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Mars fut un jour propice à l'apparition de la vie

Vue générale sur Yellowknife Bay. (Crédits photo: NASA/JPL-Caltech)

VIDÉO - Curiosity a découvert les vestiges d'un lac d'eau douce contenant tous les ingrédients nécessaires à l'émergence de bactéries primitives.

On ne sait pas encore si Mars a abrité la vie, mais on est désormais certain que toutes les conditions furent un jour réunies pour que ce soit envisageable. «C'est une révolution scientifique», s'enthousiasme Sylvestre Maurice, planétologue à l'IRAP (CNRS - Université Toulouse 3). «La Terre n'est pas une exception. Il y a plus de 3 milliards d'années, une de nos plus proches voisines réunissait elle aussi tous les ingrédients pour voir la vie apparaître.» À savoir de l'eau douce liquide stagnante dans un milieu d'une grande diversité chimique et minéralogique.

Après un peu plus d'un an sur la planète rouge, le rover Curiosity de la Nasa a réuni toutes les preuves nécessaires pour rendre la nouvelle officielle. Tous les arguments ont été rassemblés dans 6 articles présentés au congrès de l'Union américaine de géophysique lundi et publiés dans la revue Science. Dans l'article principal, le directeur scientifique de la mission, John Grotzinger, établit la présence avérée d'un ancien lac dans une petite dépression de terrain baptisé «Yellowknife Bay», située à 500 mètres du lieu d'atterrissage de Curiosity, dans le cratère de Gale.

De la rivière au lac

Cette destination avait d'ailleurs été choisie car on y distinguait les vestiges apparents d'un écoulement d'eau. Quelques mois après son arrivée, Curiosity a confirmé la présence d'un ancien lit de rivière caractérisé par la présence de conglomérats de cailloux polis. Le rover avait alors effectué un forage de 6-7 cm de profondeur pour récupérer un peu de roche. Les analyses par les instruments SAM et CheMin ont montré que cette poudre grise-verdâtre (et non rouge comme à la surface) contenait des argiles. Ce qui prouve que la roche est un sédiment aqueux, constitué de particules qui se sont déposées en couches successives dans de l'eau.

Le laser ChemCam a aussi permis de détecter la présence de veines de gypse, un matériau qui se forme par la cristallisation du calcium dans les fissures de la roche lorsque de l'eau y circule longuement. À ces éléments, s'ajoutent la présence d'un dépôt sédimentaire de grains très fins, caractéristique d'une décantation lacustre.

« Tous les éléments chimiques nécessaires à l'apparition de la vie étaient présents »

Michel Cabane, planétologue.

«Ce faisceau de preuves nous permet d'affirmer avec certitude qu'il y avait bien un lac à cet endroit précis», conclut Nicolas Mangold, coauteur de l'article et géologue au LPG (université de Nantes - CNRS). «En revanche, il nous est encore impossible de déterminer précisément quand il a vu le jour, ni combien de temps il a existé.» Cet ancien lac pourrait s'être formé n'importe quand entre - 3,6 milliards d'années (date de formation du cratère Gale) et - 3 milliards d'années (moment où Mars n'avait plus l'atmosphère nécessaire pour abriter de l'eau liquide), et avoir perduré entre une centaine d'années et quelques dizaines de milliers d'années, voire plus.

Cela laisse-t-il assez de temps pour que la vie apparaisse? «Nous n'en avons aucune idée» , reconnaît Michel Cabane, co-responsable de l'instrument SAM et planétologue au LATMOS (université Pierre et Marie Curie - CNRS). «Mais nous savons que tous les éléments chimiques nécessaires, carbone, hydrogène, oxygène, phosphate, soufre, étaient présents et que le pH de l'eau était relativement neutre.» On y trouvait aussi des minéraux, notamment soufrés, sous des formes d'oxydation variables qui auraient pu servir de sources d'énergie à des bactéries primitives.

Le Mont Sharp vu depuis Yellowknife Bay.

Pour autant, Curiosity n'a encore trouvé aucun vestige de chimie organique complexe, un prérequis indispensable à l'apparition de la vie. «Trouver des briques élémentaires de cette chimie est la prochaine étape», souligne Michel Cabane. «Nous rencontrons toutefois un problème: il y a du perchlorate partout. Cette molécule détruit les molécules organiques dès qu'on les chauffe ensemble. C'est malheureusement ce qui se passe dans le petit four d'analyse de Curiosity.» Les scientifiques remarquent néanmoins des différences très nettes entre des sables inertes prélevés en chemin et ces roches sédimentaires potentiellement riches de matière organique. «Nous avons encore beaucoup de mal à interpréter ces résultats», tempère Michel Cabane. «Cela ne veut rien dire pour le moment.»

En montrant que Mars fut propice à la vie dans le passé, Curiosity a déjà rempli sa mission principale. Le rover se dirige maintenant vers les pentes du Mont Sharp. Les géologues attendent beaucoup de cette prochaine étape pour affiner leur compréhension de la planète rouge. Ils espèrent notamment observer des stratifications de roches leur permettant d'effectuer des datations plus précises des événements géologiques. Avec un peu de chance, il pourrait même y avoir une continuité des couches géologiques avec Yellowknife Bay. L'âge du premier lac martien pourrait alors être déterminé de manière plus précise.


La passé présumé de Mars reconstitué

Dans un court film d'animation, la Nasa a retracé début novembre l'évolution présumée de la planète Mars depuis sa formation jusqu'à à nos jours. Les auteurs de ces images de synthèse n'ont pas placé de repères chronologiques, mais on voit que la planète était probablement recouverte d'eau il y a 4 milliards d'années avant de s'assècher peu à peu pour prendre la teinte orangée qu'on lui connait aujourd'hui, témoin de son atmosphère très oxydante.

Mars fut un jour propice à l'apparition de la vie

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134 commentaires
  • papenoir

    le

    Joyeuses fêtes à Minitokki et Tom, et les autres amis athées, et joyeux Noël aux amis chrétiens. Je dois courir. Que la cause première soit avec vous.

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