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Islam: dur, dur d'être un imam en France

La plupart des mosquées essaient de s'organiser avec les moyens du bord, c’est-à-dire en trouvant parmi les fidèles quelqu'un qui puisse assurer le prêche", raconte Enis Chabchoub, imam à Noisy-le-Grand. (Photo d'illustration)

La plupart des mosquées essaient de s'organiser avec les moyens du bord, c’est-à-dire en trouvant parmi les fidèles quelqu'un qui puisse assurer le prêche", raconte Enis Chabchoub, imam à Noisy-le-Grand. (Photo d'illustration) - Eric Fefferberg - AFP

RMC, partenaire du numéro spécial de Marianne sur l'islamisme publié ce jeudi, a rencontré deux imams qui racontent leurs difficultés à concilier religion et vie professionnelle. Le Premier ministre Manuel Valls veut d'ailleurs améliorer leur formation. Pas si simple.

RMC est partenaire de Marianne cette semaine, pour son numéro spécial sur l'islamisme en kiosque ce jeudi. Et une des façons de lutter contre la montée de l'islamisme en France justement, c'est de renforcer la formation des imams, qui peuvent être des remparts face aux discours radicaux. Après les attentats de janvier en France, le Premier ministre Manuel Valls a fait de la formation des imams un sujet majeur. Ils sont près de 2.000 aujourd'hui: des imams reconnus et répartis sur les 2.150 lieux de cultes de l'Hexagone.

Aujourd'hui, beaucoup sont bénévoles. Des imams qui ont donc un emploi en dehors de la mosquée, et qui prennent de leur temps pour prêcher et enseigner l'islam auprès des fidèles.

"On ne peut pas se permettre de laisser le bateau vide"

C'est le cas d'Enis Chabchoub, imam à Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis et consultant informatique. Si sa profession lui prend beaucoup de temps, il n'est pour lui pas question d'abandonner sa mission d'imam. "On ne peut pas se permettre de laisser le bateau vide, et de laisser un orateur dire des choses qui ne seraient pas conformes à l'héritage de l'islam, dit-il sur RMC. La plupart des mosquées essaient de s'organiser avec les moyens du bord, c’est-à-dire en trouvant parmi les fidèles quelqu'un qui puisse assurer le prêche. Parce que si on laisse un no man's land, un grand vide, c'est justement la porte ouverte à tous les extrêmes".

RMC a également rencontré Sofiane Serir. Il travaille dans une agence de voyage. Vendre des voyages, c’est son métier, mais son téléphone portable qu'il garde toujours à proximité de lui, ne lui laisse pas beaucoup de répit. Chaque jour, il reçoit des dizaines de coup de fil de fidèles. "C'est pour des questions diverses concernant la religion", raconte Sofiane Serir. "C'est n'importe quand, à n'importe quel moment. Ça arrive que des gens appellent à minuit", sourit-il.

"Parfois on joue aussi le rôle de psychologue"

Son rôle d’imam depuis 10 ans, Sofiane Serir le voit comme une mission. Une mission qui attire peu de jeunes musulmans, refroidis par la lourdeur de la tâche. "Parfois on joue aussi le rôle de psychologue, on essaie de rassurer les gens. Ce n'est pas facile du tout, c'est pourquoi il ne faut pas que l'imam se limite à la formation religieuse. Il doit avoir une bonne culture générale", prévient Sofiane Serir.

Si la mission est compliquée, l’imam d’Aulnay-sous-Bois, en Seine-St-Denis, tient bon. "Parce qu'on ne veut pas que d'autres personnes prennent la place et orientent les gens vers un islam dans lequel on ne se reconnaît pas. L'islam ne peut pas être dangereux et radical, ce sont les gens qui donnent à l'islam une interprétation dangereuse et radicale".

Aujourd'hui, il n'existe en France que trois instituts où les imams peuvent se former. Insuffisant, estime de nombreux responsables musulmans.

Philippe Gril avec Céline Martelet