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Hôpital : un patient sur dix victime d'un «événement indésirable» lors des soins

Erreurs médicamenteuses, mauvaises manip au bloc opératoire, risque d’infection... La Haute autorité de santé dresse un état des lieux et veut sensibiliser les professionnels de santé.
L’Argentine a approuvé en mai 2012 la Loi des Droits du Patient qui dispose toute personne du droit à «une mort digne». (Photo Jean-Sébastien Evrard.AFP)
publié le 27 mai 2015 à 10h01

C'est un pourcentage qui reste incroyablement élevé. Et inquiétant. «Un patient hospitalisé sur 10 souffre d'un événement indésirable lors de ses soins», a expliqué ce matin la Haute autorité de santé (HAS), en rendant compte d'une série d'études et de recommandations. Et contrairement aux idées reçues, «l'erreur individuelle du professionnel n'est pas la cause principale de tels événements». D'abord, une définition : un événement indésirable renvoie à «des événements liés aux soins et non à la maladie du patient, qui auraient pu ou ont entraîné un préjudice pour le patient». Erreurs médicamenteuses, erreurs au bloc opératoire, infections nosocomiales... Il y a aujourd'hui peu d'études sur cette question.

La HAS a travaillé sur 47 276 événements porteurs de risque (EPR), tous déclarés par les médecins accrédités et validés par des organismes officiels, puis elle a analysé les causes. Ces «événements porteurs de risque» auraient pu porter préjudice au patient mais ils ont été évités par les soignants, des barrières de sécurité ayant fonctionné. Exemple : une erreur de médicament rattrapée avant son administration, une erreur de dossier patient récupérée avant une intervention, un défaut de transmission d'une information qui retarde la mise en route d'un traitement... «Partir de ces "presque accidents" permet d'identifier les solutions qui ont fonctionné et qu'il faut développer dans les services/équipes similaires.»

Premier constat : «Dans un cas sur trois, c'est le travail en équipe, donc la communication (entre professionnels et vers le patient), qui en est la cause», note la HAS. Puis, dans 23% des cas, ces incidents sont liés aux tâches à accomplir, et enfin seulement 15% sont liés au patient lui-même.

Face à l'ampleur du phénomène, la HAS est décidée à mobiliser les professionnels de santé. «Il faut mettre la question du travail en équipe au centre des préoccupations.» Elle a mis au point des programmes et des outils. Entre autres, encourager le recueil et l'analyse des événements indésirables par les équipes de soignants. «Le pire n'est pas seulement dans la suvenue d'un événement indésirable, mais aussi dans le fait de ne pas en tirer des enseignements.» C'est ce que l'on appelle le retour d'expérience, une démarche habituelle dans les secteurs à risque tels que l'aviation ou le nucléaire. Or sur ce point, le secteur de la santé est en retard, car il s'appuie encore trop sur «un retour d'expérience tacite, limité à un cercle spécialisé et moins sur des retours d'expériences structurés et pluri-professionnels». Et cette conclusion : «Ce retard porte atteinte à la sécurité du patient : les erreurs non recueillies et non analysées ne sont pas corrigées de façon adéquate et risquent de se reproduire régulièrement.»

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