Distilbène : des effets délétères sur trois générations ou plus...

Les méfaits de ce médicament prescrit pour éviter les fausses couches et retiré du marché français en 1977 se perpétuent dans les familles.

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Le risque de cancer du sein est multiplié par deux pour les 80 000
Le risque de cancer du sein est multiplié par deux pour les 80 000 "filles D.E.S." exposées in utero en France, quelle que soit leur tranche d'âge. © SIPA

Temps de lecture : 2 min

Dans notre pays, 200 000 femmes enceintes ont reçu du Distilbène (D.E.S.) entre 1948 et 1977 (avec un pic de prescription entre 1964 et 1971), dans le but de prévenir une fausse couche. Cet oestrogène de synthèse était utilisé dans le monde entier, mais il a été interdit aux femmes enceintes dès 1973 en Angleterre, dès 1975 en Belgique et aux Pays-Bas... En France, il a fallu attendre 1977 et 160 000 enfants nés de mères ayant pris ce médicament. Malheureusement, certains d'entre eux souffrent d'effets indésirables liés à ce traitement. Les résultats d'une étude* portant sur 100 000 de ces enfants et petits-enfants viennent d'être dévoilés.

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D'après cette enquête, le risque de cancer du sein est multiplié par deux pour les 80 000 "filles D.E.S." exposées in utero en France, quelle que soit leur tranche d'âge (moins de 40 ans, 40-49 ans, 50 ans et plus). "Un tel doublement de risque est semblable à celui d'une femme dont une parente au premier degré (mère, soeur ou fille) a eu un cancer du sein. Cette élévation de risque pose la question d'une adaptation éventuelle du dépistage", précise le communiqué de presse. En d'autres termes, elles doivent bénéficier d'un examen à la recherche d'anomalies du vagin et de l'utérus (ayant des retentissements sur leurs futures maternités), d'examens gynécologiques tous les ans, ainsi que d'une information les amenant à consulter rapidement au moindre symptôme évocateur d'une tumeur.

Quatrième génération

Quant aux "fils D.E.S.", ils souffriraient, plus que les autres garçons, de malformations génitales, donc de cryptorchidie (testicule non descendu à la naissance), de kyste de l'épididyme (sur le conduit entre le testicule et la prostate), d'hypospadias (ouverture de l'orifice de l'urètre sous la verge et non à son extrémité) et d'atrophie testiculaire. Mais les auteurs de l'étude ne peuvent avancer aucun chiffre précis, en l'absence de groupe témoin. "Il a été observé dans notre étude six cas de cancer des testicules, ce qui est supérieur au nombre attendu dans la population générale", notent quand même les auteurs.

Enfin, les méfaits de ce médicament ne se limitent pas aux enfants exposés in utero. La troisième génération, celle composée de garçons et de filles issus de "filles D.E.S.", n'est malheureusement pas à l'abri. Chez les 4 663 "petits-enfants D.E.S." suivis, les spécialistes ont relevé une augmentation du nombre d'atrésies (obstructions) de l'oesophage. Les petits garçons présentent toujours plus d'hypospadias et de cryptorchidie que la moyenne. En revanche, il n'y a pas plus d'anomalies génitales chez les filles. À cela il faut ajouter une augmentation du nombre d'infirmes moteurs cérébraux - ce qui peut être lié à un taux plus élevé de naissances prématurées.

La quatrième génération est maintenant à l'étude, même si les enfants ne sont pas encore nombreux. "L'histoire du D.E.S. n'est pas terminée", note Anne Levadou, la présidente de l'association Réseau D.E.S. France. "Nous allons continuer à nous mobiliser pour que l'information parvienne à tous les professionnels de la santé pour que les filles D.E.S. bénéficient d'un suivi médical adapté." Il faut rappeler qu'elles bénéficient d'un congé maternité spécifique.

* Initiée par l'association Réseau D.E.S. France, cette étude a été financée par l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) dans le cadre de l'appel à projets compétitif lancé auprès des associations de patients en 2012. Elle a été soutenue par la Mutualité Française.
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Commentaires (9)

  • tinou7809

    Que de déclarations péremptoires, celle qui a vécu le drame d'une fausse couche appréciera le commentaire sur la sélection naturelle. Il est facile de juger maintenant avec les éléments en main. Moi à 62 ans je me mets à penser que je suis peut-être une enfant Distilbene (au moins 3 aspects coïncident) Je n'en veux à personne car pour mes parents après la perte de 2 enfants je fus un miracle. Il me reste à être vigilante

  • NEZAHUATLCOYOTL

    Ce ne sont pas les laboratoires qui prescrivent, mais les médecins avides des tirés á part des labo, écrits moyennant finance par tel ou tel expert.
    Les habitudes de consommation lambda se retrouvent dans tous les scanners et IRM que l'on fait á gogo.
    Le médecin devrait avant toute chose se servir de son expérience et non pas de ces feux verts péremptoires qui viennent d'en haut, mais parfois il serait hors la loi

  • marie-marie

    Dans notre pays les lobbys pharmaceutiques ont le dernier mot ! Et on est pas au bout des scandales, qu'ils soient étalés au grand jour ou soigneusement cachés pendant des décennies... Honte aux gouvernements complices !