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Santé

AVC sévère : vers une révolution dans le traitement

Une étude montre que la thrombectomie mécanique dans le traitement des AVC sévères permettrait bien de réduire significativement les risques de handicaps. Une nouvelle pleine d'espoir.
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Thrombectomie
La thrombectomie mécanique consiste à aller chercher directement dans le cerveau du patient le caillot sanguin responsable de l'AVC.
©NEJM

THROMBECTOMIE. Est-on à l'aube d'une révolution dans la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux (AVC) les plus sévères ? C'est en tout cas ce que peut laisser penser la publication d'une étude mercredi 17 décembre 2014 dans le New England Journal of Medicine qui vient confirmer les très bons résultats de la thrombectomie mécanique. Cette technique utilisée de façon encore marginale par certaines UNV (unités neurovasculaires spécialement dédiées à la prise en charge des AVC) consiste à aller chercher directement dans le cerveau du patient le caillot sanguin responsable de l'AVC.

Comme l'infarctus du myocarde, l'AVC est la plupart du temps provoqué par l'obturation d'un vaisseau sanguin. Les tissus et organes situés après ce "bouchon" ne sont plus irrigués. Privés de l'oxygène transporté par le sang, ils se nécrosent rapidement. Si la circulation sanguine n'est pas rétablie, les séquelles peuvent être irréversibles.

Présentation de l'étude parue dans le New England Journal of Medicine (©NEJM).

C'est une vraie révolution dans la prise en charge des AVC sévères." Dr Bertrand Lapergue, hôpital Foch (Suresnes)

Actuellement, le traitement de choix de l'AVC est la thrombolyse. Elle consiste à administrer par voie intramusculaire ou intra-artérielle un produit qui désagrège le caillot sanguin. Mais cette stratégie comporte certaines contre-indications du fait d'un risque accru d'hémorragie. Surtout, la thrombolyse doit être réalisée dans les 4h30 qui suivent les premiers symptômes. Or pour les AVC sévères, le traitement s'avère souvent insuffisant pour éviter les séquelles lourdes.

"C'est une vraie révolution dans la prise en charge des AVC sévères", s'enthousiasme le Dr Bertrand Lapergue. Ce spécialiste de l'AVC connait bien le sujet puisqu'à l'UNV de l'hôpital Foch où il travaille, la thrombectomie mécanique est une technique utilisée quasi systématiquement depuis quatre ans. "Mais c’est la première fois qu’on montre aussi clairement que cette technique est vraiment bonne pour les patients touchés par ces formes sévères d’AVC et qu'elle permet de réduire les risques de séquelles", explique-t-il.

L'opération doit être réalisée dans les 6 heures qui suivent les premiers signes de l'AVC. Elle ne prend généralement pas plus d'une heure et peut se faire sous anesthésie locale ou générale. Elle consiste à faire passer un microcathéter dans l'artère bouchée jusqu'au caillot sanguin. Celui-ci est retiré soit par aspiration via le cathéter, soit à l'aide d'un stent qui, déployé autour du caillot, capture la masse visqueuse (voir photo de une).

Les caillots sanguins, ou thrombus, sont des masses semi-solides et visqueuses. Leur formation est une réaction normale de l'organisme à la suite d'une lésion dans un vaisseau sanguin. Ils servent alors à colmater la fuite et à prévenir l'hémorragie. Mais lorsqu'ils se détachent de la région qu'ils devaient protéger, ils peuvent mettre d'autres organes en danger en venant boucher une artère. Les caillots qui obstruent la circulation sanguine dans le cerveau sont ainsi les principaux responsables de la plupart des accidents vasculaires cérébraux (AVC).

En France, on compte 130.000 AVC par an. Ceux dits "sévères" comptent ainsi pour 5 à 10% (entre 6.500 et 13.000 cas). Un type d’AVC qui laisse bien souvent les personnes touchées avec de lourds handicaps. "Ce n'est pas comme avec l'infarctus du myocarde où, si vous survivez, vous pouvez vous remettre. S'il ne vous tue pas, un AVC sévère vous laisse gravement handicapé, à vie dans un fauteuil roulant", rappelle le Dr Lapergue.

"Dorénavant, nous pouvons dire aux gens qu’en arrivant à temps, on est en mesure de les prendre en charge, de les soigner de façon à réduire significativement les risques de séquelles", insiste-t-il. Car l’enjeu déterminant dans la prise en charge des AVC reste l'urgence : "70% des cas d’AVC arrivent trop tard, c’est-à-dire plus de 6 heures après l’apparition des premiers symptômes annonciateurs d’un AVC", déplore le Dr Lapergue. 

La Haute autorité de santéva probablement modifier ses recommandations sur la prise en charge de l’AVC sévère." Dr Bertrand Lapergue

Pour lui, la Haute autorité de santé (HAS) va très probablement revoir ses recommandations officielles sur l'AVC afin d'y intégrer la thrombectomie mécanique qui n'y est pas recommandée faute d'étude fiable. "D’autres études du même type doivent être publiées durant le premier trimestre 2015 et devraient confirmer ces bons résultats", précise-t-il. "La HAS va probablement attendre la publication de ces études avant  de modifier ses recommandations sur la prise en charge de l’AVC sévère."

"Finalement, on assiste un peu à ce qui a été fait pour l'infarctus du myocarde. Une évolution sur 20 ans en trois étapes : d'abord la création d'unités spécialisées à la fin des années 1990 (UNV). Puis en 2003, l'apparition de solution médicamenteuse (la thrombolyse) pour dissoudre les caillots. La reconnaissance de la thrombectomie mécanique comme traitement efficace constituerait la troisième étape des progrès faits dans le traitement des AVC. Un peu comme la cardiologie a connu une révolution avec l'apparition des stents qui maintiennent les artères ouvertes", résume Bertrand Lapergue.

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