Charlie Hebdo accusé d'avoir alimenté la violence
Une musulmane jette le blâme sur Charlie Hebdo, une position qui ne fait pas l’unanimité
Une leader musulmane montréalaise accuse la rédaction de Charlie Hebdo d’avoir alimenté la violence qui a conduit à l’attentat contre elle hier.
«L’islam n’est pas une menace. Ce qui est une menace, c’est que des organisations comme Charlie Hebdo fomentent elles-mêmes la division et l’intolérance», lance Geneviève Lepage, présidente de l’Association musulmane québécoise.
Du même souffle, elle met en garde les «idéologues islamophobes» d’utiliser l’attentat de Paris pour alimenter l’islamophobie ici.
Horrible
La position de Mme Lepage ne fait toutefois pas l’unanimité au sein de la communauté musulmane.
Pour Lamine Foura, fondateur et secrétaire du Congrès maghrébin au Québec, l’islamophobie n’est pas l’enjeu: «Les musulmans sont autant victimes de cet acte. C’est l’humain qui est vraiment touché ici. Aller tuer des gens simplement parce qu’ils ont fait des dessins, des caricatures, avec un tel sang-froid... c’est horrible, je suis vraiment abattu.»
En soulignant que Charlie Hebdo a mis de l’avant «une forme d’intégrisme très irrespectueux des croyances des autres et de la diversité», Mme Lepage appelle à un discours d’ouverture et de tolérance.
M. Foura refuse quant à lui de lancer la pierre à la rédaction de l’hebdomadaire: «[cet attentat] est la plus grave caricature associée à l’islam qui ait été faite. Je préfère celles de Charlie Hebdo qui parfois défendent l’islam et s’attaquent aux fondamentalistes.»
Lui-même journaliste, M. Foura souligne que Charlie Hebdo a toujours respecté la loi.
Par ailleurs, la communauté musulmane Ahmadiyya du Canada a tenu à condamner catégoriquement l’attaque et a offert ses condoléances aux victimes et à leurs familles.
NOTE DE LA RÉDACTION
Mme Geneviève Lepage, de l’Association musulmane québécoise (AMQ), reproche à notre journaliste Anne Caroline Desplanques d’avoir «grossièrement détourné» ses propos au sujet de Charlie Hebdo. Mme Lepage se dit citée hors contexte. Le contexte de l’entrevue qu’elle a accordée hier matin par téléphone était pourtant clair.
Notre journaliste a posé une question précise à Mme Lepage pour lancer l’entrevue: «Dans le contexte de l'attentat contre Charlie Hebdo à Paris, craignez-vous une montée de l'islamophobie au Québec qui nuirait à la communauté musulmane ici?».
Mme Lepage a alors mis en doute le fait que ce geste ait un lien avec l’islam. Notre journaliste lui a donc rapporté les propos des assaillants, qui ont crié en sortant de la rédaction «On a vengé le prophète Mahomet!», d’après des témoins. Mme Lepage a répliqué en donnant son opinion sur Charlie Hebdo telle que reflétée dans les citations qui lui sont attribuées dans l’article de notre journaliste. Sans détour, elle a reproché à l'hebdomadaire d'être «intégriste», «islamophobe» et d'«envenimer les rapports». «L’islam n’est pas une menace. Ce qui est une menace, c’est que des organisations comme Charlie Hebdo fomentent elles-mêmes la division et l’intolérance», a-t-elle déclaré.
Mme Lepage a contacté notre journaliste hier après-midi pour se plaindre de la première version du texte publiée en ligne. Notre journaliste lui a alors demandé si les citations qui lui étaient attribuées étaient bien les siennes, ou si elle souhaitait se rétracter. Mme Lepage a alors bien spécifié qu’elle ne souhaitait pas se rétracter puisque c’était bien ses mots.