La famille Le Pen pirate les antennes de TF1 et France 2

Par Samuel Gontier

Publié le 10 avril 2015 à 19h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 05h35

Sil n’est pas certain que le FN soit le premier parti de France, il ne fait aucun doute que les Le Pen sont la première famille de France. En deux jours, mercredi et jeudi, la smala a cumulé quarante minutes de présence dans les 20 heures de TF1 et France 2. On en viendrait presque à regretter que les cyberterroristes n’aient pas éteint ces chaînes plutôt que TV5 Monde, peu regardée par les électeurs français.

J’espérais qu’après avoir été l’unique sujet de la campagne des élections départementales, le Front allait retomber dans le ventre mou de l’actualité. Raté. Impossible d’y échapper, jusqu’à France 3 qui somme ses téléspectateurs de choisir entre le père et la fille : « A votre avis, le Front national doit-il exclure Jean-Marie Le Pen du FN ? » Notez la forte proportion d’internautes au sens civique particulièrement développé qui ont préféré cliquer sur « Ne se prononce pas » plutôt que s’abstenir.

La première chaîne a choisi un micro-trottoir à Fréjus, dans le Var, la seconde a opté pour un micro-trottoir à Cavaillon, dans le Vaucluse. Le bilan de TF1 : « Les propos de Jean-Marie Le Pen ne trouvent aucun écho auprès des électeurs du FN. » Le bilan de France 2 : « Pour la plupart des sympathisants, les références à la Shoah ou à Vichy sont des limites à ne pas franchir. » Du coup, le fondateur du parti jouirait auprès des électeurs du FN du même crédit qu’un copilote dépressif auprès des passagers de la Germanwings. « Jean-Marie Le Pen serait devenu un personnage embarrassant, c’est du moins ce que pensent ses électeurs. » C’est du moins ce que dit l’envoyée spéciale.

Tenez, TF1 a même recueilli l’émouvant témoignage d’un authentique « compagnon de route de Jean-Marie Le Pen, directeur de sa campagne électorale en 2010 » : même lui « se range derrière la ligne officielle du parti ». Malgré son « affection » pour le daron, « il y a des décisions qui s’imposent ». Pour le reporter, pas moyen d’échapper à « une rupture bien réelle cette fois » car « les militants y voient eux une décision salutaire pour l’avenir du parti ». Puisqu’on vous le dit.

« Pour bien comprendre, demande David Pujadas, est-ce l’opposition de deux lignes politiques ou de deux tempéraments ? » De deux lignes politiques, répond l'analyse, car père et filles ont de profondes « divergences » sur « la stratégie », « les idées », d’où « un vrai problème politique ». Pour être certain de bien comprendre, le présentateur pose une nouvelle fois la question à Nathalie Saint-Cricq. « Marine Le Pen est-elle sincère ? Est-ce qu’il y a une vraie divergence ? » « Oui », répond l’analyste, prouvant la cohérence de la ligne éditoriale de France 2. « C'est un avantage ou un handicap, cette rupture ? » « C’est un avantage. C’est un mal pour un bien, c’est du moins ce que Marine Le Pen considère. » C’est du moins ce qui se dit à la télé, sur les chaînes qui n’ont pas été piratées.

Ma vie au poste, le blog de Samuel Gontier
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