Les instances dirigeantes des grandes sociétés françaises résistent à la féminisation. Si des doutes subsistent encore sur ce point, ils seront balayés par l'édition 2015 de l'Observatoire Skema de la féminisation des entreprises (1), dont L'Express a pris connaissance en exclusivité. Dans les comités de direction et autres comités exécutifs, derniers bastions du pouvoir mâle, les femmes n'occupent que 10,2% des sièges, alors qu'elles représentent 34% du personnel et presque 30% de l'encadrement. A ces postes si convoités, elles sont à peine plus nombreuses aujourd'hui qu'en 2007, lorsqu'elles en détenaient 6%.
Des 'codirs' encore 100% masculins
Pourtant, leur nombre a été multiplié par quatre entre 2007 et 2014 dans les conseils d'administration et de surveillance, bondissant de 7,5% à 30%. La loi Zimmermann-Copé de janvier 2011 est passée par là: ces organes devront compter 40% de femmes en 2017. Mais cette obligation légale ne s'applique pas aux comités de direction... Ils sont toujours 100% masculins chez 16 poids lourds de l'économie tricolore et 14 accueillent une seule représentante de la gente féminine. Le groupe de restauration collective Sodexo fait figure d'oiseau rare avec 6 femmes dans son 'codir'. "Les entreprises ne promeuvent pas spontanément la diversité, ce qui milite en faveur d'une politique de quotas imposés par la législation", estime l'auteur de l'étude, Michel Ferrary, professeur de management des ressources humaines à HEC Genève et chercheur affilié à Skema Business School.
LVMH, prix citron
Plus étonnant encore: les femmes peuvent être nombreuses parmi les managers... et quasi-absentes des comités de direction. C'est le cas chez LVMH qui se voit décerner le "prix citron" par l'Observatoire Skema. Le géant du luxe, dont 74% des salariés et 62% des cadres sont des femmes, en compte une seule dans son 'codir'. Dans cette catégorie des "machistes" figurent également Accor, BNPParibas, Crédit Agricole, Natixis, Casino, Danone et Vivendi.
A l'inverse, 9 sociétés affichent des instances dirigeantes plus féminisées que leur encadrement. Ce sont les "amazones": Orange, Renault, Dassault, GDFSuez, EDF, Lafarge, Schneider, Vallourec et Suez Environnement.
- Etude annuelle menée depuis 2008 auprès des 60 plus grandes entreprises privées françaises. Seules sont analysées les 45 qui publient leurs données sociales comme la loi le leur impose.