Les Maldives, immense archipel constitué d’une myriade d’îlots perdus dans l’océan Indien, n’ont jamais semblé aussi isolées, après la condamnation à treize ans de prison de son premier président démocratiquement élu, vendredi 13 mars, accusé de « terrorisme ». Après le premier ministre indien, Narendra Modi, qui a annulé une visite d’Etat à Malé, les Nations unies, les Etats-Unis, la France et l’Union européenne ont vivement critiqué la justice maldivienne pour ce qui s’apparente à une mise à l’écart de l’ancien président Mohamed Nasheed, élu en 2008 et renversé quatre ans plus tard par une mutinerie de l’armée et de la police. Les partisans de l’ex-président, eux, manifestent régulièrement à Malé pour sa libération.
- Mohamed Nasheed, un modéré à la tête d’un Etat contrasté
La victoire de Mohamed Nasheed lors des premières élections multipartites des Maldives, en 2008, semblait être le gage d’une transition démocratique réussie. Cet ancien journaliste, qui a étudié au Royaume-Uni et au Sri Lanka et passé de nombreuses années en prison pendant la dictature, était partisan d’un islam démocratique et modéré, soutenu par les jeunes et les habitants des îles des Maldives les plus peuplées. L’archipel, qui s’étend sur 90 000 km², a longtemps vécu coupé du monde occidental. Sur les îles habitées par des Maldiviens, la consommation d’alcool et de viande de porc est interdite, et les personnes coupables de relations hors mariage sont passibles de coups de fouet. Mais la loi islamique ne s’applique pas sur les dizaines d’îlots habritant des hôtels de luxe, construits dans les années 1970 à l’écart des îles habitées et qui attirent jusqu’à 1 million de touristes chaque année. Les voyageurs étrangers, longtemps tenus à l’écart de tout contact avec la population locale, n’ont pu commencer à la côtoyer qu’à partir de 2008, lorsque le président Nasheed a autorisé l’ouverture de chambres d’hôtes sur les îles habitées.
C’est aussi sous l’impulsion de Mohamed Nasheed que les Maldives ont émergé sur la scène internationale. Le président avait ainsi attiré l’attention sur son pays, l’un des plus menacés au monde par la montée du niveau de la mer, en invitant des journalistes étrangers dans la délégation officielle lors de la conférence sur le climat, à Copenhague, en 2009. Le documentaire tiré de cette expérience, The Island President, a ainsi permis au grand public de découvrir depuis l’intérieur les négociations climatiques. C’est également sous le mandat de Mohamed Nasheed que les Maldives ont rétabli leurs relations diplomatiques avec Israël et accueilli, en 2010, des négociations entre le gouvernement afghan et d’anciens talibans.
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