A la suite de l’attentat contre Charlie Hebdo, plusieurs journaux danois ont décidé de reprendre des caricatures de l’hebdomadaire français. Plusieurs journaux… mais pas Jyllands-Posten, qui est pourant le journal à l’origine du scandale des caricatures de Mahomet, en 2005.

Solidaire avec ses confrères, Charlie Hebdo avait à l’époque repris les douze caricatures danoises et y avait ajouté ses propres dessins du prophète. Impossible pour Jyllands-Posten de rendre la pareille aujourd’hui, explique le rédacteur en chef du journal, Jørgen Mikkelsen. “La vérité, c’est que pour nous, il serait complètement irresponsable de publier d’anciennes ou de nouvelles caricatures du prophète maintenant. Beaucoup n’aiment pas le reconnaître. Je le fais, moi, mais vraiment à contrecœur : Jyllands-Posten a une responsabilité envers lui-même et envers ses employés […] La liberté de l’expression est plus menacée que jamais.”

“Provocations imbéciles”

Son confrère Bo Lidegaard, rédacteur en chef de Politiken, n’est pas d’accord. Sur le site de Politiken, Lidegaard explique que son journal refuse de s’interdire quoi que ce soit : “Comme journal, comme média et comme société, nous insisterons pour nous exprimer. Nous le faisons aujourd’hui, et nous le ferons demain. Nous n’allons pas nous taire parce que des gens commettent ce genre d’attaques.”

Mais Lidegaard est contredit par le caricaturiste danois Mikkel Andersson qui travaille pour Jyllands-Posten.
Dans une chronique publiée dans les pages de Politiken, il note que Politiken a, en 2005, critiqué la publication des caricatures et expliqué qu’il refusait d’en faire de même, parce que, expliquait-il, il ne faut pas se servir de sa liberté d’expression pour des “provocations imbéciles”. Avoir publié les caricatures de Charlie Hebdo la semaine dernière est donc un beau geste, “mais il aurait fallu de la solidarité pour dissiper la menace qui pèse sur ceux qui osent la satire au sujet des dogmes de l’islam […]. Je comprends qu’on décide de ne pas publier les caricatures de Mahomet par peur, mais dans ce cas, il faut le reconnaître au lieu de se cacher derrière le prétexte de priorités rédactionnelles”.