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La crise alimentaire guette les pays d’Afrique de l’ouest touchés par Ebola

L’épidémie a entraîné une baisse des récoltes et une désorganisation des circuits de commercialisation des produits vers les villes. La Banque mondiale va distribuer semences et engrais à 200 000 paysans en Guinée, Liberia et Sierra Leone.

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Publié le 17 février 2015 à 12h03, modifié le 19 août 2019 à 13h25

Temps de Lecture 3 min.

Un responsable de l'Unicef explique à des enfants la transmission du virus par les animaux de brousse dont la consommation a été interdite.

Alors que la bataille contre la fièvre Ebola semble en passe d’être gagnée, les risques de crise alimentaire prennent le pas sur l’urgence sanitaire. La Banque mondiale a annoncé vendredi 13 février qu’elle débloquerait 15 millions de dollars sous forme de dons pour fournir semences et engrais. Et ainsi aider les paysans de Guinée, du Liberia et de Sierra Leone à assurer les prochaines récoltes. Plus de 10 000 tonnes de maïs et de riz sont en jeu et 200 000 paysans sont concernés. L’opération devra être bouclée d’ici avril, avant que ne commencent les premiers semis.

Un état des lieux des besoins a été dressé avec l’aide du Programme régional pour la productivité de l’agriculture en Afrique de l’ouest. Les fournisseurs de semences ont été identifiés dans huit pays de la région. La circulation de leurs camions sera facilitée, notamment au passage des frontières grâce à un système de suivi par SMS.

Des récoltes suspendues faute de main d’œuvre

« L’agriculture est le filet de survie de ces économies. Nous devons écarter le spectre de la faim dans les régions les plus touchées par Ebola », a déclaré Makthar Diop, le vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique. Depuis le déclenchement de l’épidémie, il y a près d’un an en Guinée, tous les efforts ont été concentrés sur les besoins sanitaires. Et si lundi, lors d’une réunion à Conakry, les chefs d’Etat des trois pays ont pu annoncé qu’ils se fixaient pour objectif de ramener à zéro le nombre de nouvelles contaminations d’ici soixante jours, ils vont maintenant devoir faire face aux lourdes conséquences économiques et sociales de l’épidémie.

À l’image de la province de Kailahun en Sierra Leone – épicentre de l’épidémie et importante zone de production de riz – les campagnes paient un lourd tribut à Ebola. Champs abandonnés, main-d’œuvre affectée par le virus, zones soumises à quarantaine, déplacements limités : depuis un an, le cycle des travaux agricoles a profondément été perturbé tout comme l’approvisionnement des villes où les prix des denrées de base ont connu des pics.

Les alertes remontent depuis plusieurs mois. En septembre, le gouvernement du Liberia a averti qu’une grande quantité de riz ne pourrait être récoltée en raison du manque de main-d’œuvre. Selon le bilan établi par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) début janvier, la production de riz en 2014 a baissé de 12 % au Liberia, de 8 % en Sierra Leone et de moins de 4 % en Guinée. Ces chiffres ont été plus importants dans les zones infectées par le virus.

En Guinée, la production maraîchère du Fouta-Djalon destinée en partie au Sénégal n’a pu être écoulée. Dans la province de Macenta, fortement touchée par l’épidémie, les éleveurs de volailles ont dû cesser leur activité faute de pouvoir importer des tourteaux d’arachides de Dakar et de vendre ensuite au Liberia. Dans l’ensemble de la zone, l’interdiction de consommer de la viande de brousse a privé les populations rurales d’une de leurs principales sources de protéines animales.

Sociologue au Cirad (Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement), Muriel Figuié insiste sur la désorganisation des circuits de commercialisation agricole pour expliquer l’aggravation de l’insécurité alimentaire. « Les commerçants, soit en raison de restriction de circulation, soit parce qu’ils avaient peur de se rendre dans les villages, ne sont pas allés s’approvisionner et certains paysans se sont retrouvés avec leur récolte sur les bras. Beaucoup ont dû accepter de baisser leurs prix », explique la chercheuse qui réalise une étude sur l’impact d’Ebola sur les filières agricoles pour la FAO.

Des filières agricoles déstabilisées

Cette réalité pourrait avoir des répercutions sur les récoltes à venir. « Ceux qui s’étaient endettés pour produire vont hésiter – s’ils en ont encore les moyens à réinvestir dans la prochaine récolte. Le coût des transports comme celui des intrants a augmenté et ils n’ont aucune assurance que les circuits de distribution seront rétablis d’ici quelques mois », poursuit-elle. C’est donc là que l’initiative de la Banque mondiale pourrait trouver toute sa portée.

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Le Programme alimentaire mondial (PAM) estimait à 520 000 le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire dans les trois pays en janvier. Ce chiffre pourrait avoir doublé d’ici le mois prochain. 2,7 millions de personnes ont bénéficié de distribution de nourriture depuis le début de l’épidémie. Avant la crise, le Liberia où une personne sur trois souffre de malnutrition, présentait la situation la plus précaire.

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