“Devraient-elles retourner à l’école ?” C’est le dilemme auquel étaient confrontés les parents des jeunes étudiantes nigérianes qui se sont échappées des griffes de Boko Haram, après leur enlèvement en avril 2014 dans un lycée de Chibok, dans le nord du pays.

Profondément traumatisées par leur longue captivité, plusieurs de ces jeunes filles – ainsi que leurs parents – ont pris peur lorsqu’elles se sont vu proposer une bourse d’étude, l’été dernier. Car la secte à laquelle elles ont échappé, et dont le nom signifie “L’éducation occidentale est un péché”, avait juré “qu’elle tuerait les familles des étudiantes qui poursuivraient leurs études”. “Accepter représentait [donc] un acte de défiance à l’égard de Boko Haram”, explique The Guardian. Néanmoins, 21 des 57 rescapées viennent de rejoindre le programme préparatoire de l’université américaine du Nigeria, à Yola, à 300 kilomètres au sud de Chibok, où l’enlèvement a eu lieu.


Des parents terrifiés

Si cette entrée à l’université a été possible, c’est grâce à Godiya, la sœur d’une des jeunes nigérianes qui ont
réussi à échapper à Boko Haram, poursuit le journal britannique. “Elle fait partie du nombre croissant
de Nigérians qui combattent le groupe islamiste du mieux qu’ils le
peuvent”, note le quotidien britannique. Godiya, qui est garde de
sécurité à l’université, est allée trouver la rectrice, Margee
Ensign, pour lui demander si elle pouvait les aider.

“Margee Ensign a créé une fondation, qui a recueilli 50 000 dollars [environ 44 000 euros] afin de permettre à 10 jeunes filles d’intégrer
l’université pour un an”, explique le Guardian. Restait à trouver les candidates. Une tâche difficile puisque les parents étaient souvent terrifiés à l’idée que leur enfant puisse être victime d’une
nouvelle attaque. Finalement, après plusieurs semaines de recrutement, le nombre de candidates était bien supérieur à dix. “Arrivés à 21, nous avons dû arrêter, parce que c’était déjà un grand engagement”, indique la rectrice de l’université à la journaliste britannique Monika Mark.

Résilience

“Si la plupart des filles de Chibok sont toujours traumatisées par leur évasion, au point de refuser d’en parler, raconte le journaliste Geoffrey York dans les pages du quotidien canadien The Globe and Mail, dans la conversation elles sont joyeuses et parlent de leurs rêves et de leurs espoirs, ce qui révèle
du courage et une remarquable détermination.”

Enthousiaste, le journaliste canadien décrit “l’ambition de ces jeunes filles à devenir médecins ou ingénieures afin de retourner dans les villages pauvres dont elles sont issues et construire des hôpitaux”. Il rapporte le témoignage de Yana, 19 ans : “Il y a des personnes qui ont besoin de soins, mais elles ne peuvent pas se le permettre. Il n’y a aucun moyen de transport. Si vous n’avez pas de moto, vous pouvez mourir.”

Cet enthousiasme est aussi celui de Jessica Boyd, une enseignante canadienne interrogée par The Globe and Mail, “qui a initié les jeunes filles de Chibok au microscope”. Elle a été impressionnée par la résilience des étudiantes : “Une chance leur a été donnée, et elles ne la laisseront pas passer […]. Ce qu’on leur enseigne, elles veulent le transmettre à leur village pour les générations futures. J’ai beaucoup d’espoir pour le futur du Nigeria depuis que je les ai rencontrées.”