L’État puise dans la cagnotte des universités : le Nord - Pas-de-Calais très touché


Reste que la région est plus touchée que d’autres, puisque la somme collectée y est la plus importante (35 %). Avec même un record (!) : 24 millions sur les 100 pour Arras (devant l’université de Lille II : 8,7 millions).
Au siège de l’université d’Artois, répartie également sur des pôles à Douai, Béthune, Lens et Liévin, c’est la soupe à la grimace. Même si Francis Marcoin, président depuis 2012, garde son sens de l’humour. « Je n’ai jamais répondu à autant de journalistes parisiens. C’est la rançon de la gloire ! »
La jeune université de proximité, créée dans les années 1990, s’attendait à voir son budget (d’environ 100 millions) ponctionné. « On prévoyait entre 16 et 18 millions. Là, on nous en rajoute presque 10 ! La somme est impressionnante. Nous ne sommes pas le territoire le plus riche. Il y a comme un gros sentiment d’injustice. » Avec 46 %, l’université d’Artois est la deuxième fac de France au plus fort taux de boursiers. « On va surveiller nos budgets. Mais je vous rassure, on ne descendra pas dans la rue pour manifester ! Nous n’allons pas abandonner nos projets, comme celui d’une maison de l’étudiant à Liévin. » Ou encore la cité U modulaire à Arras (une première dans la région), qui pousse à la vitesse de la lumière. Sachant qu’avec cette mesure, le ministère dit vouloir encourager justement une « culture de l’investissement » dans l’enseignement supérieur.
« Cela va avoir des effets sur les investissements »
« C’est un coup de force symbolique, tempête de son côté Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille, assez terrible sur le plan pédagogique », qui montre également un État financièrement aux abois… S’il ne conteste pas les économies de son école, il les justifie par « le relogement à venir », avec la nécessité de participer à son financement. Au passage, il rappelle que Sciences Po Lille (ponctionné à hauteur de 500 000 €) est « l’établissement le moins bien doté par l’État toutes catégories confondues ». Il refuse aussi que cette ponction serve à financer « des établissements bien dotés mais pas bien gérés ». Une pratique effectivement condamnable. Au final, et plus globalement, Pierre Mathiot voit aussi dans cette action « une remise en cause du principe d’autonomie des universités » et le fait que « l’enseignement et la recherche ne soient pas une priorité aujourd’hui ». Emmanuel Duflos, directeur de l’École centrale de Lille (2,133 millions réclamés), craint pour l’avenir : « Cela va avoir des effets sur les investissements futurs, quoi qu’on en dise », déplorant d’être pénalisé après avoir mené une stratégie pour justement compenser… une sous-dotation récurrente. Une amertume avec la crainte, pour certains responsables, que l’opération se réédite dans les années à venir.
Au total, en France, 11 des 76 universités, 25 des 36 écoles d’ingénieurs et une dizaine de grands établissements sont mis à contribution.