Clichy-sous-Bois: Début du procès de la mort de Zyed et Bouna, dix ans après

Clichy-sous-Bois: Début du procès de la mort de Zyed et Bouna, dix ans après

JUSTICEDeux policiers sont jugés pour non-assistance à personne en danger à partir de ce lundi à Rennes...
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

Les familles attendent ce moment depuis longtemps. «Pour comprendre» ce qui a pu se passer ce 27 octobre 2005, quand Bouna Traoré et Zyed Benna, 15 et 17 ans, ont trouvé la mort dans un transformateur EDF à Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), alors qu'ils étaient poursuivis par les forces de l'ordre. Près de dix ans après les faits, le procès des deux policiers poursuivis pour non-assistance à personne en danger s'ouvre ce lundi devant le tribunal correctionnel de Rennes, où il a été dépaysé. Au terme de ce marathon judiciaire, les policiers espèrent retrouver leur honneur et les familles des deux garçons attendent des réponses pour enfin faire leur deuil.

>> Affaire Zyed et Bouna: La chronologie des faits

Déterminer la responsabilité des policiers

«S'ils entrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau». Prononcés par un des policiers, ces quelques mots sont au cœur de ce procès, et pourraient déterminer si les fonctionnaires mis en cause sont coupables ou non de non-assistance à personne en danger, eux qui encourent une peine de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende. «C'est clairement un élément à charge, peut-être le seul sur lequel repose le procès», estime Fabien Jobard, chercheur au CNRS et spécialiste des questions de police et de justice, pour qui «ce qui est en jeu, c'est la notion de faute».

«Aucune faute n'a été commise par nos collègues, répond-on du côté d'Alliance Police, le syndicat majoritaire. Ils n'ont fait que leur travail et s'ils avaient vu les jeunes entrer sur le site EDF, ils auraient évidemment tout fait pour leur porter secours». Une ligne de défense confirmée par les différentes étapes du procès, où les deux policiers n'ont jamais été condamnés.

Un combat pour la justice

Après de multiples rebondissements, dix ans se sont presque écoulés sans l’affaire n’ait d'épilogue. «Les cas qui mettent en cause la police ne sont pas les préférés du parquet, qui est structurellement dépendant des policiers. Cela peut donner lieu à une certaine lenteur», juge Fabien Jobard. «Il y a eu la volonté d’exténuer la procédure et de faire jouer la lassitude», déclarait il y a quelques jours Me Jean-Pierre Mignard, l'un des avocats des familles de Zyed et Bouna. «Dix ans c'est long, il a fallu batailler pour que cette histoire arrive au tribunal», abonde Mohammed Mechmache, cofondateur du collectif ACLEFEU, qui avait vu le jour au lendemain des émeutes de 2005.

«C'est important aujourd'hui de mettre un point final à cette histoire, explique le jeune homme. Ce procès, nous en avons besoin pour enfin pouvoir passer à autre chose, pour que les familles puissent faire leur deuil et que dans les quartiers on n'ait plus ce sentiment de justice à deux vitesses. C'est aussi pour que Zyed et Bouna ne soient pas morts pour rien», affirme Mohammed Mechmache, qui rappelle que «ce procès n'est pas un combat contre la police, mais pour la justice».