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Le Parlement britannique vote la reconnaissance de la Palestine

Plusieurs pays européens, dont la France, le Royaume-Uni et la Suède, sont confrontés à la pression de leur opinion publique.

Par  (Jérusalem, correspondant),  (Stockholm, correspondance) et  (Londres, correspondant)

Publié le 14 octobre 2014 à 10h33, modifié le 19 août 2019 à 14h35

Temps de Lecture 4 min.

Les députés britanniques ont mis la pression sur le premier ministre David Cameron, lundi 13 octobre, au sujet de son attitude jugée trop conciliante vis-à-vis du gouvernement israélien. Par 274 voix pour contre 12 (sur 650 élus), la Chambre des communes a adopté un texte réclamant la reconnaissance de la Palestine. Ce vote non contraignant relève d’une initiative travailliste destinée à mettre en difficulté le gouvernement. Néanmoins, sa portée symbolique et politique témoigne d’un phénomène plus large : la frustration croissante des dirigeants européens à l’égard du gouvernement israélien et la volonté de sortir de l’impasse sur la question palestinienne.

La motion, déposée par le député travailliste Grahame Morris, proposait de « reconnaître l’Etat de Palestine à côté de l’Etat d’Israël ». Elle était présentée comme « une contribution destinée à assurer une solution négociée à deux Etats » et comme un pas « petit mais symboliquement important » vers la paix. David Cameron a indiqué qu’il ne ferait pas évoluer sa position.

Pression d’une partie des opinions publiques

Mais sa décision de ne pas donner de consigne de vote négatif aux députés conservateurs est critiquée par des défenseurs de la politique israélienne. La plupart des élus conservateurs étaient d’ailleurs absents et les ministres avaient l’ordre de se tenir à l’écart.

Le Royaume-Uni s’était abstenu en 2012 lors du vote aux Nations unies sur l’attribution d’un statut d’Etat observateur à la Palestine. Aujourd’hui, le gouvernement de David Cameron ne se sent pas engagé par le vote des députés. Le sous-secrétaire d’Etat parlementaire aux affaires étrangères, Tobias Ellwood, a expliqué que la Grande-Bretagne reconnaîtrait la Palestine « lorsque cela servira la recherche de la paix. »

L’opération « Bordure protectrice », conduite par l’armée israélienne dans la bande de Gaza cet été, a provoqué de vifs remous dans le pays. Les dirigeants européens se trouvent sous la pression d’une partie de leurs opinions publiques, choquées par la disproportion des moyens militaires employés par Israël. Cette opération, destinée à réduire les capacités opérationnelles du Hamas, a fait plus de 2 100 morts, pour l’essentiel des civils, du côté palestinien. Des quartiers et des villages entiers, dans la bande de Gaza, ont été réduits à l’état de ruines.

A Londres, les manifestations propalestiniennes ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes. Le 5 août, la secrétaire d’État aux affaires étrangères, Sayeeda Warsi, a même démissionné, qualifiant la position britannique de « moralement indéfendable ». L’image d’Israël se dégrade. En juillet, 62 % des Britanniques estimaient que le gouvernement de M. Nétanyahou était responsable de crimes de guerre dans la bande de Gaza. A la même époque, 27 % des personnes interrogées se disaient solidaires des Palestiniens, tandis que 14 % seulement exprimaient la même sympathie à l’égard des Israéliens.

« Irritation grandissante »

« On ne veut pas faire toute une affaire de ce vote, réagit le porte-parole du ministère des affaires étrangères israélien, Emmanuel Nahshon. Ce qui nous inquiète, c’est le message envoyé aux Palestiniens. Plus il y aura de reconnaissances unilatérales, moins ils auront de raisons de négocier avec nous. »

Le vote britannique intervient peu après une initiative dans le même sens du gouvernement suédois. Lors de son discours de politique générale, le 3 octobre, le premier ministre social-démocrate, Stefan Lövfen, a annoncé sa volonté de reconnaître la Palestine. L’opposition suédoise a ­estimé que cette initiative était précipitée pour deux raisons : l’absence d’unité territoriale et politique entre la Cisjordanie et la bande de Gaza ; le refus du ­Hamas de reconnaître l’Etat ­d’Israël.

Près de cent pays ont déjà franchi le pas de la reconnaissance de la Palestine, dont les anciens membres européens du Pacte de Varsovie, dans les années 1980. Mais pas les pays fondateurs de l’Union européenne. Côté israélien, on est conscient de l’évolution des opinions publiques occidentales. L’une de ses mesures sera le résultat du vote au Conseil de sécurité, dans les prochaines semaines, sur la résolution proposée par le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, malgré le veto américain probable. Le texte réclame le retrait israélien complet, dans les deux ans, des territoires palestiniens occupés depuis 1967. « Quand on relie tous les points, c’est clair, on voit une irritation grandissante contre nous, reconnaît un diplomate israélien. Dans le passé, conservateurs et travaillistes britanniques étaient tous pro-israéliens. Aujourd’hui, en Europe, tout ce qui concerne l’occupation est de moins en moins accepté. »

Marges de manœuvre diplomatiques étroites

Le statu quo qu’entretient Benyamin Nétanyahou vis-à-vis de l’Autorité palestinienne, parallèlement à la poursuite des projets de colonisation en Cisjordanie, éloignent la perspective d’une solution à deux Etats. Les marges de manœuvre diplomatiques sont étroites. A Paris, on a observé avec attention le vote britannique.

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Lors de la conférence des ambassadeurs, le 29 août au Quai d’Orsay, le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, avait lâché cette petite phrase : « Il faudra bien, à un moment, reconnaître l’État palestinien. » Mais pour l’heure, Paris réfléchit au meilleur calendrier possible. « Il s’agit d’un fusil à un coup, explique un diplomate français. La question qu’on se pose est : comment être utile ? Une grappe de reconnaissances unilatérales, sur un ou deux ans, serait bien pour Mahmoud Abbas et les Palestiniens, mais elle pourrait avoir un effet pervers, en témoignant de notre incapacité à changer la donne sur le terrain tout en faisant vivre la fiction des deux Etats côte à côte. »

Paris aimerait jouer un rôle dans une initiative diplomatique, discutée en coulisses lors de la conférence des donateurs, au Caire, dimanche et lundi : la tenue d’une conférence internationale pour la paix. Il s’agirait de rompre avec la méthode utilisée depuis vingt et un ans et les accords d’Oslo, qui confient aux Etats-Unis le rôle de médiateur unique. Cette fois, c’est le plan arabe de paix, avancé en 2002 par l’Arabie saoudite, qui pourrait être promu. Le président égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, a exhorté dimanche le gouvernement israélien à le considérer sérieusement.

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