Le 6 juin 2013, le Guardian amorce la plus grande série de révélations de l'histoire du renseignement américain en montrant, sur la base de documents d'Edward Snowden, comment la National Security Agency (NSA) collecte l'intégralité des métadonnées téléphoniques des abonnés Verizon, un des principaux opérateurs téléphoniques états-uniens. Depuis, la question de la légalité de ce programme agite le Congrès et la justice américaine.
Le quotidien USA Today a révélé, mardi 7 avril, que la Drug Enforcement Administration (DEA) – chargée aux Etats-Unis de la lutte contre la drogue – s'est en fait adonnée aux mêmes pratiques pendant plus de vingt ans. Les détails sur des milliards d'appels, passés par des Américains vers plus de cent pays, ont été collectés. Ces pays ont évolué au fil du temps, mais incluent le Canada, le Mexique et la plupart des pays d'Amérique centrale, selon USA Today, qui appuie ses informations sur « plus d'une dizaine » de sources haut placées.
Cette collecte massive de renseignements est décrite par le ministère de la justice dans un document inédit de 1998 comme « une des opérations les plus importantes et les plus efficaces de la lutte contre la drogue ». Mais les autorités américaines ont également utilisé ces informations pour l'enquête sur l'attentat d'Oklahoma City et de « nombreuses autres investigations », précise le quotidien américain.
Surveillance de masse avant la NSA
Cette pratique, qui consiste à intercepter de très grandes quantités de données à propos de simples citoyens pour y trouver, dans un second temps, des informations concernant d'éventuels suspects, a donc été mise en œuvre bien avant le 11 septembre 2001, une date qui était vue jusqu'à présent comme celle de la naissance de la surveillance de masse. La loi sur laquelle s'appuie la NSA pour collecter les données téléphoniques n'est autre que le Patriot Act, loi votée quelques semaines après les attentats. Selon un des anciens juristes de la NSA, Stewart Baker, le programme de la DEA a servi de modèle pour les programmes de surveillance de la NSA.
Comme la NSA dix ans plus tard, la DEA n'a pas intercepté le contenu des conversations des Américains mais simplement ce qu'on appelle des métadonnées : qui appelle qui, quand, où et combien de temps. Ce type de données, de l'aveu des services de renseignement eux-mêmes, se révèlent tout aussi utiles que le contenu des conversations. Ce programme, autorisé en 1992, faisait l'objet d'une « faible supervision indépendante », écrit encore USA Today, qui explique que seule une poignée de hauts fonctionnaires et de membres du Congrès ont été tenus au courant.
Un programme arrêté à l'automne 2013
Enfin, le quotidien explique que les agents de la DEA pouvaient utiliser ces données beaucoup plus librement que ne peut le faire actuellement la NSA. Ce programme a été arrêté, sur ordre du ministre de la justice, en septembre 2013, en plein cœur des révélations d'Edward Snowden, explique USA Today. Désormais, la DEA adresse des demandes ciblées aux opérateurs téléphoniques, parfois plusieurs milliers par jour.
Des informations parcellaires sur ce programme avaient déjà été publiées, notamment par le New York Times, à l'automne 2013. Mais c'est la première fois qu'autant de détails sont rendus publics.
Cette révélation survient alors que la date d'expiration du texte qui autorise le programme de collecte de données téléphoniques mis au jour en 2013 par les documents d'Edward Snowden approche. Le Congrès doit décider avant le 1er mai s'il autorise à nouveau le programme.
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