L'endettement des ménages et des entreprises continue de grimper
La dette du secteur privé augmente en France alors qu'elle baisse en Europe.
Si l'accent est mis quasi quotidiennement sur l'endettement de l'Etat, qui ne cesse de s'alourdir année après année, un phénomène analogue est en cours chez les entreprises et les ménages. La dette privée représentait au total 122 % du PIB à la fin de l'année dernière, contre 96 % pour la dette publique.La semaine dernière, la Banque de France remarquait que « le ratio de dette du secteur privé non financier diminue dans tous les pays européens, en particulier en Allemagne et en Espagne, sauf en France, où il affiche une hausse modérée » au quatrième trimestre 2014. Il n'y a pas de gonflement rapide de la dette des entreprises et des ménages en France, qui reste à des niveaux soutenables, mais son augmentation continue interroge.
Du côté des ménages, d'abord, la dette représentait 46 % du PIB début 2008, c'est-à-dire avant la crise. Fin 2014, ce chiffre était de 55 %. « Nous assistons à une reprise du crédit aux ménages dans l'Hexagone, qui s'explique principalement par le marché de l'immobilier », explique Xavier Timbeau, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Les taux d'intérêt sont bas en raison de la politique monétaire ultraexpansionniste de la Banque centrale européenne. Et, « les prix de l'immobilier baissent peu en France. Il n'y a pas eu d'explosion de la bulle immobilière comme en Espagne », ajoute l'économiste.
Le mouvement est le même en ce qui concerne la dette des entreprises. Celle-ci est passée de 54 % du PIB en 2008 à 66,5 % à la fin de l'année dernière tandis que, chez nos voisins, le système productif se désendette. « Le taux de marge des entreprises françaises est moins important que chez nos partenaires de la zone euro. Conséquence, le taux d'autofinancement est faible et les entreprises ont donc recours au crédit bancaire pour financer l'activité et les investissements », décrypte Sylvain Broyer de Natixis. La France n'a pas connu de réel arrêt du crédit après la faillite de Lehman Brothers, contrairement à ce qui s'est passé pour les pays du sud de l'Europe.
Les taux bas jouent un rôle amortisseur
Le secteur bancaire hexagonal est resté plutôt en bonne santé. Heureusement car le taux d'autofinancement des entreprises, compris entre 90 % et 100 % à la fin des années 1990 et au début des années 2000, n'est plus que de 75 %. Les prêts accordés par le système bancaire ont permis aux investissements de ne pas s'effondrer, mais, malheureusement, cela n'a pas été suffisant pour les faire grimper. Ainsi, pour Denis Ferrand, directeur général de COE-Rexecode, « la hausse du taux d'endettement des entreprises françaises traduit d'abord la médiocrité de leurs résultats. Comme cette progression de la dette ne correspond pas à un bond des investissements, il s'agit d'un problème à terme pour l'économie française ». Pour l'instant, les taux bas jouent un rôle amortisseur; alors que les entreprises avaient versé 114 milliards d'euros de frais financiers en 2008, ce montant n'était plus que de... 52 milliards en 2014. Mais le système productif français n'en est que plus vulnérable à une hausse des taux.
Guillaume de Calignon