“Sellafield
avait disparu des gros titres ces dernières années, après des décennies
marquées par les accidents nucléaires, l’incompétence de la
direction, l’usine à gaz
commerciale et la gabegie bureaucratique.” Mais voilà que le vieux site
nucléaire britannique revient sur le devant de la scène, indique The Telegraph, qui revient sur l’histoire du complexe dans un article titré “Why Sellafield costs us all a bomb”. Le démantèlement du site avait été confié en 2008, pour
80 milliards de livres [107 milliards d’euros] à un consortium privé, Nuclear Management Partners (NMP), qui regroupait l’américain URS, le britannique Amec Forster Wheeler et le français Areva. Ce consortium
était censé apporter “une expertise de classe mondiale” et “en finir
avec des décennies d’inaction, souligne le New Scientist,
citant le ministre de l’Energie de l’époque, Mike O’Brien. Mais, pour The Independent, NMP s’est montré aveugle, il a
ignoré les faits et les problèmes du site et a
persisté à donner des délais plus qu’optimistes malgré les
avertissements répétés des experts.Sept ans après la signature du contrat, la mission est donc retirée au consortium. En cause, selon The Telegraph : “Trop de retards accumulés et des surcoûts atteignant des niveaux
stupéfiants.” Il revient donc à l’Etat de démanteler Sellafield, via
la Nuclear Decommissioning Authority (NDA). Accidents et scandales
C’est
une nouvelle péripétie dans l’histoire chaotique de ce complexe
nucléaire. Ce site de 10 kilomètres carrés, sur lequel ont travaillé jusqu’à 10 000 personnes, est situé en Cumbrie, dans le nord-ouest de l’Angleterre, près
de la mer d’Irlande. Il comprend notamment une usine de traitement des
combustibles usés sur laquelle une fuite de matière radiactive a mis
huit mois à être détectée en 2005, une usine de production de MOX (un
combustible nucléaire recyclé), un réacteur graphite-gaz, une usine de
traitement des combustibles, plusieurs unités de production
d’électricité ou de combustible à l’arrêt et un site militaire. Et
surtout un centre de stockage de déchets nucléaires. Le tout en piteux état. “Sellafield a besoin d’aide, indique le New Scientist. Il va pourtant falloir attendre cinq ans de plus pour que l’un
des sites les plus dangereux du monde, sur lequel sont stockés des
déchets qui datent de l’aube de l’ère nucléaire, soit démantelé.” On
parle maintenant d’un nettoyage à l’horizon 2030 pour les premières
parties du complexe qui devraient être traitées.Une bombe à retardementPendant ce temps n’importe quel incident sur ce site en grande partie
à l’abandon pourrait larguer à nouveau des matériaux radioactifs dans
l’atmosphère du Royaume-Uni et au-delà, ajoute le magazine scientifique
britannique. Les 4 bassins de stockage et les îlots de Sellafield
contiennent des centaines de tonnes de déchets correspondant à soixante
ans d’exploitation. Des déchets qui remontent même à la fabrication de
la première bombe nucléaire britannique dans les années 1950 et 1960. 130
tonnes de plutanium, inutile et très dangereux, datant de la création du complexe et de la production de matériau pour la bombe nucléaire
britannique dans les années 1950 et 1960, sont stockées à Sellafield, où le béton des bâtiments craque de toute part, où des liquides se répandent dans le sol, où les gaz produits par la corrosion font courir
des risques d’explosion. Et où chaque mois supplémentaire sans intervention coûte des millions de livres aux contribuables britanniques, souligne The Independent.