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RUGBY

Mourad Boudjellal : "Je suis un accident dans le monde du rugby"

L'équipe sud-africaine des Sharks défie jeudi Toulon sur la pelouse du club français. À cette occasion, son président Mourad Boudjellal a accordé un entretien à France 24. Il ne cache pas son plaisir de détonner dans le milieu du rugby français.

Mourad Boudjellal, le président du RC Toulon.
Mourad Boudjellal, le président du RC Toulon. Boris Horvat, AFP
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Le Rugby Club Toulonnais (RCT) a réussi, la saison dernière, à gagner à la fois le championnat de France et la Coupe d'Europe, décrochant au passage un deuxième titre européen consécutif. Un palmarès qui fait le bonheur de son président, Mourad Boudjellal, un personnage atypique dans le monde du rugby. Jusqu'en 2006, ce fils de parents immigrés installés à Toulon se consacrait essentiellement à sa maison d'édition de bande-dessinée qui lui a permis de faire fortune. Désormais, il a revendu “Soleil Productions” et gère le RCT dont il est leprincipal actionnaire. Dans son bureau dont les murs sont tapissés de planches de bande-dessinée, il revient sur les résultats de son club et son parcours dans le monde du rugby où il séduit autant qu'il agace.

Comment êtes-vous arrivé au rugby ?

En 1995, j'ai très mal vécu l'arrivée du Front national à Toulon. Et quand ils ont lâché la ville, elle n'était pas réconciliée. J'ai vu comment les gens pouvaient se rassembler pour fêter les victoires du club. Je me suis dit qu'il y avait quelque chose à faire et j'ai commencé à devenir un partenaire du club avec mon entreprise.

En prenant la direction du RCT en 2006, vous pensiez ne rester que queqlues années seulement. Qu'est-ce qui vous a poussé à changer d'avis ?

On a atteint des résultats exceptionnels et cette aventure est très excitante. C'est devenu ma vie alors que je n'ai jamais joué au rugby. Et je veux désormais que Toulon gagne le plus de titres possibles. Ça me plait beaucoup de me retrouver au milieu de tous ces milliardaires qui évoluent dans le rugby français et de réussir à les battre. Moi, le petit gars d'origine algérienne et arménienne face à certaines familles du Top 100 des fortunes françaises.

Vous maintenez des relations souvent houleuses avec les autres présidents de club. Avez-vous le sentiment d'appartenir désormais au monde du rugby ?

Je suis un accident. Je viens de la basse-ville de Toulon et j'ai failli me retrouver à faire (voler, NDLR) des auto-radios. Je m'en suis sorti et j'ai réussi à gagner de l'argent.

Pensez-vous que votre parcours a une valeur d'exemple ?

Quand je me déplace avec l'équipe, je suis toujours bien reçu dans toutes les villes par les stadiers. Ils habitent souvent dans des banlieues ou des quartiers difficiles. Ils me serrent la main ou veulent une photo avec moi car ils disent qu'ils se sentent fiers. Ça me fait plaisir. Je fais partie de la première génération d'immigration et on n'a pas été capables de faire du lobbying dans la société, pour montrer que l'échec n'était pas inéluctable.

Pensez-vous que votre parcours peut donner à des jeunes l'envie de venir au rugby ?

C'est compliqué car contrairement au foot ou à la musique, le rugby n'est pas perçu comme un moyen de se mettre à l'abri financièrement. Il garde l'image d'un sport de priviligiés.

Vous parlez beaucoup plus de politique que la plupart des présidents de club. Nourrissez-vous des ambitions politiques au niveau local ou national ?

Je sais que je ne porte pas le bon nom pour Toulon. En fait, c'est plutôt le niveau national qui m'intéresse. J'ai des idées en matière d'économie que j'aimerais pouvoir proposer. Dans le domaine fiscal, notamment, on pourrait adopter des mesures qui permettraient à l'État de dépenser moins et d'enregistrer plus de recettes. Et j'aimerais pouvoir en parler.

En 1995, vous aviez édité "Charlie saute sur Toulon", un livre qui fustigeait l'arrivée du FN. Comment avez-vous réagi à l'attentat perpétré contre "Charlie Hebdo" le mois dernier ?

Ça a été un moment extrêmement difficile à vivre. Comment comprendre que ces dessinateurs finissent criblés de balles ? J'avais été le premier éditeur de Charb et Tignous. Ils n'étaient certes pas des amis mais je les connaissais très bien. Tout cela a été très dur à vivre.

Vous avez su appliquer à votre club les recettes de gestion apprises à la tête de votre entreprise. Mais qu'avez-vous finalement retiré du rugby ?

Beaucoup de rencontres très fortes. Et puis des moments incroyables comme ces 10 secondes exceptionnelles dans un taxi, quand j'ai appris que Toulon était champion d'Europe (en 2013, il avait quitté le stade à Dublin lors de la finale et sauté dans un taxi car il était trop anxieux pour vivre la fin du match dans l'enceinte sportive). Dans ma vie professionnelle, je n'avais jamais ressenti ce genre d'émotions auparavant. Et c'est pour cela que je reste dans le rugby.

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