
2014 a été une « année terrible ». C’est en ces termes que Salil Shetty, le secrétaire général d’Amnesty International ouvre le rapport 2014 que l’ONG rend public mercredi 25 février. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, le monde compte plus de 50 millions de personnes déplacées. Or, quel que soit le continent ou le pays, « les dirigeants politiques se sont montrés incapables de protéger les personnes qui en ont le plus besoin », épingle le rapport.
Parmi ces réfugiés, quelque 4 millions de Syriens ont été chassés de leur pays par une guerre qui a fait plus de 200 000 morts. Seuls 150 000 d’entre eux ont pu se réinstaller dans l’UE. « Soit approximativement le nombre de personnes arrivées en Turquie en une semaine lorsque l’Etat islamique (EI) a assiégé Kobané », précise le rapport. Aujourd’hui, les pays voisins ont accueilli 95 % des exilés. Parfois dans une précarité extrême. Alors que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) avait établi une liste de 380 000 personnes fragiles, qu’il était urgent d’accueillir, l’UE ne s’est engagée que pour 36 300. « Sur deux ans, l’Allemagne a accepté d’en recevoir 20 000. Nous en avons pris 500 en 2014 et autant en 2015 », déplore M. Dubost, responsable du programme Personnes déracinées à Amnesty International France.
En paroles, la France est un pays ouvert aux réfugiés. Dans les actes, l’accueil s’y fait pourtant au compte-gouttes, selon le rapport. « La situation est paradoxale. D’un côté, les responsables politiques tiennent des discours d’accueil ; de l’autre, rien n’est facilité », regrette Jean-François Dubost, responsable des réfugiés à la section française de l’ONG. « La politique restrictive des visas limite le nombre de Syriens qui peuvent déposer une demande d’asile, puisqu’il faut être en France pour le faire. Notre rapport relève aussi que le 27 mars 2014, cinq d’entre eux ont été interpellés par la police à leur arrivée gare de Lyon et priés de quitter le territoire, alors qu’ils voulaient déposer une demande d’asile », regrette-t-il. Ce qui explique que seuls 2 071 Syriens aient obtenu le statut de réfugié en France en 2014 – en parallèle aux 500 sélectionnés par le HCR.
Violences policières
En France, les étrangers et Roms sont les premières victimes des manquements aux droits de l’homme que relève Amnesty International. Le rapport s’inquiète notamment des violences policières, et plus encore des suites qui leur sont données. « L’impartialité et l’exhaustivité des enquêtes menées par les autorités judiciaires sur ces allégations restent source de préoccupation », estime l’organisation.
L’ONG se pose des questions sur plusieurs cas précis et notamment celui d’Ali Ziri, un Algérien mort en garde à vue en 2009. Une ordonnance de non-lieu a été rendue dans l’enquête sur son décès. L’ONG s’interroge aussi « sur l’impartialité et l’exhaustivité de l’enquête » menée après la mort de Rémi Fraisse dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014, lors d’une manifestation contre le barrage de Sivens. À propos de la liberté d’expression, l’organisation s’interroge sur l’opportunité d’avoir interdit les manifestations de soutien aux Palestiniens des 19 et 26 juillet 2014. Elle rappelle aussi, tout en notant l’avancée du mariage pour tous, que des discriminations sont toujours subies par les transgenres.
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