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Création d'entreprise

Faut-il forcément avoir l'idée du siècle pour créer son entreprise?

Bien observer est primordial, se poser les bonnes questions aussi. Retour d’expériences avec Pierre Kosciusko-Morizet.

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SARL ou SAS ?
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Voici la suite du dossier "Comment créer son entreprise". Découvrez l'étape 1, Trouver l'idée. 

Comment passer de l’envie de créer son entreprise à l’idée pour se lancer ? L’alchimie des meilleurs projets n’est certes pas une science exacte. Mais mieux vaut procéder avec méthode. Quelle est mon offre ? Concerne-t-elle beaucoup de monde ? Est-ce facilement explicable ? Voilà des questions à se poser impérativement avant de tester ses réponses autour de soi. Petit manuel pour bien commencer.

Identifier un besoin

"Cela ne sert à rien d’avoir une idée révolutionnaire, affirme Yannick Pons, créateur d’Appartager.com, un site de colocation. Moi, je suis parti du fait que les gens n’arrivaient pas à se loger dans les grandes villes." C’est souvent le cas, les meilleures idées naissent d’un besoin évident. Les fondateurs de YouTube ont maintes fois raconté comment ils avaient créé leur portail de partage de vidéos sur Internet : il était compliqué d’échanger ces fichiers auparavant. Dix ans plus tard, 1 milliard de personnes utilisent cette plateforme et 300 heures de vidéos sont "uploadées" chaque minute sur le site. Plus récemment, la start-up Sigfox a fait le pari de développer un réseau mondial de transmission à faible consommation énergétique pour les objets connectés. Et comme il y en aura 80 milliards en 2020, les investisseurs ont suivi. La société toulousaine vient de lever 100 millions d’euros.

Créer un nouvel usage

"Lorsque je vivais à Marseille, dans ma rue, trois familles partageaient les frais d’une voiture à l’aide d’un tableau Excel, raconte Paulin Dementhon, le fondateur de Drivy. J’ai lancé un site d’auto-partage avec 5 000 euros, et je l’ai amélioré au fur et à mesure en intégrant de nouveaux services, comme l’assurance." Quatre ans après sa création, la société compte 400 000 membres qui partagent 20 000 véhicules. Evidemment, l’essor d’Internet offre des opportunités insoupçonnées il y a quelques années. Comme Drivy, BlaBlaCar est une interface fluide entre un stock, des places disponibles dans des voitures, et des particuliers en quête de déplacement. Le modèle peut se décliner à l’infini dans la location de bateaux (Click&Boat), d’appartements (Airbnb) ou tout autre bien (Zilok). Mais nouveauté ne rime pas forcément avec Internet. Damien Morin a eu l’idée de créer Save my Smartphone au vu des nouveaux forfaits mobiles sans engagement, pour s’imposer sur le marché de la réparation express des téléphones sans rendez-vous.

Réinventer un business

Pas la peine d’être polytechnicien pour avoir l’idée du siècle. Le plus jeune entrepreneur d’Europe, -Jordan Casey, 15 ans, a eu l’idée de lancer Teachware pour aider les enseignants de son école primaire à gérer les informations concernant leurs classes : notes, devoirs… Thierry Debarnot mettait ses copies et ses cours en ligne pour gagner un peu d’argent grâce à la publicité de Google. Aujourd’hui, il propose une douzaine d’applications gratuites pour réussir son bac, passer son code, ou s’entraîner pour le TOEFL. "La société emploie 50 personnes, et elle est en croissance de 30 % par an", raconte-t-il. C’est après avoir organisé une cagnotte sur le campus d’HEC que Céline Lazorthes a lancé Leetchi, un site pour réunir des fonds en vue d’un mariage, d’un anniversaire ou d’un voyage. La bonne idée peut aussi consister à baisser les coûts d’un business, comme TransferWise pour le transfert d’argent, ou Lending Club pour les prêts financiers. "A l’été 2006, j’ai lu mon relevé bancaire, ce que je ne fais jamais, raconte Renaud Laplanche, le fondateur de cette start-up valorisée 4 milliards de dollars. J’ai découvert que si je reportais le solde de ma carte de crédit sur le mois suivant, je devrais payer un taux d’intérêt de 18 %. Le même jour, j’ai regardé mon relevé de compte d’épargne : la rémunération était de moins d’1 %. Cela a fait tilt." Autrement dit, le déclic.

 

Le témoignage de Pierre Kosciusko-Morizet

"Avec mes associés, nous avons listé des domaines qui vont vivre des évolutions profondes dans les années à venir" 

Pierre Kosciusko-Morizet est cofondateur du site d’e-commerce PriceMinister, qu’il a revendu au japonais Rakuten. Depuis, il a investi dans une cinquantaine de start-up. Il veut lancer un nouveau projet dans les prochains mois.

