Le "trading haute fréquence", une pratique devenue courante qui effraie encore

Le secteur, soumis à une concurrence acharnée, pousse les professionnels à se moderniser sans cesse... Et à multiplier les risques.

Source AFP

Les traders cherchent à être les plus rapides.
Les traders cherchent à être les plus rapides. © MIGUEL MEDINA

Temps de lecture : 3 min

Être le plus rapide sur les marchés pour empocher la mise : près de dix ans après son arrivée retentissante, la technologie du "trading à haute fréquence" s'est développée mais continue de nourrir les inquiétudes. Cette technique de transaction (appelée en anglais High Frequency Trading ou HFT) utilise des ordinateurs ultra-puissants pour passer une multitude d'ordres à une vitesse extrême. Elle est apparue à la faveur de la libéralisation du secteur des opérateurs boursiers en 2007. L'ouverture à la concurrence s'est traduite par la création d'une multitude de plateformes alternatives, une même action pouvant désormais être vendue sur plusieurs marchés à un prix différent.

La newsletter Économie

Tous les jeudis à 17h

Recevez le meilleur de l’actualité économique.

Votre adresse email n'est pas valide

Veuillez renseigner votre adresse email

Merci !
Votre inscription a bien été prise en compte avec l'adresse email :

Pour découvrir toutes nos autres newsletters, rendez-vous ici : MonCompte

En vous inscrivant, vous acceptez les conditions générales d’utilisations et notre politique de confidentialité.

Certains traders ont profité de cet éclatement en cherchant à être les plus rapides dans les échanges, contribuant du même coup, selon certains observateurs, à établir un prix plus uniforme entre les plateformes. "Le trader de HFT ne sait pas ce qu'il traite, c'est un mathématicien. Son objectif est d'avoir un algorithme qui essaie de deviner la tendance", à l'achat ou à la vente d'un titre "pour se placer au milieu entre l'acheteur et le vendeur", remarque Jean-Pierre Pinatton, président du conseil de surveillance de la banque Oddo & Cie. "C'est une véritable pollution, cela n'apporte rien", tranche-t-il.

Plateforme d'échanges

L'arrivée du HFT a été "un peu perturbante en 2007 parce que c'est quelque chose qui est apparu de manière assez brutale", relate pour sa part un connaisseur du dossier souhaitant conserver l'anonymat. Après quelques années d'existence, le HFT est accusé de favoriser la survenue de "flash crashes", ces chutes éclair de certains indices boursiers.

Loin d'avoir été mis à mal par ses fragilités, il s'est depuis "normalisé", observe Benoît Lallemand, un expert de l'organisation non gouvernementale Finance Watch. "C'est aussi devenu la nouvelle façon de traiter sur les marchés. En 2007, le HFT était centré sur un petit nombre d'acteurs spécialisés, souligne le connaisseur du dossier. Aujourd'hui, la technique s'est largement diffusée. Une plateforme d'échanges ne peut pas se permettre de vivre sans."

Les américains Virtu et Getco ou encore le néerlandais Optiver, qui misaient leur propre argent sur les marchés, côtoient certains géants bancaires qui utilisent le HFT pour le compte de leurs clients.

Risque accru de krach

Chez Euronext, l'opérateur boursier européen chapeautant les Bourses de Paris, Amsterdam, Lisbonne et Bruxelles, les acteurs qui ont recours au HFT sur les actions sont estimés à 21%. "Différents chiffres circulent et la proportion du HFT est très volatile", estime cependant Jean-Édouard Colliard, professeur de finances à HEC. Le secteur est aussi soumis à une concurrence acharnée qui pousse les professionnels à se moderniser sans cesse.

Or l'amélioration des outils "devient de plus en plus coûteuse pour un gain supplémentaire de plus en plus aléatoire", note Jean-Édouard Colliard. Et la course à l'innovation ne réduit pas l'aléa. "Le risque de krach d'un de ces systèmes est beaucoup plus important que par le passé, car ils sont poussés au maximum de leurs capacités", observe Benoît Lallemand.

Ses défenseurs lui prêtent la capacité d'apporter de la liquidité aux marchés, c'est-à-dire de fluidifier au maximum les échanges, ses détracteurs rétorquant que cela se fait sur des actifs déjà liquides et disparaît en cas de tension sur les marchés.

En outre, le HFT présente aux yeux de certains le risque d'accroître les fortes variations de prix à la hausse ou à la baisse. "Certaines opérations en matière de trading à haute fréquence peuvent être très proches de la manipulation de cours", prévient pour sa part Gérard Rameix, président de l'Autorité des marchés financiers. Face à ces défis, les régulateurs cherchent à mieux encadrer cette pratique. En Europe, une nouvelle réglementation appelée MIF 2 est prévue pour 2017.

Perte de confiance

Ces nouvelles lois "sont les plus ambitieuses au niveau mondial mais restent très insuffisantes du point de vue de l'intérêt général", estime cependant M. Lallemand.

Selon lui, le HFT entraîne "une perte de confiance dans les marchés financiers des investisseurs institutionnels et particuliers", qui se sentent de plus en plus systématiquement doublés.

Ce service est réservé aux abonnés. S’identifier
Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.

0 / 2000

Voir les conditions d'utilisation
Lire la charte de modération

Commentaire (1)

  • pafoufou

    Commence par la finance... Après le travail virtuel de 80 % des fonctionnaires... Mal barré.