AboManille veut croire au miracle pour Mary Jane
Les Philippins bénissent Jakarta d'avoir suspendu mardi l'exécution de la jeune femme, condamnée pour trafic de drogue. Pour le pays, elle est la victime incarnée de la traite des pauvres.

«Continuons à prier pour sauver la vie de Mary Jane.» C'est le mot d'ordre qu'a donné à tous ses concitoyens le vice-président philippin, Jejomar Binay, après l'annonce que Mary Jane Veloso, condamnée pour trafic de drogue, n'avait pas été exécutée en Indonésie dans la nuit de mardi à mercredi, contrairement à huit autres condamnés à mort. Sa famille, ses proches et tous les médias de ce pays où vibre la foi catholique ont unanimement crié au «miracle». «C'est comme une résurrection. Elle est vivante», confiait mercredi à l'Agence France Presse le prêtre Harold Toledano, conseiller spirituel de la famille.
L'Indonésie a précisé qu'il s'agissait d'une suspension de l'exécution, le temps d'enquêter sur de nouveaux éléments transmis in extremis par la justice philippine. Mais à Manille et dans le reste de l'archipel, on veut croire au triomphe de la justice pour cette jeune femme de 30 ans, mère de deux enfants de 6 et 12 ans.
Si l'affaire suscite une telle émotion dans le pays, c'est aussi parce que Mary Jane Veloso incarne les souffrances qu'endurent des millions de Philippins pauvres contraints à l'exil pour travailler dans des conditions d'exploités. Née de parents éboueurs, mère élevant seule ses deux garçons, Mary Jane Veloso était partie travailler à Dubai en 2009 comme domestique, chez un employeur qui avait fini par tenter de la violer, selon le récit de sa famille. Revenue au pays, elle était en quête d'un nouveau travail lorsqu'elle s'est fait piéger par des recruteurs, affirment ses proches.
En 2010, la jeune femme, alors âgée de 25 ans, avait été arrêtée à l'aéroport de Yogyakarta, à Java, en possession d'une valise contenant 2,6 kilos d'héroïne. Selon sa version, la drogue avait été placée à son insu dans une valise «bizarrement lourde» que lui avaient fournie des gens qui, croyait-elle, l'aidaient à trouver un travail en Malaisie. Son itinéraire pour s'y rendre, selon le plan établi par ses recruteurs, passait par l'Indonésie.
Il y a quelques jours, alors que l'échéance de l'exécution approchait, la justice philippine a ouvert une enquête sur les recruteurs présumés de la jeune femme, accusés de «trafic d'être humain». L'un des membres de ce trio, tout en clamant son innocence, s'est rendu à la police.
Le gouvernement philippin s'est engagé dans le dossier, demandant par quatre fois la révision de l'affaire. Si Jakarta est enfin entré en matière, c'est parce qu'«il y a des éléments pour démontrer que Mary Jane a été victime de traite et qu'elle est un témoin d'une affaire de trafic de drogue», a expliqué mercredi un porte-parole du gouvernement philippin. «Son témoignage contre les trafiquants va servir nos deux pays», a aussi souligné le président Benigno Aquino, en réponse aux arguments indonésiens quant à la nécessité de lutter par tous les moyens, y compris la peine de mort, contre le trafic de drogue.
Manille compte sur l'enquête en cours, mais aussi sur une prochaine rencontre avec le président indonésien Joko Widodo lors d'un sommet asiatique, pour transformer durablement le «miracle» de mardi soir.
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