Consommation

Un partage qui tourne mal

Offrir sa maison en location sur le site Airbnb a coûté des milliers de dollars à un père de famille montréalais, qui veut mettre en garde les personnes qui aimeraient arrondir leurs fins de mois de cette façon.

Pendant un an, Dave a annoncé son logement, au rez-de-chaussée de son duplex de Rosemont. Père séparé de trois enfants en garde partagée, il y voyait un bon moyen de rentabiliser les chambres inutilisées. « Parfois, je passais la fin de semaine à la campagne, explique-t-il. En un an, j’ai loué une quinzaine de fois, ce qui m’a donné des revenus d’environ 3000 $. »

Les locataires étaient généralement respectueux et Dave y trouvait son compte. Jusqu’à ce qu’une jeune fille de Toronto le contacte, par la messagerie d’Airbnb, pour louer sa maison le temps d’un week-end, il y a deux ans. Comme elle disait ne pas avoir de carte de crédit, elle propose à Dave que l’un de ses amis montréalais passe le payer comptant. « Le gars est venu le vendredi, il m’a payé et je lui ai donné les clés, raconte le propriétaire. On s’est parlé environ 15 minutes. Il avait l’air correct. »

Mais le lendemain, vers 23 h, alors qu’il se trouve au chalet d’un ami, Dave reçoit un appel de son locataire, paniqué.

« Il me dit qu’il y a 200 personnes chez nous qui font un party, qui sont en train de tout démolir et de partir avec mes affaires. »

— Dave

La police est appelée, puisque les fêtards dérangent le voisinage. Plusieurs quittent l’endroit en vitesse, dont certains à bord d’un camion contenant des meubles et appareils électroniques appartenant à Dave. Grâce à un témoin ayant noté la plaque d’immatriculation, les fuyards sont interceptés à Laval.

Quand le père et ses enfants rentrent à la maison le lendemain, ils sont sous le choc. « Ils avaient brisé et enlevé les meubles des chambres des enfants, fait des trous dans les murs pour poser des haut-parleurs, vidé le sous-sol, endommagé les planchers, renversé de la bière partout », raconte-t-il. Certaines de ses possessions retrouvées dans le camion à Laval sont aussi endommagées. Les dommages sont évalués entre 12 000 et 15 000 $.

UN PARI RISQUÉ

Il appelle son assureur pour raconter sa mésaventure et se fait répondre qu’il ne sera pas indemnisé puisque son contrat ne permet pas la location à court terme. Il se tourne alors vers Airbnb, où on lui dit que, comme le paiement a été fait comptant et non par l’intermédiaire du site, il n’a pas droit à un remboursement. Le site de location offre une « Garantie Hôte », censée offrir un dédommagement pouvant atteindre 900 000 $ en cas de dégâts causés par des locataires. Mais il prévient que ce n’est pas une assurance et que certains biens ne sont pas couverts.

Il a été impossible de connaître le nombre d’incidents du genre répertoriés par Airbnb. Un représentant de l’entreprise nous a simplement répondu par courriel que « ces incidents isolés sont rares et nous travaillons avec notre communauté pour régler les problèmes qui surviennent ».

Après bien des discussions avec les représentants californiens de l’entreprise, Dave a reçu un maigre 500 $, en s’engageant à ne pas parler publiquement de ces fâcheux événements. Son assureur a annulé son contrat. Pour être à nouveau couvert, Dave a dû payer une prime trois fois plus élevée pour s’assurer auprès d’une entreprise spécialisée dans la clientèle à risque.

PRÉVENIR SA COMPAGNIE D'ASSURANCES

Les contrats d’assurance habitation exigent généralement que les assureurs soient informés de toute pratique qui peut modifier le risque pour eux, explique Caroline Phemius, porte-parole du Bureau d’assurance du Canada (BAC).

« Si un client veut louer sa maison ou son logement, l’assureur peut refuser de le couvrir, ou augmenter les primes, ou alors retirer des garanties, comme la protection contre le vol et le vandalisme. »

— Caroline Phemius, porte-parole du Bureau d’assurance du Canada

Les automobilistes qui décident de devenir chauffeurs, par l’intermédiaire d’une application comme UberX, doivent aussi en parler avec leur assureur. Au Québec, les contrats d’assurance auto sont standardisés : le contrat de base est le même pour tout le monde, et il exclut le transport de personnes, rappelle Mme Phemius. « L’assureur peut refuser de couvrir une personne qui s’y adonne, ou encore augmenter la prime de façon substantielle, en ajoutant un avenant au contrat. »

Chez Uber, on affirme que les chauffeurs sont justement invités à s’informer auprès de leur assureur. Mais l’entreprise a aussi une police d’assurance de 5 millions qui couvre tous les chauffeurs.

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