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Politique

Où est l'espoir après l'indiscutable succès de Sarkozy?

Le président de l'UMP, galvanisé par le succès des élections départementales, l'interprète comme un vote d'adhésion, annonciateur d'un changement en marche. Pas si sûr que ce lyrisme d'un soir soit fondé.
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Discours de Nicolas Sarkozy au soir du second tour des élections départementales
Discours de Nicolas Sarkozy au soir du second tour des élections départementales, dimanche 29 mars 2015.
WITT/SIPA

« L’espoir renait ce soir !» Ainsi Nicolas Sarkozy a-t-il claironné son enthousiasme à la suite de l’indiscutable succès remporté par l’UMP au second tour de ces élections départementales. Mais il s’est laissé griser par une déroute des gauches au point de donner à cette victoire une « dimension historique » qu’elle n’avait pas, et une adhésion prophétique dont elle était dépourvue. Car ce n’était pas un vote d’espoir, mais plutôt de colère et de désespoir… L’opposition, aujourd’hui, est toujours handicapée par son bilan sarkozyste et divisée entre des chefs qui se marquent et se démarquent. Cette force est encore plombée par les affaires et n’incarne pas l’alternative en marche, même si elle s’est redressée, en particulier grâce à la gauche ! Mais y a-t-il une seule proposition UMP qui ait suscité une adhésion massive ? Que nenni !

Commençons par la griserie qui a emporté le président de l’UMP puisque ce dernier, trop pressé d’intervenir au plus vite afin de donner le ton comme de récupérer la victoire, s’est laissé aller à prétendre : « jamais notre famille n’avait gagné autant de départements ». Sauf qu’en 1992 le RPR et l’UDF – l’équivalent aujourd’hui de l’UMP et de l’UDI- avaient remporté un tel triomphe électoral que la gauche ne détenait plus que 21 départements ! Comme Nicolas Sarkozy était déjà né en politique à cette époque, on ne peut pas croire qu’il ait ignoré cet épisode mais qu’il l’a gommé. Volontairement ? Involontairement ? Sans doute les vapeurs d’encens ont pu lui monter à la tête. Très certainement, après tant d’insuccès successifs, ce retour enfin victorieux pouvait le tournebouler, mais quelques instants seulement. L’ancien Président est entouré de trop d’experts électoraux pour qu’ils ne lui aient pas  indiqué qu’il s’écartait par trop de la vérité.

L'espérance aux abonnés absents

Mais s’il l’a ainsi tordue, exagérée plutôt, c’est qu’il tenait à faire de cette soirée le début solennel d’une histoire d’espérance encore aux abonnés absents. Car si l’on tente de regarder au plus près les comportements électoraux dans ce scrutin dont il faut quand même rappeler qu’il n’était pas de dimension nationale en théorie mais à vocation départementale, il faut d’abord rappeler que près d’un Français sur deux n’est pas allé voter. L’on doit ensuite ajouter qu’un tiers des votants se sont prononcés pour des représentants d’une formation peu implantée, dénoncée ensuite et pour cause, par la majorité des médias et des représentants des institutions républicaines, ce Front national qui combat l’UMP comme le PS. On voit donc aisément que les « sarko – enthousiastes » ne sont pas foules. Pour être complet, il est nécessaire de relever que nombre de candidats UMP ont été élus grâce…au front républicain dont la direction nationale, et Nicolas Sarkozy en particulier, ne voulaient pas. Les reports des électeurs de gauche sur la droite ont plutôt bien fonctionné pour faire barrage au FN ! La position démissionnaire du NINI ne pourra être tenue fort longtemps encore, notamment dans toutes ces régions où le parti de Marine Le Pen a taillé des croupières à l’UMP. Sur ces champs de bataille une partie des électeurs sarkozystes ont rejoint l’extrême-droite, mais l’autre la tient pour l’ennemi numéro 1. Là, on ne sent guère souffler l’espoir et l’emphase sarkozyste a paru pour beaucoup déplacée. Comme l’a dit Bruno le Maire : « pas de triomphalisme… ». Ce que relevaient d’autres élus UMP, tels Thierry Solère et Frank Riestler qui confiaient : « il faut savourer le succès mais ne surtout pas s’enflammer, car les Français sont dans la défiance plutôt que dans la confiance envers nous… » Le ballet précipité des chefs pour cadrer les résultats juste après 20H n’était pas de nature à réconcilier les Français fâchés avec cette opposition d’aujourd’hui et dont chaque apparition vient rappeler et raviver les déceptions provoquées par la majorité d’hier.

Le lyrisme, ça ne "tient pas sur du vide"

Nicolas Sarkozy…François Fillon…Alain Juppé portent chacun à leurs niveaux, (le maire de Bordeaux paradoxalement moins que les autres) les stigmates des renoncements et des échecs passés. Quand l’ancien Président et son ex-Premier ministre chantent « espoir », on entend « bobards » ; quand ces crooners sur le retour entonnent des promesses de rupture comme de changements profonds l’écho renvoie plus que du scepticisme, une incrédulité parfois stupéfaite et plus souvent rageuse. Il y a du dépit amoureux, un sentiment de cocufiage chez ces militants de droite qui détestent certes la gauche, mais ne sont pas prêts à se lancer les yeux fermés dans une aventure qui leur a laissé de mauvais souvenirs. Si Sarkozy et Cie avaient véritablement commencé de rétablir une confiance, s’ils avaient retrouvé du crédit, ils auraient en cette affaire électorale fait un triomphe face à des gauches déchirées, déconsidérées et en pleines divisions parce que sans vision claire. L’occasion était idéale pour infliger une dérouillée monstre aux socialistes, ils n’ont pris « qu’une fessée », et ils ne sont pas tout à fait à terre. Les régionales, certes, seront difficiles pour les socialistes. Mais à l’Élysée, on ne se vit pas du tout hors-jeu, il s’en faut. L’espoir n’a pas abandonné le cœur du pouvoir qui bat déjà au rythme de la présidentielle 2017. François Hollande et les hollandais restent persuadés non seulement qu’ils ont une bonne chance de l’emporter, mais que Sarkozy en a beaucoup de perdre, et d’abord parce qu’il serait « vidé, usé, sans capacité à incarner justement une nouvelle alternative, une autre espérance ». Si l’ex-président en parle tant, veulent croire les hollandais, « c’est parce qu’il doute de pouvoir jamais se réinventer. L’espoir qu’il invoque tant, c’est pour s’en persuader ». Le député maire UMP du Havre Édouard Philippe, proche d’Alain Juppé, note, lui : « je n’ai jamais eu de problème d’espoir. J’ai gagné les législatives puis les municipales et là nous avons emporté les départementales parce que nous avons su nous unir face à une gauche désunie et parce que nous avons présenté une alternative dans les faits. Le lyrisme, ça ne tient pas sur du vide… ». Tout est dit…

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