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Steve Jobs, un mythe plus vivant que jamais

Par David Brunat (consultant et essayiste)

Publié le 3 oct. 2014 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Trois ans déjà ! C'était le 5 octobre 2011. L'annonce de son décès fut un coup de tonnerre planétaire, bien qu'on le sût rongé par la maladie et condamné à quitter la scène du monde à courte échéance. On se souvient de l'émotion suscitée à travers le monde par la disparition du cofondateur d'Apple. Un dieu moderne s'était éteint.

Jamais, sans doute, la mort d'un chef d'entreprise n'avait provoqué une telle affliction planétaire, à coup sûr sincère et spontanée. Il est vrai que pour la majorité de ceux qui le pleurèrent, Steve Jobs n'était pas un chef d'entreprise, un dirigeant hors du commun qui avait fait d'une société minuscule créée dans un garage la plus grosse capitalisation boursière de l'histoire et une marque mythique. A leurs yeux, il était bien davantage que cela : un magicien, un enchanteur, un « poète en action » (comme disait Chateaubriand, parlant de Napoléon), qui avait changé le monde, révolutionné l'informatique et bouleversé la vie quotidienne des gens.

Comme il l'avait ardemment souhaité, Steve Jobs est devenu un mythe de son vivant. Ce mythe, il l'a puissamment sculpté lui-même, tout en laissant à d'autres - les médias, ses biographes, ses collaborateurs, et en premier lieu les consommateurs et les fans de la marque à la pomme... - le soin de l'entretenir, de le prolonger et de le faire vivre une fois qu'il ne serait plus.

Parti de rien et devenu milliardaire, mondialement célèbre et unanimement respecté (même par ceux qui le haïssaient) pour son génie innovateur et son sens visionnaire, il incarnait le rêve américain. Il créa l'une des entreprises les plus créatives et les plus admirées au monde. Il mit au point des produits qu'on s'arrachait non seulement parce qu'ils étaient bien conçus, performants et simples à utiliser, mais aussi et surtout parce qu'ils suscitaient de l'émotion, du rêve, comme un supplément d'âme. Ce quasi autodidacte, qui n'avait aucun bagage scientifique, mais avait été formé à la calligraphie réalisa l'un des plus grands tours de force de l'industrie moderne : réconcilier l'esthétique et la technologie, introduire de la beauté dans l'univers des semi-conducteurs et des logiciels, faire dialoguer la culture d'ingénieur et le savoir artistique.

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Jobs savait combien le mythe est devenu une constante de notre environnement quotidien, en apparence « désenchanté », mais en réalité toujours en quête de féerie. A ce besoin insatiable, ce grand maître de la fonction narrative a donné de formidables aliments. Il maîtrisait à la perfection l'art de raconter des histoires.

Il savait qu'un mythe est une histoire vivante, qui toujours doit être recréée. Ses successeurs l'ont bien compris, même lorsqu'ils le copient un peu servilement, s'inspirent de ses fameuses « keynotes », singent jusqu'à son « dress code », bref font du Jobs.

Il savait aussi qu'il n'est de mythes dignes de ce nom qui ne soient incarnés. Et puis il savait que tout mythe regarde l'avenir et est, selon le mot de Bachelard, une « ligne de vie ». C'est ainsi qu'il s'est assuré une espèce d'immortalité, et que le culte à la fois profane et religieux rendu à sa mémoire par ses millions de fidèles ne cessera de grandir à mesure qu'Apple deviendra une société (presque) comme les autres, créative encore, mais de plus en plus orpheline de son démiurge.

L'icône est passée sur l'autre rive il y a trois ans. Mais n'en doutons pas : l'avenir de Steve Jobs durera longtemps.

David Brunat Antoine Dubuquoy

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