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Économie

Téléthon : pourquoi faire un don vous rend plus heureux

Selon plusieurs études, non seulement l'acte de donner contribue au bonheur mais il augmenterait même le sentiment de richesse.
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Téléthon
La 26ème édition du Téléthon
BERTRAND GUAY / AFP

Alors que le Téléthon commence ce vendredi 6 décembre pour 30 heures de direct, Challenges.fr revient avec Mickaël Mangot, enseignant à l’ESSEC et consultant en économie du bonheur, sur ce que nous procure le fait de donner.

Quand on procède à un don pour une cause, qu'est-ce que cela nous apporte ?

Donner nous apporte une grande sensation de bien-être. C’est ce que l’on peut observer dans les enquêtes sur le bonheur et la satisfaction de la vie. Par exemple, très récemment, une étude internationale (1) a trouvé que dans 120 des 136 pays étudiés, le fait de déclarer avoir donné à une organisation caritative durant le mois écoulé avait une influence positive sur le bonheur. Lorsqu’à l’échelle mondiale le niveau de bonheur est régressé sur différentes variables incluant le fait d’avoir donné ou non, ce dernier apparaît comme ayant le même impact qu’un doublement des revenus !

L’impact du don sur le bonheur est donc très significatif…

Oui, indéniablement. Les chercheurs parlent d’une "douce sensation" ("warm glow" en anglais) lorsqu’ils évoquent cet impact psychologique positif bien documenté du don pour le donateur. Des études neurologiques sont venues en appui de ces observations. Elles montrent que les dons philanthropiques stimulent des zones cérébrales connues pour intervenir dans la sensation de plaisir ressentie suite à une récompense (2).

Retrouve-t-on le même effet lorsque l’on donne de son temps?

Le bénévolat a aussi clairement un effet positif sur le bonheur. Les bénévoles sont plus heureux et affichent même des indicateurs de santé physique meilleurs et des taux de mortalité plus faibles que le reste de la population. Dans les enquêtes, il est observé que le temps passé aux activités bénévoles durant une période est positivement associé aux changements de plusieurs indicateurs de bien-être (bonheur, satisfaction de la vie, estime de soi, santé physique, dépression…) sur la période suivante. Après, le mécanisme qui sous-tend cet effet positif n’est peut-être pas exactement le même que pour le don. Lorsqu’on fait une activité bénévole, on retire beaucoup des contacts humains que celle-ci implique.

Est-on plus généreux quand on est heureux ?

La causalité marche aussi dans l’autre sens. Plus on est heureux, plus on donne de son temps ou de son argent. C’est par exemple ce qu’ont conclu des chercheurs en analysant les réponses à deux enquêtes à trois ans d’intervalles sur le bonheur et les activités sociales (3). Ils ont noté que le temps passé à faire du bénévolat rapporté dans la deuxième enquête augmentait avec le niveau de bien-être affiché dans la première.

Faut-il être déjà riche pour pouvoir profiter de la "douce sensation" du don ?

Non, ce n’est pas une condition. Donner à des associations caritatives peut paradoxalement procurer la sensation de… s’enrichir ! Et doper par ricochet la sensation de bien-être. Deux chercheurs de Yale et Harvard (4) ont pu observer que les dons caritatifs augmentaient l’impression de richesse des individus. Pour l’impression de richesse, les dollars donnés pèsent beaucoup plus que les dollars gagnés. Dans leur étude, donner 500 dollars à une association va jusqu’à augmenter l’impression de richesse autant que gagner 10.000 dollars de revenus en plus par an.

Comment expliquer ce paradoxe ?

On est riche seulement de ce que l’on peut donner. Une explication est que donner confère un statut, autant et peut-être davantage que gagner de l’argent ou consommer certains biens. Il est d’ailleurs remarquable que ceux qui donnent ont une propension moindre à acheter des biens statutaires (vêtements griffés, montres de marque…). Le don peut donc venir avantageusement remplacer différentes activités que nous faisons pour gonfler notre statut social ou notre estime de soi. Cette dimension de la "douce sensation" du don peut rendre compte d’un fait particulièrement troublant : malgré leurs ressources limitées, les ménages pauvres dans certains pays dépensent en dons davantage (en proportion de leurs revenus) que les ménages plus riches. Ce qui va dans le sens de Voltaire: “Le bonheur est souvent la seule chose qu'on puisse donner sans l'avoir, et c'est en le donnant qu'on l'acquiert”.

 

(1) Prosocial spending and well-being: cross-cultural evidence for a psychological universal,  Laura Aknin et al., Journal of Personality and Social Psychology, 2013 http://www.apa.org/pubs/journals/releases/psp-104-4-635.pdf

(2) Neural responses to taxation and voluntary giving reveal motives for charitable donations, Harbaugh, Mayr, & Burghart, Science, 2007

(3) Volunteer work and well-being, Thoits et Hewitt, Journal of Health and Social Behavior, 2001 http://www.asanet.org/images/members/docs/pdf/featured/volunteer.pdf

(4) I give, therefore I have, Chance and Norton, manuscrit en cours de révision, 2013.

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