Le sort de Vincent Lambert suspendu à la justice européenne

Les juges de Strasbourg vont examiner le conflit entre Rachel, qui souhaite "laisser partir" son époux Vincent, et les parents, qui s'y refusent.

Source AFP

La Grande Chambre de la CEDH devrait rendre son arrêt dans un à deux mois.
La Grande Chambre de la CEDH devrait rendre son arrêt dans un à deux mois. © AFP

Temps de lecture : 3 min

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) se penche mercredi sur le sort de Vincent Lambert, un tétraplégique de 38 ans plongé dans un état végétatif, devenu l'objet d'une tragédie familiale et d'un débat de société. Les juges de Strasbourg vont examiner, lors d'une audience, le conflit entre son épouse Rachel, qui souhaite le "laisser partir", et ses parents, qui refusent l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation artificielles de leur fils. Mais il faudra encore attendre pour connaître l'épilogue de ce feuilleton judiciaire à rebondissements, la Grande Chambre de la CEDH ne devant rendre son arrêt que "dans au moins un à deux mois", selon une source proche de l'institution.

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Ce sont les parents, ainsi qu'une soeur et un demi-frère de Vincent Lambert, qui ont saisi la Cour. Ils contestent la décision du Conseil d'État, en juin, d'autoriser l'arrêt de l'alimentation et de l'hydratation artificielles qui le maintiennent en vie depuis plusieurs années. Leur requête a conduit la CEDH à suspendre dans l'urgence cette décision, le jour où elle a été prise, le temps de mener sa propre procédure. D'ordinaire, cette dernière peut durer plusieurs années, mais la Cour européenne a accéléré le rythme pour cette affaire qui concerne la vie d'un homme. Son instance suprême, la Grande Chambre, a ainsi été saisie directement pour se prononcer sur la conformité de la décision de la plus haute juridiction administrative française avec la Convention européenne des droits de l'homme.

Légalité

Selon le Conseil d'État, la décision d'arrêt des traitements prise par le médecin-chef de l'unité des soins palliatifs du CHU de Reims en janvier 2014, avec l'accord de Rachel, était légale et conforme au cadre tracé par la loi Leonetti de 2005 sur la fin de vie. Infirmant un jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, le Conseil d'État a considéré qu'un maintien en vie constituerait une "obstination déraisonnable", compte tenu du caractère irréversible de l'état végétatif de Vincent Lambert et d'un mauvais pronostic clinique. Il s'est aussi appuyé sur la volonté qu'il a exprimée selon sa femme, avant l'accident de la route dont il a été victime en 2008, de ne pas être maintenu artificiellement en vie s'il se trouvait dans un état de grande dépendance.

Mais ses parents, qui ont déménagé à Reims pour se rapprocher de lui, contestent l'idée qu'il ait eu cette demande, soulignant qu'il n'avait pas rédigé de directives anticipées. Les convictions religieuses de ces catholiques traditionalistes "n'ont rien à voir avec leur position", assure leur avocat, Me Jean Paillot. L'arrêt des traitements serait "une situation d'euthanasie", estime-t-il, ajoutant que "Vincent Lambert n'est pas du tout en fin de vie et qu'il irait mieux s'il était mieux pris en charge", dans un établissement spécialisé. Devant le CEDH, l'avocat va notamment faire valoir des violations du "droit à la vie" et de l'interdiction de "traitements inhumains ou dégradants" pour faire condamner la France.

Respect

"Qu'il soit maintenu en vie artificiellement et en totale dépendance, c'est insupportable par rapport à celui qu'il était", déplore de son côté Rachel, qui avait rencontré Vincent en 2002, alors qu'ils étaient tous deux infirmiers psychiatriques en Lorraine. "Respecter Vincent, c'est reconnaître qu'il n'aurait jamais supporté le moindre acharnement thérapeutique", selon la jeune femme de 33 ans, dont la position est partagée par cinq frères et soeurs, et par un neveu de son mari.

Ce nouvel épisode de l'"affaire Vincent Lambert" intervient alors que vient d'être relancé en France le débat sensible sur la fin de vie, et sur les améliorations à apporter au cadre légal que constitue depuis 2005 la loi Leonetti. Un débat sans vote doit avoir lieu sur ce thème le 21 janvier à l'Assemblée nationale, sur la base de propositions des députés Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (UMP), remises en décembre à François Hollande. Ce débat sera suivi de la présentation d'une proposition de loi, à une date qui n'a pas encore été précisée.

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Commentaires (23)

  • JLL

    Le bilan de cet acharnement peut être évalué, j'ai retrouvé des chiffres du coût des soins palliatifs datant de 2011.
    Les douze premiers jours coûtent 6 366 €, puis 415 € par jour, donc pour la "survie" de cet homme, qui ne demande qu'a mourir c'est donc 1 415 000 € sur ces sept années.
    Je vous laisse juge de ces chiffres, personnellement je pense que cette somme astronomique aurait pu être mieux employée, honte à ces parents (catholiques) extrémistes.

  • Hippocrate.

    Mais quand allons nous, enfin, nous aligner sur tous les autres pays évolués et essentiellement humains qui ont depuis longtemps adopté l'euthanasie ? Nous avons toujours des générations de retard... Éternels problèmes d'adaptation au siècle en vigueur ?

  • sirod

    Personnellement, j'ai vécu la même chose avec mon époux, je crois que l'acte d'amour est de le laisser partir. Autrement ça, je trouve cela de l’égoïsme.
    question à poser : quelle qualité de vie à cette personne ?