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Libération
Décryptage

Vin : l'AOC un peu bouchonnée

L’Inao, l'institut chargé de l’attribution du label, fête ses 80 ans ce 16 avril. Mais l'AOC est remise en cause, notamment par nombre de viticulteurs.
Pour beaucoup de viticulteurs, l'AOC n'est plus forcément gage de qualité. (Photo Jeff Pachoud. AFP)
publié le 16 avril 2015 à 19h10

En 2013, plus des deux tiers du volume total de vin produit en France était labellisé appellation d'origine contrôlée (AOC) ou indication géographique protégée (IGP). Cette part, en baisse par rapport à l'année précédente, contraste avec celle des vins sans indications géographiques, qui a augmenté de 17% sur la même période. En cause notamment, le mécontentement d'un nombre toujours plus important de producteurs qui ne se reconnaissent plus dans la dénomination actuelle des AOC, la jugeant trop laxiste et pas en phase avec les préoccupations environnementales.

Pour Marie-France Garcia, chercheuse à l'Inra (Institut national de recherche agronomique), «l'AOC doit représenter un gage de tradition et de savoir-faire dans la fabrication viticole. Mais beaucoup de producteurs estiment maintenant que la production intensive et l'utilisation de pesticides dans de nombreux vignobles AOC sont contraires à cette représentation». Le constat n'est pas récent. En 2006, l'Etat décidait de remettre à plat le système AOC. S'ensuit la création d'associations de producteurs comme Sève et Renaissance des appellations pour accompagner le processus, et un vote à l'Assemblée en juin de la même année. Mais la montagne accouche d'une souris et aujourd'hui les problèmes demeurent.

Note : pour la compréhension du graphique, nous avons décidé de ne pas y inclure la Bourgogne. La différence entre les AOC vins et les autres est tellement importante dans cette région (833 contre 14) qu'elle aplanit les autres.

Marc Parcé, président de l'association Sève, explique : «Les contrôles se font sur la dégustation du vin, ce qui est une aberration. Les conditions de fabrication sont occultées et leurs conséquences sur les paysages et l'environnement également.» Paradoxalement, pour l'ancien viticulteur du Roussillon, les appellations restent toujours le meilleur moyen pour lutter contre la mondialisation à l'échelle paysanne, et ce malgré un système perverti par le manque d'exigence et le corporatisme. «Certains vins n'ont plus aucun lien au terroir et ne sont que des ersatz d'appellations. On ne parvient plus à distinguer ceux qui font un travail de qualité de ceux qui ne respectent pas les exigences. L'appellation AOC n'est plus suffisante pour assurer la qualité aux consommateurs

Amers, les défenseurs d'une réforme en profondeur du système des AOC ne peuvent que constater leur échec, confrontés à une fin de non-recevoir de la part de l'Inao ou du ministère de l'Agriculture. Marc Parcé ne se rendra donc pas à Avignon ce 16 avril au colloque des 80 ans de l'appellation, car pour lui on y assistera plus à «un enterrement qu'à autre chose».

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