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Un témoignage accablant contre la ferme des 1 000 vaches

Le site «Reporterre» a recueilli les confidences d'un salarié récemment licencié de cette ferme-usine.
par Elsa Maudet
publié le 8 juin 2015 à 17h31

Le projet faisait hurler bien avant que le moindre bovin ne pointe le bout de ses pis. La ferme dite des 1 000 vaches cristallise craintes et colère des riverains et agriculteurs depuis deux ans, et sa mise en route semble à la hauteur de ses tristes promesses. Le site Reporterre a recueilli le témoignage d'un ancien employé de cette ferme-usine installée depuis le mois de septembre à Drucat, dans la Somme. «Ils m'ont traité comme un chien et ils maltraitent les vaches. C'est pour cela qu'aujourd'hui je parle», explique cet homme récemment licencié.

On la surnomme ferme des 1 000 vaches car l'objectif, à terme, est d'accueillir un millier de bovins. Mais l'exploitation n'a, dans un premier temps, obtenu l'autorisation que pour 500 bêtes. Pourtant, assure le témoin, «cela fait longtemps qu'il y en a plus, on en est à 723 maintenant. Je le sais parce que c'est écrit sur le roto [l'appareil de traite, ndlr] en fin de traite». Interrogé par Reporterre, Michel Ramery, l'entrepreneur du BTP qui finance cette étable géante et son – potentiellement très lucratif – méthaniseur, assure dans un premier temps qu'il y a «à peu près 500» vaches. Lorsque Reporterre avance le chiffre de 700, le patron concède : «Oui, c'est possible. Cela fait un mois que je suis parti, mais il y en a quelques-unes de plus qui sont arrivées. Donc mettons 700.» 

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Comme prévu, les vaches sont traites trois fois par jour. «Ils disent que c'est pour éviter la saturation du pis. Parce que quand les pis sont pleins, la vache ne produit plus de lait», rapporte l'ex-employé. Traire plus pour gagner plus.

Les conditions de vie des bêtes sont déplorables, avec les conséquences que l'on imagine sur leur santé. «Dans le troupeau, il y a au moins 300 vaches qui boitent. Elles sont fatiguées, maigres. Elles ont des ongles trop longs ou des sabots qui pourrissent. Elles marchent à longueur de journée dans leurs excréments. D'habitude, on nettoie tous les deux jours dans ce type d'élevage, là, c'est tous les quinze jours. Les vaches sont sales», détaille le témoin. Michel Ramery s'en défend, rappelant qu'une vache vaut de l'argent : «Ce n'est pas dans notre intérêt de les faire mourir, elles sont bien soignées. Quand quelqu'un perd une vache sur 50, ça fait mal. Mais c'est vrai qu'avec 700 vaches, on peut en perdre 14…» D'après le témoin, le responsable de l'élevage, un certain Stéphane, tue des bêtes par accident, n'étant pas très au fait de l'entretien des bovins. Deux ou trois vaches mourraient chaque semaine, selon lui. Là aussi, le patron dément.

A son arrivée à la ferme des 1 000 vaches, l'ex-salarié recensait une petite quarantaine d'employés, contre quinze avant son départ. Le responsable «nous prend pour des chiens», lâche-t-il.

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