Les Libérés de la sécu revendiquent le droit de s'affilier à un organisme privé, après un jugement du tribunal de grande instance de Nice du 11 décembre dernier.

Un décret du 3 février 2015 divise par dix les indemnités maladie et maternité versées aux indépendants aux plus faibles revenus.

AFP/THOMAS SAMSON

Voilà des années que les relations entre le Régime social des indépendants et ses affiliés sont tendues. Ces derniers mois, la contestation est encore montée d'un cran avec les premiers rassemblements et autres opérations de patrons mécontents. Un contexte délicat, qui pourrait encore se retrouver mis à mal par la publication, le 3 février dernier, d'un décret revoyant les modalités de calcul des indemnités journalières versées en cas d'arrêt maladie ou maternité. Elles seront désormais divisées par dix pour les auto-entrepreneurs aux plus faibles revenus.

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Que dit ce décret?

Le décret du 3 février porte sur le montant des prestations en espèces versées au titre de l'assurance maladie et maternité des indépendants. La modification est immédiatement entrée en vigueur pour la maladie, et sera effective le 1er mai prochain pour la maternité.

Maladie. Dans les deux cas, sont concernés les cotisants dont les revenus annuels n'excèdent pas 10% du plafond de la Sécurité sociale. Soit 3804 euros pour l'année 2015. En cas d'arrêt maladie, ils ne peuvent tout simplement plus bénéficier d'indemnités journalières. Auparavant, tous les indépendants étaient logés à la même enseigne. Les prestations étaient calculées sur la base des revenus moyens déclarés sur les trois dernières années, avec un seuil minimal de 20,84 euros, et un plafond de 52,11 euros.

Maternité. Il en va différemment pour les indemnités maternité. Deux dispositifs de compensation existent à ce jour, à savoir l'allocation forfaitaire de repos maternité et les indemnités journalières. Les auto-entrepreneurs aux faibles revenus sont encore directement visés. Cette fois, leurs droits seront divisés par dix, dès le 1er mai. Jusqu'alors, l'allocation de repos maternité s'élevait à 3129 euros, pour toutes les affiliées au RSI. Elle était versée en deux fois, au septième mois de grossesse et après l'acouchement. Dans trois mois, elles n'auront droit qu'au dixième de cette somme, soit un forfait de 312,90 euros. La même logique prévaut pour les indemnités journalières. Les plus petits auto-entrepreneurs n'auront droit au 1er mai qu'à environ 229 euros pour 44 jours d'arrêt, 307 euros pour 59 jours et 386 euros pour 74 jours.

Combien d'auto-entrepreneurs concernés?

Interrogé par L'Entreprise, le RSI justifie ces nouvelles règles par la recherche d'une certaine "équité". "Les auto-entrepreneurs cotisent depuis 2009 en fonction de leur chiffre d'affaires, explique Jean-Philippe Naudon, directeur de mission au sein de la caisse. Il était normal de garder cette logique pour le calcul des indemnités journalières." La nécessité d'équilibrer les comptes à court terme et à long terme est aussi évoquée. Également contacté, le ministère des Affaires sociales n'a pas répondu à nos questions.

La réforme intervient six ans après la création du régime de l'auto-entrepreneur. Les difficultés constatées aujourd'hui ne sont pas nouvelles mais elles n'ont jamais été prises en compte. Comment, en effet, justifier qu'un auto-entrepreneur dégageant par exemple un revenu annuel de 4100 euros touche plus de 6000 euros d'indemnités maternité, alors qu'elles doivent compenser un manque à gagner? "Il fallait y remédier", répond Jean-Philippe Naudon. Tout en assurant qu'"il n'y a eu aucun constat d'abus massif, mais uniquement un phénomène d'effet d'aubaine".

Les changements risquent de surprendre plus d'un auto-entrepreneur, alors que leurs revenus moyens annuels s'élevaient en 2013 à 4900 euros, pas si loin du seuil retenu dans le décret. Près d'un auto-entrepreneur sur deux pourrait être concerné par la mesure, estime-t-on du côté du RSI. Les économies attendues n'auraient en revanche pas été calculées. En 2013, la caisse a versé plus de 380 millions d'euros d'indemnités maladie et maternité. Si l'arbitrage entre droits équitables et solidarité est nécessaire, la pilule risque d'être amère.

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