
Dans les 125 000 lignes de fichiers soustraits à la filiale suisse de HSBC, plusieurs milliers concernent des personnes vivant en France ou de nationalité française. Si posséder un compte en Suisse n'est pas illégal en soi – il suffit de le déclarer –, nombreux sont ceux qui l'utilisent pour frauder le fisc.
Combien de résidents français sont dans les fichiers ?
6 313Dans le fichier fiscal que Le Monde a pu analyser, environ 6 000 fiches sont associées de près ou de loin à la France. Elles ont été filtrées en fonction des numéros de téléphone ou les adresses des clients ou de leur code de nationalité, sans que cela n'en fasse forcément des suspects. Ce fichier contient non seulement les clients mais également les proches de ceux-ci, bénéficiaires ou légataires.
Fin août 2009, Eric Woerth, ministre du budget, sur la foi de ces fichiers analysés, demande à 3 000 évadés de « se dénoncer ». Dans son rapport consacré à la liste HSBC, le député Christian Eckert, devenu depuis secrétaire d'Etat au budget, explique que ce sont, au premier coup de tamis, 6 313 personnes physiques qui sont identifiées, dont 2 319 seulement semblent exploitables. L'enquête judiciaire a de son côté conclu qu'il y avait 2 956 personnes susceptibles d'intéresser l'administration.
Sur ces 6 000 fiches élaborées par le fisc, moins de 200 concernent des entités morales (entreprises ou fondations). Les 5 900 restantes sont des fichiers sur des comptes de particuliers, dont 3 200 sont clôturés et 2 700 sont encore ouverts au moment de la subtilisation des documents en 2007.
Quel est leur profil ?
Dans les fichiers, beaucoup de renseignements personnels permettent de dresser un portrait-type des clients français et de leurs proches. On sait ainsi que l'âge médian est de 60 ans au moment de l'enregistrement des données et que la moitié des clients sont nés entre 1935 et 1958. Il y a une vingtaine de mineurs à l'époque des faits dans les fichiers, souvent inscrits comme ayants droit des principaux clients.
Parmi les professions renseignées, après les « employés de HSBC », les commerçants, dirigeants d'entreprises – notamment dans le textile – et professions libérales sont les plus représentés. On compte ainsi une centaine de médecins et une cinquantaine d'avocats. Les fichiers indiquent 13 % de retraités, 5 % de « femmes au foyer » et 5 % de sans profession. Dans 20 % des cas, elle n'est pas indiquée.
Les enquêteurs expliquent également avoir appliqué des critères « judiciaires » pour restreindre leurs recherches : « Sur les 2 956 personnes physiques, 120 sont connues des différents fichiers d'antécédents judiciaires et 136 personnes sont liées par le biais d'un compte bancaire HSBC aux 120 personnes précitées. »
Combien détiennent-ils ?
1,5 M €Selon un décompte effectué lors de l'enquête judiciaire, l'ensemble des avoirs détenus sur les comptes, entre novembre 2006 et mars 2007, est de 180,7 milliards d'euros. Les enquêteurs ont choisi de calculer ces avoirs en prenant la moyenne sur l'ensemble de la période pour laquelle ils détenaient des opérations.
Sur ces 180,7 milliards d'euros, 85,5 millards sont des avoirs déposés sur des profils de sociétés offshores, soit près de la moitié. En France, ces avoirs offshores, qui s'élèvent à 5,8 milliards d'euros, se répartissent entre les îles Vierges britanniques à 54 % et le Panama à 34 %.
Soixante personnes physiques ou morales françaises détenaient plus de 15 millions de dollars, soit environ 11 millions d'euros en 2007. Les Français disposaient en moyenne de 2 milllions de dollars – environ 1,5 million d'euros – sur leurs comptes, rapporte M. Eckert. Mais cette somme varie fortement en fonction de la période considérée, et elle est tirée vers le haut par des comptes disposant de beaucoup d'avoirs.
Ces comptes sont-ils déclarés ?
0,2 %Posséder un compte à Genève peut être tout à fait légal pour les Français résidents fiscaux en Suisse ainsi que pour les Français ayant déclaré ce compte au fisc. Tous les comptes de la liste HSBC n'étaient pas frauduleux. Le rapport de M. Eckert explique qu'après études, seuls 0,2 % des comptes français dans les fichiers étaient déclarés. « Le recours par des résidents fiscaux français à des comptes ouverts auprès d'établissements suisses répond quasi exclusivement à un objectif de fraude fiscale », ajoute le rapporteur.
Combien ont rapporté les régularisations ?
300 M €Parmi les 3 000 noms agités par M. Woerth, un certain nombre se sont présentés d'eux-mêmes afin de régulariser leur situation. Les autres ont dû être contactés par le fisc. Selon des informations du Monde confirmées par le cabinet du ministre des finances, les seules régularisations ont rapporté 300 millions d'euros à Bercy au 5 février, précieuse cagnotte en temps d'austérité budgétaire.
Combien sont poursuivis ?
62Des procédures judiciaires sont en cours pour ceux n'ayant pas coopéré avec le fisc ou dont les cas sont trop graves pour se régler par une simple transaction. Pour 31 personnes, l'enquête est terminée et pour 31 autres elle est toujours en cours. Les avoirs chez la banque suisse de cette soixantaine de personnes s'élèveraient à 276,45 millions d'euros.
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