Pour le quotidien El Mundo, Manuel Valls est l’homme de l’année. Le 29 décembre dernier, le journal conservateur lui a consacré sa une ainsi qu’un long entretien. Le Premier ministre français y revient sans ambages sur l’actualité politique et économique française mais donne également la couleur de ses positions idéologiques plus profondes.

Manuel Valls évoque d’abord les mesures économiques d’ajustement budgétaire qui frappent son pays et qu’il pense inéluctables : “Pour préserver notre modèle social à la française et nos valeurs, nous devons changer.” Droit sans ses bottes, il prédit aux Français quelques années de sacrifices nécessaires afin d’atteindre le redressement budgétaire attendu : “Nous devons [encore] faire des efforts pendant quelques années pour que la France soit plus forte, pour que ses entreprises soient plus compétitives et pour que son secteur public soit plus efficace, avec moins de coûts et moins d’impôts.”

“Les différences entre la droite et la gauche se sont estompées”


Dans l’entretien d’El Mundo, le Premier ministre français dessine clairement les contours
idéologiques de sa famille politique, celle de la social-démocratie libérale : “Comme l’Angleterre de Blair, l’Espagne de Zapatero ou l’Allemagne de Schröder, nous avons dû mener
une politique d’ajustement.” Manuel Valls préconise ainsi un pragmatisme économique, qui doit porter ses fruits au-delà des divisions partisanes.

D’ailleurs, lorsque le journal espagnol interroge Manuel Valls sur les différences entre la gauche et
la droite, il répond clairement que “les différences entre la droite et la gauche se sont
estompées. […] Nous sommes dans un monde ouvert et
l’Europe s’est construite avec des politiques communes. […] Nous vivons une crise économique, une crise sociale, une crise de
confiance très importante, presque morale, mais aussi une crise
d’identité qui affecte tous les partis qui sont un jour au pouvoir, de
gauche comme de droite.”

“Je suis un patriote républicain et j’aime ce
pays”

Le Premier ministre définit la lutte contre l’extrême droite comme une
“priorité”. Il présente l’ascension du Front national comme une menace crédible et voit déjà la formation d’extrême droite “aux portes du pouvoir”. Mais, pour celui qui se présente pourtant comme un “patriote républicain”, “nous ne pouvons pas être représentés par une extrême droite
qui est tout le contraire de ce qu’incarne la France”.

Dans l’entretien, Manuel Valls se défend justement d’être nationaliste : “Je suis un patriote républicain et j’aime ce
pays. La France est un grand pays par sa littérature, sa culture, son
ouverture au monde, que nous devons préserver. Le nationalisme enferme. Etre patriote, c’est différent, c’est aimer son pays.” Alors que le journal espagnol avait titré en une sur ses origines (“Manuel Valls, un Espagnol qui veut changer la France”), le Premier ministre français revient sur ses ascendances étrangères : “Mon
père est barcelonais, ma mère suisse italienne, je n’avais aucune
famille en France. J’ai appris à être français.”