Quand Ofer Miller ira déposer son bulletin dans l'urne le 17 mars, jour des élections législatives en Israël, il pensera beaucoup à sa "sécurité". Mais pas celle à laquelle le premier ministre sortant, Benyamin Netanyahu, promet de veiller en s'attaquant à la menace nucléaire iranienne. "La sécurité c'est aussi de pouvoir joindre les deux bouts, de mener une existence normale sans être obsédé par le coût de la vie", s'agace ce grand échalas de 27 ans. Lui et sa compagne Hilla partagent leur temps entre des études en sciences humaines à Jérusalem et des "boulots d'appoint". "Cela nous permet à peine de payer notre nourriture et les factures. Tout est si cher ici, même sortir dans un bar est devenu un luxe, soupire-t-il. Si mes parents ne m'aidaient pas pour le loyer, c'est simple, je devrais renoncer à mes études." L'an prochain, le couple songe à s'expatrier aux Etats-Unis. Mais avant cela, Ofer ira voter, avec un espoir: "Qu'on en finisse avec Netanyahou puisqu'il ne s'intéresse pas aux soucis de ses citoyens."

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41% des Israéliens sont en situation permanente de découvert

C'est le paradoxe de cette campagne. Centrée sur la personnalité du premier ministre au point de faire passer le scrutin pour un genre de référendum, elle a fait la part belle à ses thèmes de prédilection. A commencer par le danger que représenterait un Iran doté du nucléaire. Pourtant, selon un récent sondage diffusé par la télévision publique, ce sont les questions socio-économiques qu'une majorité d'Israéliens (56%) mettent au centre de leurs préoccupations pour ces élections.

Rien d'étonnant à cet ordre des priorités. La vie chère est devenue le sujet de polémiques récurrentes dans l'Etat hébreu. Loin d'être circonscrit aux plus pauvres, ce phénomène affecte toute une classe moyenne essorée par la montée des charges, le prix de l'essence ou le coût du logement. Des statistiques officielles révèlent que 41% des Israéliens sont en situation permanente de découvert. Plus de la moitié d'entre eux disent y voir le résultat de la cherté de la vie. Un rapport du contrôleur d'Etat publié fin février a ranimé la controverse : on y lit qu'entre 2008 et 2013, les prix de l'immobilier ont bondi de 55% et ceux de la location de 30% tandis que les revenus stagnaient.

L'Union sioniste et Koulanu se sont saisis des questions sociales

Grande concurrente du Likoud de Netanyahou, l'Union sioniste menée par le travailliste Isaac Herzog a promis d'agir sur les bas salaires, le délitement des services sociaux, les inégalités et la flambée de l'immobilier. Ces thèmes ont aussi constitué le socle de la campagne du nouveau parti Koulanu, formé par un ancien ministre Likoud, Moshe Kahlon, potentiel "faiseur de roi" à l'issue du scrutin.

Netanyahu a, lui, choisi d'éluder ces questions. Un parti pris qui risque de lui coûter des points, selon les politologues. "Le grand public lui en veut de cette posture, juge Motti Morel, stratège électoral qui fut l'un des artisans de la victoire de "Bibi" en 1996. Il s'est trompé de sujet car beaucoup d'Israéliens s'inquiètent bien plus de leur emprunt et des prix alimentaires que de la menace iranienne."


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