Si François Hollande débarque à Cuba, lundi 11 mai, ce n’est bien sûr pas pour y mettre à bas le régime castriste. Même pas pour y émettre une quelconque protestation quant au sort réservé aux dissidents. Dans l’une des dernières dictatures communistes de la planète, où 9 000 opposants ont été interpellés en 2014 et où l’activité des journalistes et artistes indépendants les conduit à coup sûr dans une cellule de prison, le chef de l’Etat n’a prévu aucune expression publique sur la question des droits de l’homme. Tout au plus devrait-il évoquer celle-ci dans son tête-à-tête avec le président cubain, Raul Castro. Sans que personne puisse donc vérifier dans quelle mesure et en quels termes il l’a fait.
Hollande-Castro, « une première »

Il ne s’agit évidemment pas non plus, pour le premier président français à effectuer ce voyage hautement symbolique, de magnifier « l’expérience cubaine » telle que l’a idéalisée la gauche française tout au long d’un demi-siècle d’illusions. Mais bien de s’engouffrer dans l’ouverture économique qu’esquisse le frère et successeur de Fidel Castro. Ironie de l’histoire : si Hollande le socialiste s’y opposera aux Yankees, ce ne sera plus pour contester leur modèle économique, mais bien afin de leur disputer de futurs marchés. Voilà pourquoi l’ancien premier secrétaire du PS, à celui du Parti communiste de Cuba, parlera de BTP plutôt que de libertés, de biotechnologies davantage que de démocratie, et de télécommunications plus que d’émancipation.
Hollande-Castro, « une première », vante à l’envi l’équipe du chef de l’Etat. Comme l’a été, quelques jours plus tôt, la visite du président au Conseil de coopération du Golfe (CCG), où il fut le premier chef d’Etat occidental invité, en Arabie saoudite, l’un des pays où l’on exécute le plus dans le monde, mais auquel l’on s’apprête à exporter pour plusieurs dizaines de milliards de dollars de produits made in France. Ainsi va la diplomatie hollandiste, qui sans le moindre complexe arpente le vaste monde afin d’y engranger les contrats. Sans piper mot des libertés fondamentales, dès lors que le business l’exige. Du golfe Arabo-Persique à la mer des Caraïbes, même combat ?
revaultdallonnes@lemonde.fr
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