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"Lavrilleux est un menteur"

Eric Cesari, sarkozyste et ancien directeur général de l’UMP, a contredit en garde à vue les déclarations de Jérôme Lavrilleux, l’ancien bras droit de Copé. La guerre est déclarée dans l’affaire Bygmalion.

Laurent Valdiguié , Mis à jour le
Jérôme Lavrilleux, accompagné d'Eric Cesari, alors directeur général de l'UMP, arrivant au bureau de Nicolas Sarkozy en 2013.
Jérôme Lavrilleux, accompagné d'Eric Cesari, alors directeur général de l'UMP, arrivant au bureau de Nicolas Sarkozy en 2013. © Reuters

Eric Cesari est ressorti de ses quarante-huit heures de garde à vue… sous le choc. "On m'a même pris ma montre, pour que je n'aie plus la notion du temps", a-t-il raconté à un ami pour résumer son "expérience". Ce Corse de Piana, militant du RPR depuis 1978, a passé deux nuits blanches dans les locaux de la police avant d'être mis en examen pour "faux et usage de faux" et "abus de confiance" par les juges Tournaire, Le Loire et Van Ruymbeke. "Pas d'enrichissement personnel donc pas de caution", lui ont signifié les magistrats. En revanche, l'ancien directeur général de l'UMP a écopé d'un contrôle judiciaire long comme le bras qui lui interdit de rencontrer – outre Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé – Philippe Briand, l'ancien trésorier de la présidentielle, Guillaume Lambert, l'ancien directeur de campagne, Pierre Godet, l'expert-comptable, mais aussi tous les autres mis en examen à ce jour, ainsi que Jérôme Lavrilleux, l'ancien directeur de cabinet de Jean-François Copé. C'est avec lui que les couteaux sont tirés…

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Devant les policiers, Cesari a démenti pied à pied tout ce dont l'accuse Lavrilleux. "C'est un menteur"… "Il ment", a martelé l'ex-DG, quand les policiers lui ont lu les déclarations de son ancien collègue. Lors de sa brève garde à vue du printemps dernier, Lavrilleux a admis (il est le seul à ce jour, hormis les cadres de Bygmalion) l'existence d'un système de fausses factures via l'UMP pour financer le surplus de coût de la présidentielle. L'ancien bras droit de Copé assure que la décision a été prise en mai 2012 (les cadres de Bygmalion disent en mars) lors d'une réunion en présence d'Éric Cesari. "C'est complètement faux, non seulement je n'étais pas à cette réunion mais j'ignorais son existence", a assuré Cesari aux policiers, disant être tombé des nues en découvrant le système. "Lavrilleux n'assume rien, il cherche à se couvrir. La vérité est que c'est lui qui a laissé filer les coûts de présidentielle alors qu'il était le responsable de la logistique", explique au JDD un proche de Cesari. Pourtant ce dernier a signé tous les bons de commande des conventions bidons sous couvert desquelles ont été endossées les fausses factures… pour un total TTC de 18,5 millions d'euros. "Un parti politique, cela dépense beaucoup d'argent, surtout les années de campagne. Les seuls campus des universités des jeunes pouvaient nous coûter chaque année entre 2 et 4 millions d'euros", a plaidé Cesari en garde à vue. Interrogé sur son agenda, et une réunion avec un cadre de Bygmalion, le 12 avril 2012, en présence de Fabienne Liadzé, Cesari s'est souvenu que Franck Attal se plaignait de ne pas être payé assez vite, mais aussi de mauvaises relations avec Agence Publics, l'autre agence de com de la campagne. "Mais pas question ce jour-là de fausses factures", a juré Cesari.

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D'autres auditions, dont celle de Jean-François Copé, à prévoir

Même son de cloche de la part de l'ancienne directrice financière de l'UMP, Fabienne Liadzé, interrogée pour sa part quasiment une nuit entière, jusqu'à 4 heures du matin. "Elle n'a non seulement pas participé au système, mais elle l'a ignoré", assure en souriant son avocate Me Solange Doumic. Une position incompréhensible, alors que les cadres de Bygmalion assurent au contraire qu'ils ont mis en musique les fausses factures, en toute connaissance de cause, avec… Fabienne Liadzé.

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"Tout cela relève d'un problème de santé publique, on est dans le domaine médical, on assiste à une vraie épidémie d'amnésie, ironise Me Patrick Maisonneuve, l'avocat de Bygmalion, à la lecture de ces ­déclarations. Compte tenu des sommes qui ont été payées par l'UMP, cela devient même préoccupant de voir que personne n'a rien vu ni rien su." Une remarque frappée démontrer d'éventuelles autres complicités au sein du parti. "Ces gardes à vue ont permis à chacun d'abattre ses cartes, tout le monde s'écharpe et se renvoie la balle…", résume un enquêteur. D'autres auditions sont à prévoir, facile à deviner avec la liste des personnalités visées par les contrôles judiciaires. En tête d'affiche, Jean-François Copé, dont un autre proche ­collaborateur, Guillaume Bazaille (le JDD de dimanche dernier) , était semble-t-il au courant du système. Et aussi Nicolas Sarkozy, bénéficiaire final, mais qui assure n'avoir "appris l'existence de Bygmalion que bien après la présidentielle". L'ancien président connaissait pourtant bien Franck Attal. Omniprésent durant tous les meetings de campagne, le candidat lui avait même trouvé un surnom : "l'homme qui appuie sur le bouton"… Il s'agissait alors de lancer la sono. Pas encore d'allumer une bombe judiciaire.

Source: JDD papier

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