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En Autriche, le nouveau ministre des affaires étrangères a 27 ans

Sociaux-démocrates et chrétiens-démocrates se sont mis d'accord sur une « grande coalition » rajeunie, à l'image de Sebastian Kurz, qui devient le plus jeune ministre de la Deuxième république.

Par  (Vienne, correspondante)

Publié le 13 décembre 2013 à 18h17, modifié le 14 décembre 2013 à 15h55

Temps de Lecture 4 min.

Le nouveau ministre des affaires étrangères autrichien, Sebastian Kurz, est un néophyte âgé de 27 ans.

Tout ça pour ça : après huit semaines de laborieuses négociations, sociaux-démocrates et chrétiens-démocrates autrichiens se sont mis d'accord, jeudi 12 décembre, sur une « grande coalition » qui traduit davantage un compromis frileux entre des partis effrayés par la montée de l'extrême droite, qu'une énergique volonté de réformes pour préparer l'Autriche aux changements du XXIe siècle.

Les nouveautés marquantes du nouveau gouvernement, le treizième de ce type qu'aura connu l'Autriche depuis 1945, sont la création d'un ministère de la famille, confié à une analyste de la communication politique, et la suppression de celui de la recherche scientifique, désormais subordonné au ministre de l'économie. Mais aussi la nomination au poste des affaires étrangères — rebaptisé « ministère de l'intégration et des questions internationales » — d'un néophyte âgé de 27 ans, Sebastian Kurz, qui devient ainsi le plus jeune ministre de la Deuxième république.

L'avenant M. Kurz, qui a interrompu ses études supérieures pour diriger l'organisation de jeunesse de l'ÖVP, la droite chrétienne-démocrate, s'était vu confier en 2012 la charge, créée pour lui, de secrétaire d'état à l'intégration des immigrés. Son parcours sans faute à ce poste sensible, le soutien enthousiaste de la presse tabloïd et son agilité à manier les nouveaux médias, lui valent d'être promu à la tête de la diplomatie autrichienne.

L'un des buts de cette spectaculaire cure de jouvence du personnel gouvernemental est sans doute de nuire au fringant leader de l'extrême droite, Heinz-Christian Strache. Son parti, le FPÖ, aujourd'hui allié au Front national de Marine Le Pen, figurait en première position dans les sondages menés fin novembre, avec 26 % à 28 % des intentions de vote — deux mois et demi seulement après les élections législatives, où il est arrivé troisième (21,5 % des voix).

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Dans l'attelage qui va gouverner l'Autriche pendant les cinq années à venir, le chrétien-démocrate Michaël Spindelegger, chef du Parti du peuple ÖVP, conserve le poste de vice-chancelier et prend celui des finances – qui donne une meilleure visibilité au sein de l'Union européenne – après avoir été, depuis fin 2008, à la tête des affaires étrangères. Le chef du Parti social-démocrate SPÖ, Werner Faymann, reste chancelier.

UN COMPROMIS FRILEUX

Le président autrichien Heinz Fischer reçoit les chefs du parti social-démocrate autrichien SPO et le chancelier Werner Faymann, le 13 décembre 2013.

Ils ont beau affirmer que cette coalition représente la somme du « meilleur des deux », la plupart des commentateurs autrichiens constatent que les velléités réformatrices des deux grands partis se sont surtout annulées mutuellement : le SPÖ n'a pas obtenu d'impôt sur la fortune et sur les successions, ni une refonte du système scolaire, de manière à atténuer la sélection sociale qui s'opère actuellement dès l'âge de dix ans. Tandis que l'ÖVP, qui voulait privatiser vigoureusement et s'attaquer au système de retraites, miné par une démographie trop faible, a dû se contenter de maigres résultats : l'âge de départ effectif de la vie active est censé passer de 58,4 ans, actuellement, à 60,1 ans en 2018. La holding ÖIAG, qui gère les participations de l'Etat dans les grandes entreprises telles que la poste, les chemins de fer ou l'énergie pétrolière et gazière, sera quant à elle aménagée pour permettre la vente de participations jusqu'à la minorité de blocage.

La nouvelle ministre de la famille, Sophie Karmasin, issue du sérail des instituts de sondage (son grand-père fonda Gallup à Vienne) et proposée par l'ÖVP, devra piloter une politique plus souple d'attribution des aides familiales, afin d'adapter progressivement l'Autriche, très attachée à l'idéal de la mère au foyer, à la réalité du travail féminin. Sa nomination, qui constitue une surprise — jeudi soir, elle était attendue dans le studio de la télévision publique en qualité d'analyste, et non de membre du gouvernement — a cependant été éclipsée par le camouflet infligé au ministre de la recherche et de l'enseignement supérieur, Karlheinz Töchterle, un brillant helléniste dont l'indépendance d'esprit a souvent déplu à ses amis conservateurs.

Dès qu'on a su qu'il était rétrogradé et soumis à la logique des intérêts économiques, un concert de protestations s'est élevé des rangs de l'opposition écologiste et libérale, comme parmi les chercheurs et les universitaires : « C'est un signal désastreux, qui ne peut susciter que l'incompréhension au niveau international », a déclaré au quotidien Der Standard Heinrich Schmidinger, président de la conférence des recteurs d'université, laquelle appelle le président de la République, Heinz Fischer, à refuser d'introniser un gouvernement dépourvu de ministre de la recherche.

De tels accents n'avaient plus été entendus en Autriche depuis l'époque où le conservateur Wolfgang Schüssel avait fait entrer au gouvernement le parti d'extrême droite FPÖ, début 2000. Le président Thomas Klestil, un conservateur qui désapprouvait ce choix, avait refusé par principe trois des ministres FPÖ venus prêter serment. Mais il est très peu probable que M. Fischer, récemment critiqué pour avoir préféré rendre hommage au défunt chancelier allemand Willy Brandt, à Lübeck, plutôt que de se rendre en Afrique du Sud aux obsèques de Nelson Mandela, fasse un coup d'éclat.

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