Haova Toboha, six ans, tient fermement d'une main son petit sachet en plastique rempli de grains de maïs. De l'autre main, elle repousse les autres enfants et tente de grappiller dans la terre sablonneuse les grains tombés pendant une distribution de vivres effectuée par le Programme alimentaire mondial (PAM).

«J'ai ramassé ces grains, et je vais les ajouter à ceux que mes parents ont obtenus» durant la distribution du PAM, explique la petite fille, rencontrée dans le village de Berano, dans le sud de Madagascar.

Le PAM, dont les rations permettent actuellement à 120 000 personnes de survivre, a lancé un appel à l'aide internationale. Dans la région, une exceptionnelle sécheresse d'octobre à février a détruit les récoltes.

La nourriture s'est raréfiée, et les responsables locaux ont fait état de plusieurs cas d'enfants décédés, épuisés par la faim.

Au-delà de l'urgence, le PAM souhaiterait que des donateurs envoient immédiatement de quoi reconstituer les réserves alimentaires. «Les interventions, c'est maintenant qu'il faut les faire « indique à l'AFP la représentante adjointe du PAM à Madagascar Fatimata Sow Sidibe.

Les populations, exlique-t-elle, «sont en train de puiser dans leurs réserves alimentaires, et sont même en train de puiser dans les réserves de leurs corps».

Pour l'heure, la situation n'est pas qualifiée de «famine», comme en 1991, lorsque plusieurs centaines de personnes étaient mortes de faim dans la région. «À l'époque, des gens ont quitté leur village pour rejoindre les points d'eau et sont morts en cours de route», raconte à l'AFP Bertrand Randrianarivo, originaire de la région, qui travaille depuis 2001 avec les diverses ONG intervenant dans cette partie de l'île.

«La sécheresse frappe tous les cinq ou six ans» le sud de Madagascar, explique-t-il, suggérant la mise en place d'un système de drainage de l'eau, et un désenclavement de la région.

Beaucoup de bailleurs ont envisagé d'investir dans un tel système, mais ils ont été découragés par le manque de volonté des dirigeants successifs à Madagascar.

Au moins 16 enfants morts 

Cette année, le PAM ne parle pas de «famine», mais de «difficulté alimentaire aiguë». Mais quel que soit le nom du fléau qui les frappe, les habitants sont épuisés.

Raharisoa, 25 ans, est assise par terre, terriblement maigre. Sa fille de deux ans est morte de faim en décembre. «Nous n'avons pas pu nous occuper de notre enfant», soupire-t-elle: «À cause de la famine, les grandes personnes sont affaiblies et ne peuvent pas prendre soin des petits».

«En décembre, quatre enfants sont morts dans notre village à cause de la famine», confirme Masy, une femme agente communautaire de santé à Berano.

Dans le village voisin d'Imongy, le responsable du centre de Santé pour la zone, Marc Andriakotonindrina, a recensé une douzaine d'enfants morts de faim en décembre, selon des données collectées auprès des agents de santé villageois.

«Ces enfants n'ont présenté aucun signe de maladie, ils ont juste perdu du poids progressivement, jusqu'à leur mort», explique-t-il.

La sécheresse a détruit toutes les cultures dans le sud de Madagascar. Et les tentatives des paysans de replanter n'ont fait qu'épuiser leur réserve de semences et de nourritures. La pluie, tombée en février, est arrivée trop tard pour sauver la saison.

Selon des chiffres gouvernementaux, entre 200 000 à 350 000 personnes souffrent de la faim. Depuis quelques semaines, les rations du PAM permettent à 120 000 d'entre eux de manger régulièrement.

«Les choses ont changé depuis que le PAM nous a donné du maïs depuis février», assure Madame Masy.

Le ministre de l'Agriculture Roland Ravatomanga a promis des aides alimentaires pour les régions touchées. Une charge qui s'ajoutera aux efforts de ce pays pauvre pour aider les victimes des inondations et glissements de terrain, qui ont déjà fait 22 morts et 63 037 sinistrés à Antananarivo, la capitale.