« Arrêtez donc d’emmerder les Français ! »
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A Jacques Chirac qui lui soumettait décrets sur décrets, le Premier ministre Georges Pompidou avait répliqué, excédé : « Arrêtez donc d’emmerder les Français ! ». C’était en 1966, mais l’anecdote sert aujourd’hui encore à dénoncer l’excès de lois, l’inflation d’interdictions et la multiplication de précautions. Une tradition française ? Sans nul doute. Benjamin Constant critiquait déjà chez les législateurs « ce plaisir de se croire nécessaires ». Un travers transpartisan ? Assurément. Au fil de gouvernements toujours plus interventionnistes, le pays se retrouve régi par 10 500 lois (1 728 en Allemagne !), 127 000 décrets, 400 000 normes… Et les prochains mois ne manqueront pas d’apporter leur contribution à cette avalanche de réglementations puisque la puissance publique, devenue maître ès prohibition, entend se préoccuper de notre poids, nous sauvegarder de nos inconséquences au volant, nous éviter la pollution visuelle — bref, nous défendre de nous-même.
Cet usage immodéré de la loi est tout sauf anodin. D’abord, la profusion est l’ennemie de la qualité : l’objectif — condensé de morale publique émolliente et de surréactivité médiatique – prime trop souvent sur l’efficacité. Ensuite, cette folie normative et coercitive bride l’initiative, nie la responsabilité individuelle, étouffe la prise de risque, détourne de l’innovation. Enfin, et surtout, à trop s’immiscer dans notre quotidien, l’Etat soi-disant bienveillant finit par étouffer la liberté des citoyens, dépossédés de leur libre arbitre comme jamais. A droite comme à gauche, nos dirigeants ont fait le diagnostic qu’une demande toujours plus pressante de protection pouvait s’accommoder d’un étatisme aussi décomplexé qu’intrusif. Mais ils avaient parié sur une même acceptation passive d’un alourdissement des prélèvements au nom du maintien d’un modèle social en faillite. Le ras-le-bol fiscal est venu balayer bien des certitudes. A suivre, une révolte contre le paternalisme oppressant ?
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