“Le choix entre la peste et le choléra” : c’est ainsi que certains adeptes du “ni Robinson, ni Rajaonarimampianina” décrivent l’enjeu qui est proposé aux électeurs le 20 décembre [ce sont les deux candidats en lice pour le second tour de la présidentielle]. Si le choléra reste une hypothèse, pour la peste, c’est déjà une certitude. On annonce 5 districts touchés et 41 décès causés par cette maladie, qui, rappelons-le, date du Moyen Age.
Après les valalas (criquets), la peste est un nouveau fléau à placer parmi les trophées à l’actif de ce régime de transition aux mœurs superficielles. [Andry Rajoelina a pris le pouvoir en 2009 à la suite d’un coup d’Etat. Il lui a été interdit de se présenter. Rajaonarimampianina est désormais son candidat.]

Les rats et les microbes batifolent dans l’allégresse

Dernier exemple en date : l’organisation débile et éhontée la semaine dernière d’un feu d’artifice pour la population de la capitale, alors que ladite population est excédée par l’amoncellement des ordures. Quel dirigeant ayant un minimum de neurones en état de fonctionner se moquerait ainsi de son peuple ? Et quel chef d’Etat aurait la stupidité de pérorer continuellement sur des valeurs telles que le nationalisme ou le patriotisme, alors que même pour ramasser les ordures de sa capitale, il a besoin d’un financement d’urgence de l’Union européenne ?

“Le coq est le seul animal capable de chanter les pieds dans la merde”, selon un dicton français. Chez nous autres les Malgaches, on avertit : “Aza mandihy am-piringa toa vorondolo” (Ne dansez pas sur les ordures). On découvre donc maintenant que nous avons à Madagascar le seul chef d’Etat au monde capable d’organiser un feu d’artifice, alors que les odeurs, les rats et les microbes batifolent dans l’allégresse, faute (paraît-il) d’un budget communal insuffisant pour assurer le ramassage des ordures.

Il suit l’application bête et méchante du précepte romain Panem et circenses (Du pain et les jeux du cirque), qui consiste à amuser le peuple pour lui occuper l’esprit, tout en lui remplissant le ventre. Le seul souci, c’est que depuis 2009 il y a de plus en plus de jeux (feux d’artifice et autres fadaises) et de moins en moins de pain (ou de riz). Le taux de malnutrition qui grimpe en flèche l’atteste. 

Promesses de démocratie et bonne gouvernance

Rajoelina me rappelle de plus en plus Jean Bédel Bokassa, dictateur [de la République centrafricaine] et dépensier à l’extrême, pendant que la grande majorité de la population vivait dans le dénuement. Une fois encore, le président de la transition (PT) Andry Rajoelina et ses sbires n’hésitent pas à montrer le caractère irréfléchi de leurs actions – à l’image de tout ce qui a été vécu depuis cinq ans et durant lesquels les actes ont à chaque fois démenti les promesses.

Si on se rappelle des engagements du DJ [le surnom de Rajoelina, qui effectivement était un ancien DJ] lors de son accession au pouvoir, ils tournaient essentiellement autour de deux thèmes : démocratie et bonne gouvernance. Or tous les indicateurs internationaux (indicateur de développement humain, corruption, liberté de la presse, etc.) ont dégringolé depuis que Rajoelina et sa bande se sont mis en tête de s’occuper de politique.

Sans oublier le pompon : un taux de pauvreté de 92 % en 2010, le statut de pays le plus pauvre du monde et l’intégration officielle de Madagascar dans la liste de juin 2013) des Etats fragiles. 
“La méchante communauté internationale”

Andry Rajoelina a été une catastrophe pour ce pays.
Ses défenseurs tentent de justifier son incompétence par le manque de moyens. Le président aurait failli, car non seulement “la méchante communauté internationale” aurait fermé les robinets (ce qui est faux : selon les bailleurs de fonds, seul un tiers de l’aide a été coupé) mais aussi “l’ingrate opposition” l’aurait empêché d‘ “exprimer son talent” (sic). Il vaut mieux entendre de telles âneries que d’être sourd.

Bref, voilà le bilan du DJ qui prétendait en mars 2009 devant les caméras de la télévision française qu’il ne sera “pas plus nul que son prédécesseur” [le président Marc Ravalomanana]. Malgré ses effets de manche voulant faire croire à sa volonté d’indépendance par rapport à celui qui lui a mis le pied à l’étrier, Hery Rajaonarimampianina ne sera, si par malheur il était élu, que le pantin d’Andry Rajoelina. Même situation dans le camp d’en face en cas de victoire, avec le duo Jean-Louis Robinson et Marc Ravalomanana. [En exil en Afrique du Sud, il lui a également été interdit de se présenter, ainsi qu’à son épouse. Ils ont donc désigné Robinson.] Mais, au vu du bilan des cinq dernières années, je crois que tout est préférable à un maintien de ce pouvoir “marbré”, que ce soit avec l’original ou avec sa copie. Le 20 décembre 2013, il s’agira donc de voter utile, même si ce n’est pas par conviction, et d’envoyer les clowns à pinces là où ils le méritent : dans les ordures !