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Quand le placement de produits s’insinue dans la littérature ...

Une nouvelle forme assez effarante de placement de produit émerge. Citées dans des romans, où elles font partie de l’intrigue, les marques traquent le lecteur.

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Un livre qui annonce toute une génération future de e-booksqui seront autant d’appâts pour les annonceurs

Par Véronique Richebois

Publié le 7 nov. 2014 à 18:35

Une dernière citadelle vient de tomber. Il y a encore peu de temps persistait un domaine inviolé dans lequel le consommateur était assuré de pas être traqué comme un vulgaire gibier par les annonceurs et les professionnels du Net : la littérature. On n’y évoquait les marques qu’à bon escient, histoire de vanter – par exemple – le bon goût anglais de Sherlock Holmes en matière de chapeau, de canne ou de veston. Mais l’initiative tenait plus de la documentation méticuleuse que de la démarche promotionnelle parodiée par Bret Easton Ellis dans « American Psycho »...

Mais voilà que s’ouvre un nouveau chapitre dans l’histoire du « placement de produit ». selon un article assez détonant du « New York Times » (2 novembre). Le support ? Le dernier livre électronique d’Hillary Carlip, « Find Me I’m Yours ». L’astuce ? Moyennant une (forte) rémunération, on y pratique un placement de produit sélectif, « collant » littéralement à l’intrigue romanesque...

Démarche décomplexée

On croyait pourtant tout connaître du placement de produit. Procédé ancestral – déjà utilisé par les frères Lumière ! –, il met en avant, moyennant finances, un produit ou une marque sur différents supports culturels (cinéma, TV...) pour l’aider à gagner en sympathie ou en notoriété. Côté littérature, le rusé Gérard de Villiers avait flairé le filon dès les années 1970, « dealant par exemple », selon un acteur de l’époque, « avec le groupe Havas, le nombre de citations de la vodka Eristoff dans son prochain SAS... »

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Une démarche à la fois décomplexée... et quelque peu empirique. Dans son e-book, Hillary Carlip fait, elle, du cousu main. Elle met en scène une héroïne un peu barrée, Margs, travaillant pour un site Internet de robes de mariée, cherchant l’amour à Los Angeles... et accompagnée d’un protagoniste inattendu, l’édulcorant artificiel Sweet’N Low, indissociable de sa vie dans les 356 pages. Sweet’N Low ? C’est bien simple, c’est son « best friend ». Un copain l’attaque sur la possible dangerosité du produit ? « J’ai été vérifier en ligne, rétorque-t-elle, et j’ai trouvé des études qui montrent que Sweet’N Low est sûr [...] Il est impossible de démontrer le moindre lien entre le produit et tout type de cancer chez l’homme », assure Margs. Elle l’aime même au point d’exhiber ses ongles qu’elle a peints en rose à la manière du packaging des paquets.

Un investissement de 1,3 million de dollars

Intéressée par le procédé, la société Cumberland Packing Corporation, propriétaire de l’édulcorant, a investi 1,3 million de dollars dans le roman. D’autres ont suivi. Ubuesque ? A peine, si l’on admet qu’avant d’être une œuvre littéraire le livre électronique « Find Me I’m Yours », accessible sur tablette, publié par RosettaBooks et distribué par Amazon, Apple’s iBook Store, Barnes & Noble’s Nook Store et Kobo, est d’abord un appât pour annonceurs. Un leurre de roman. Via les 33 sites Internet et les Web TV shows, qui approfondissent certaines parties du livre et des liens vers les réseaux sociaux, « Find Me I’m Yours » est d’abord un outil à produire du contenu sponsorisé par de grandes marques. Le dispositif mis en place a pris trois ans et son développement a coûté 400.000 dollars aux studios Storyverse. Mais son succès, s’il se confirme, pourrait impacter le « business model » des éditeurs américains.

D’autant qu’Hillary Carlip détient un joker dont ne peuvent se targuer ses concurrents : à côté des e-books, elle a mis en vente 15.000 cartes électroniques à 6,99 dollars, au format de carte postale, assorties d’un code personnel. Le lecteur charge ainsi le code et le roman sur son ordinateur... mais ignore que, grâce à ce code, les services marketing peuvent tout savoir de sa manière de lire (ou de relire certains passages) et du moment où il s’interrompt. « Ce qui offre la possibilité aux annonceurs de disposer d’analyses ultrapointues sur les clients », souligne Arthur Klebanoff, patron de RosettaBooks.Déjà, HarperCollins et Simon & Schuster testent ces « e-book cards ». Le tracking a de beaux jours devant lui...

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