France

Les Américaines toucheront autant que les Américains en 2058. Et en France?

En effectuant des projections statistiques, on se rend compte que, dans l'Hexagone aussi, les femmes devront attendre encore longtemps avant d’obtenir la parité salariale.

Toppled. <a href="https://www.flickr.com/photos/summerskyephotography/13999575083">Summer Skyes 11</a> via Flickr CC <a href="https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/">License by.</a>
Toppled. Summer Skyes 11 via Flickr CC License by.

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur Quartz, Institute for Women’s Policy Research, Insee

Une étude récemment réalisée par l'Institute for Women’s Policy Research aux Etats-Unis a tenté de répondre à une question que beaucoup se posent: combien de temps faudra-t-il attendre avant que les femmes gagnent autant que les hommes? Le site Quartz rapporte que, outre-Atlantique, pour chaque dollar gagné par un homme, une femme touche seulement 78,3 cents. Certes la situation s’améliore (en 1980, une femme touchait 60 cents pour chaque dollar empoché par un homme), mais la course vers l’égalité ralentit depuis le début des années 2000. L’étude explique que, si l’on extrapole les données déjà disponibles, la parité n’apparaîtra pas avant l’année… 2058.

Et en France? Depuis les années 1950, l’Insee collecte des informations sur le salaire moyen des hommes et des femmes selon leur secteur d’activité. Grâce à l'une de ces bases de données, portant sur les salaires nets annuels moyens des postes à temps complet en 1950 et 2010, nous avons pu calculer l'évolution de l’écart salarial homme-femme sur cette période:


Après une période de creux allant jusqu’au début des années 1970, le montant du salaire des femmes rejoint peu à peu celui des hommes. En 1959, le salaire moyen des femmes était inférieur de 36,63%. Cinquante ans plus tard, ce pourcentage s’était réduit à 17,90%. Il n’empêche, comme pour les Etats-Unis, la courbe affiche un ralentissement à la fin des années 1970. Depuis, l’écart continue de se réduire, mais beaucoup plus lentement.

On peut donc, comme l’ont fait les responsables de l’étude américaine, donner une estimation de ce que pourrait devenir cette courbe dans les années à venir. Nous avons pour cela envisager deux scénarios, basés sur deux périodes de croissance différente: la première entre les années 1973 et 1992, la seconde entre 1996 et 2010. Si l’on se base sur la tendance examinée entre 1973 et 1992, et que l’on applique cette moyenne aux prochaines années, l’égalité homme-femme en matière de salaire pour les postes à temps complet devrait être effective avant 2047.
 



C’est onze années de moins que l’estimation prévue pour les Américains. En revanche, si l’on se base sur la hausse affichée sur une période plus proche de nous, entre 1996 et 2010, il faudra attendre l’année 2095. 


D’autres données fournies par l’Insee, moins étalées dans le temps, prennent en compte un échantillon différent pour le calcul de la différence de salaire entre hommes et femmes: «les salariés en équivalent-temps plein du secteur privé et des entreprises publiques, y compris bénéficiaires de contrats aidés à partir de 2011». En procédant aux mêmes projections, cette fois à partir de l'évolution des années 2008-2012, on découvre qu'il faudrait attendre 2069.

 

Plusieurs mesures ont été prises depuis vingt ans en faveur de l’égalité entre les sexes dans le milieu du travail, de la création en 1995 de l’Observatoire de la parité entre les femmes et les hommes jusqu’à la loi de 2006 sur l’égalité salariale entre les femmes et les hommes. En 2014, l'Observatoire des inégalités donnait plusieurs raisons aux écarts persistants de salaires

«Un grand nombre d’emplois [que les femmes] occupent se trouvent dans le secteur des services peu qualifiés, où les salaires sont faibles: grande distribution, services domestiques, etc. En même temps, de nombreux postes à responsabilités les mieux rémunérés leur restent fermés. Enfin, une proportion plus importante de femmes que d’hommes semble refuser la compétition qui résulte d’un marché du travail très hiérarchisé et de plus en plus tendu.»

En 2001, Dominique Meurs et Sophie Ponthieux estimaient ainsi que l'écart de salaire s'explique par exemple par des durées de travail moins longues pour les femmes (un tiers des femmes étaient en temps partiel, contre 5% des hommes) ou encore par leur passé professionnel (éducation, expérience, interruption de carrière,...). En 2006, les mêmes chercheurs expliquaient que si un patron «croit que les femmes sont, du fait de leurs responsabilités familiales, moins disponibles que les hommes, il préférera ces derniers pour certaines fonctions et les femmes auront plus de difficultés que les hommes à obtenir des promotions.» Les femmes vont alors, en étant exclues de certains postes, «trouver moins de motifs à se former, à s’investir dans leur carrière, voire à rester actives» ou voir leur rôle au sein du ménage dévalué pour des raisons financières.

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