Challenges. Vous vous êtes remis en mode création d’entreprise. Comment fait-on pour repartir de zéro ?

Pierre Kosciusko-Morizet. En janvier, j’ai commencé à constituer une équipe avec trois associés, dont Pierre Krings, cofondateur de PriceMinister avec moi, et un ex-partner de cabinet de conseil en stratégie, pour chercher la bonne idée. L’équipe passera bientôt à une quinzaine de personnes pour la valider, et lancer cette start-up au plus tard fin 2016.

Comment déniche-t-on la bonne idée ?

Souvent, les entrepreneurs partent d’une frustration du quotidien, d’un besoin qu’ils ressentent et auquel ils essaient de répondre. Mais je pense que la probabilité de trouver une "grande" idée de cette manière-là est assez faible, et je n’aime pas le côté passif de la démarche. Nous avons donc réfléchi à ce qui était important pour nous, à ce à quoi nous voulions que cette entreprise ressemble. Nous sommes arrivés à la conclusion que nous voulions une idée directement globale, et qu’elle soit utile pour les gens, c’est-à-dire qu’elle ait un impact positif.

Où se niche l’ambition ?

C’est important pour nous que cet impact soit significatif, donc, nous voulons partir sur un concept qui peut potentiellement atteindre une valorisation de 10 milliards d’euros. C’est un nombre arbitraire, bien sûr, mais cela oblige à penser grand, un peu comme Elon Musk avec Tesla pour les voitures électriques, ou SpaceX dans les vols spatiaux. Nous avons les moyens d’y investir 20 à 30 millions d’euros, ce qui permet d’aller sur des projets ambitieux, dont l’amorçage est parfois difficile en capital-risque. C’est cela qui me motive, sinon je pourrais arrêter de travailler opérationnellement, et continuer à investir dans des start-up à la façon d’un fonds d’investissement.

Quelle est votre façon de procéder ?

Nous avons, avec mes associés, listé des domaines dont nous pensons qu’ils vont vivre des évolutions très profondes dans les années qui viennent, comme l’agriculture, la santé, l’énergie, ou l’éducation. Sur chaque domaine, nous cherchons quels sont les grands drivers de changement, comme la démographie, le réchauffement climatique, les énergies renouvelables. Sur chaque "sous-domaine" que nous aurons identifié, une de nos équipes va passer un à deux mois à comprendre les innovations en cours, étudier les grandes tendances, imaginer les changements à venir.

Faut-il connaître parfaitement un secteur pour trouver l’innovation de rupture ?

La plupart du temps, les spécialistes qui sont dans un domaine depuis vingt ans passent à côté des nouveautés. Ils fonctionnent sur un mode défensif, et ont du mal à être iconoclastes. A l’inverse, c’est difficile d’avoir des idées intelligentes sur un secteur auquel on ne connaît rien. D’où l’idée d’avoir des équipes qui vont nous permettre de comprendre les grandes tendances d’un secteur, pour ensuite générer des idées en s’interrogeant selon trois axes. D’abord, sur l’impact des innovations technologiques, comme le cloud, le big data, l’Internet mobile, l’Internet des objets. Ensuite, sur les évolutions des comportements des consommateurs pris dans leur individualité, comme l’économie du partage. Et enfin, selon des tendances de fond, qui peuvent être sociétales, comme la montée du chômage ou les migrations de population.

Créer une équipe de génération d’idées, est-ce une innovation ?

Cela peut permettre d’arriver sur des idées qu’on ne peut pas avoir en partant simplement de ses besoins au quotidien, et, à ma connaissance, personne n’a encore mis en place une telle structure de génération d’idées. Nous les testerons auprès des experts des secteurs concernés, pour être sûrs de n’avoir pas oublié quelque chose d’important, une tendance que nous n’aurions pas identifiée, par exemple. Bien sûr, nous ne sommes pas du tout sûrs d’arriver à trouver la grande idée de cette manière, et envisageons la possibilité de ne rien trouver de passionnant. Mais je pense que l’on risque plus d’avoir trop d’idées que pas assez, et que le choix sera probablement difficile jusqu’à avoir la certitude quasi mystique d’avoir trouvé l’idée géniale. Il ne restera alors plus qu’à la mettre en œuvre.

Propos recueillis et article par Kira Mitrofanoff

 

Pour aller plus loin 

>> Les 4 étapes indispensables pour créer son entreprise

>> Construire un business plan

Les livres

L’ABC du créateur d’entreprise, Tertium éditions, 360 pages, 26,50 euros.

Le Petit Livre rouge de la création d’entreprise, par Guilhem Bertholet, éditions Eyrolles, 264 pages, 20 euros.

 

Les sites

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