AboTabous, les crimes d'honneur se répandent
Un colloque a sensibilisé le public à la problématique des femmes menacées de mort au nom de l'honneur.

Elles s'appellent Mariam, Gigi, Lina, Ebru, Sara et Fatou. Elles ont entre 17 et 32 ans, sont Suissesses ou titulaires d'un permis B ou C, mais originaires des Balkans, du Liban, de Turquie ou du Tchad. Leur point commun? Avoir été menacée de mort par leur famille pour avoir refusé un mariage forcé ou sali la réputation de leur clan. Longtemps limités à certaines régions du monde, des crimes d'honneur sont aujourd'hui perpétrés en Europe en raison des flux migratoires. Un colloque organisé mardi par la Fondation Surgir et soutenu par la Ville et l'Etat de Genève a tenté de sensibiliser les professionnels à cette problématique.
5000 femmes par an
Selon l'ONU, plus de 5000 femmes sont tuées chaque année au nom de l'honneur. Aucun chiffre précis n'est actuellement disponible pour la Suisse. «C'est une problématique encore méconnue et certains crimes passent pour des violences domestiques», relève Jacqueline Thibault, directrice de la Fondation Surgir.A Genève, le foyer Au cœur des Grottes, qui accueille des femmes en situation de précarité, reçoit entre cinq et dix victimes avérées ou à risque de crime d'honneur par an. «C'est sûrement très peu par rapport à la réalité, note Anne-Marie von Arx-Vernon, directrice adjointe de la fondation qui gère le foyer. On observe que les femmes osent souvent solliciter notre aide une fois qu'elles ont obtenu leur naturalisation et qu'elles ne souhaitent pas vivre ce que leur mère et leur grand-mère ont subi.»Le travail du foyer est alors double: assurer aux victimes un lieu d'accueil aussi longtemps qu'elles en auront besoin et leur permettre de se former pour acquérir une autonomie financière.
«On essaie aussi de convaincre ces jeunes femmes de déposer plainte à la police, ajoute la directrice. C'est important pour leur sécurité. Lorsque les parents sont interpellés, certains craignent d'être expulsés. Ils sont alors prêts à faire des compromis.»Si le nombre croissant de migrants en Europe et en Suisse laisse penser que ces situations risquent de se multiplier, le foyer des Grottes n'observe pas une augmentation des demandes d'accueil. «Cela ne veut rien dire, tient à préciser Anne-Marie von Arx-Vernon. Aujourd'hui, les foyers de femmes battues sont pleins alors qu'il y a moins de victimes qu'avant. C'est simplement la preuve que celles-ci osent davantage parler. Ce n'est pas encore le cas des femmes menacées de crime d'honneur.»
Sensibilisation à Genève
Les choses bougent néanmoins. Depuis le 1er juillet 2013, les officiers d'état civil suisses sont tenus d'avertir les autorités compétentes lorsqu'ils soupçonnent un mariage forcé. Si les collaborateurs de la Ville de Genève ont été sensibilisés à cette problématique, aucune union n'a depuis été annulée pour cette raison. «Certains officiers peuvent avoir peur des représailles des familles, il est important qu'ils se sentent soutenus», note Anne-Marie von Arx-Vernon.De petits dépliants sur le mariage forcé sont en outre régulièrement distribués dans les écoles et les clubs sportifs du canton. Mais, pour la directrice de la Fondation Au cœur des Grottes, ce n'est pas suffisant. «Il faudrait en donner à tous les migrants et étrangers qui arrivent en Suisse pour les informer sur les lois en vigueur et les structures auxquelles ils peuvent faire appel en cas de problème.»Si les femmes sont les principales victimes de ces crimes, les intervenants du colloque ont souligné l'importance d'inclure les hommes dans ces actions de sensibilisation. «Ils sont eux aussi victimes de ces traditions qui les obligent à choisir entre leur honneur et leur mère ou leur sœur», a relevé Jacqueline Thibault.
Cet article a été automatiquement importé de notre ancien système de gestion de contenu vers notre nouveau site web. Il est possible qu'il comporte quelques erreurs de mise en page. Veuillez nous signaler toute erreur à community-feedback@tamedia.ch. Nous vous remercions de votre compréhension et votre collaboration.