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Arcosanti, un ovni dans le désert

Dans l’Arizona se dresse une ville « idéale » imaginée par l’architecte italien Paolo Soleri dans les années 1970, qui attire 60 000 touristes par an.

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Publié le 19 mars 2015 à 13h51, modifié le 19 août 2019 à 13h06

Temps de Lecture 7 min.

Gary Elbert, le chauffeur du van, natif de Phoenix, et surtout guide chez Arizona Outback Adventure (AOA), qui nous conduit à Arcosanti, connaît la région comme sa poche de Levi’s. Pourtant, à 37 ans, même s’il en a déjà entendu parler, ses pas, et ses clients, ne l’ont jamais mené jusqu’à cette ville du futur imaginée par l’architecte italien Paolo Soleri au début des années 1970.

Il faut reconnaître que cette cité se mérite : à deux heures de Phoenix en allant vers le nord ou une heure et demie de Flagstaff en redescendant vers la capitale de l’Etat, il ne faut pas rater le chemin de terre, après l’autoroute I-17. Un gros quart d’heure de route poussiéreuse et rocailleuse, dans un décor à la Blade Runner, au milieu des cactus Saguaro, ces pittoresques candélabres du désert, nous mène enfin aux portes de cet improbable kibboutz en béton, en plein désert de l’Arizona.

Théoricien de l’arcologie

Le ton est donné dès l’arrivée au parking : pas de gros 4 x 4 ou de pick-up rutilant comme on en croise souvent dans cet Etat, mais des véhicules plutôt modestes, comme ce vieux combi Volkswagen sans âge qui a vraisemblablement connu Arcosanti encore jeune cité. Un panneau souhaite la bienvenue, et interroge : « Welcome to Arcosanti, an urban laboratory ? » Tout est dans le point d’interrogation…

Qu’est-ce vraiment qu’Arcosanti ? Une ville ? Un laboratoire urbain ? Un campus du développement durable ? Une communauté pour écologistes orthodoxes ? Une secte d’architecte ? Un lieu de contre-culture ? Dans les faits, c’est un peu tout cela à la fois. Au début des années 1950, Paolo Soleri s’est fait le théoricien de l’arcologie, concept combinant à la fois l’architecture et l’écologie. Décédé en 2013, l’architecte restait convaincu qu’il était possible de faire plus avec moins : créer une société plus efficace en gaspillant moins, en polluant moins, en utilisant moins d’énergie.

On est surpris, dès l’entrée, par une architecture cubique, mêlant béton brut et bois, que domine une énorme coupole largement vitrée. Certains cubes sont construits en porte-à-faux, avec de larges ouvertures circulaires s’inscrivant parfaitement au milieu de chaque face.

Musiciens en résidence

Surpris également par les « arconautes », ces pensionnaires que l’on croise : certains d’entre eux sont là depuis la création de la micro-cité, d’autres y viennent pour y passer cinq semaines, comme ces deux musiciens en résidence, ou cet architecte venu se documenter sur Soleri. On y voit des enfants – peu –, des chats nonchalants écrasés de chaleur, et des touristes. Ils sont moins nombreux qu’au Grand Canyon ou à Monument Valley, mais bon an, mal an, Arcosanti accueille chaque année près de 60 000 visiteurs.

Certains cubes sont construits en porte-à-faux, avec de larges ouvertures circulaires.

Initialement, la cité futuriste devait, selon les plans que l’on peut consulter à l’intérieur du bâtiment, accueillir 5 000 habitants. Dans les faits, seuls 5 % du projet initial ont finalement vu le jour, n’occupant in fine que 4 hectares sur les 860 hectares que compte le site. Ce ne sont pas les visiteurs qui contribuent majoritairement au financement d’Arcosanti.

Ceux qui y passent plusieurs jours ne grèvent pas trop leur budget : les Greenhouse Guestrooms ne coûtent qu’environ 30 dollars (28 euros) pour une personne et 50 dollars pour deux. A moins que vous décidiez de passer la nuit dans la très belle et très courue Skysuite à 100 dollars pour deux personnes, avec le petit déjeuner.

Des cloches et des touristes

Mais comment se finance donc la cité ? La réponse est dans la visite : après avoir admiré les immenses voûtes qui coiffent les espaces publics, l’amphithéâtre qui accueille de nombreux concerts, la piscine installée au milieu de cyprès, la salle de concert, la bibliothèque-salon de télévision, on arrive à… la fonderie de cloches.

Des cloches petites, moyennes, immenses, en bronze et en céramique et terre cuite, vendues essentiellement aux touristes, qui ont rapporté 1 million de dollars en 2013. Au fil des années, cette activité est devenue la principale source de revenus de la communauté. Une partie des recettes est consacrée au fonctionnement de la cité, une autre, non négligeable, contribue aussi au financement de plusieurs organisations (sur chaque vente de cloche, de 30 à 5 000 dollars, 16 dollars sont à chaque fois reversés à des associations comme Aids, l’Unicef, Greenpeace ou Care).

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Des cloches et des touristes pour faire vivre un laboratoire futuriste ? L’idée n’aurait pas déplu à Paolo Soleri. Elle a au moins le mérite de ne pas faire de cette cité une ville du passé.

Arcosanti vue par son architecte (en anglais)

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