTES OUVERTES

Un porte-conteneurs a repéré le groupe et secouru neuf personnes, dont sept ont été transportées dans la nuit par hélicoptère vers le service hospitalier adéquat le plus proche, à La Canée en Crète. Un nourrisson n'a pas survécu, et une fillette de 2 ans est toujours dans un état critique. Selon les gardes-côtes grecs, les parents de la fillette l'avaient confiée à la jeune Syrienne parce qu'elle avait un gilet de sauvetage.

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Parmi les rescapés, deux Palestiniens, âgés de 23 et 25 ans, avaient monnayé leur voyage auprès d'une « agence » à Gaza. Ils avaient chacun versé 2 000 dollars (1 545 euros). Une somme qu'ils avaient initialement reçue pour reconstruire leur maison après la guerre de cet été. Des enquêtes ont été ouvertes en Italie, en Grèce et à Malte pour tenter de retrouver les passeurs.

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