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Les médias face au pouvoir des réseaux sociaux

Les éditeurs sont confrontés au risque de perdre la relation à leurs lecteurs au profit de Facebook ou Apple.

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Publié le 16 juin 2015 à 11h25, modifié le 16 juin 2015 à 11h38

Temps de Lecture 3 min.

Les réseaux sociaux comme Facebook s’imposent petit à petit comme des intermédiaires entre les médias et leurs lecteurs. C’est ce que souligne le rapport annuel du Reuters Institute britannique, qui s’appuie sur un sondage conduit auprès de 20 000 personnes dans 12 pays d’Europe plus les Etats-Unis, le Japon et le Brésil : 41 % des sondés ont utilisé Facebook au cours de la semaine écoulée pour trouver, lire, partager ou commenter de l’information, soit une hausse de 6 points en un an.

En France, ils sont 35 % (+8 points). Si Facebook domine, d’autres plates-formes émergent également dans l’accès à l’information des sondés : 18 % ont utilisé Youtube, 9 % WhatsApp. Et les moyennes cachent d’autres tendances, soulignent les auteurs : pour s’informer, 34 % des sondés du Brésil urbain ont eu recours à WhatsApp et 5 % des 18-24 ans américains au réseau social éphémère Snapchat.

L’annonce d’emploi publiée samedi 13 juin par Apple ne devrait donc surprendre personne : le constructeur de l’iPhone cherche des journalistes pour « identifier et transmettre les meilleurs articles de l’actualité internationale, nationale et locale ». Le rôle de ces « éditeurs » sera d’apporter une touche humaine à News, la nouvelle application mobile annoncée le 8 juin par Apple, qui promet une sélection personnalisée d’articles de médias partenaires.

Le service, gratuit, sera disponible « à l’automne ». Et sa philosophie rappelle celle des « instant articles » annoncés par Facebook mi-mai ou du service « Discover » du réseau social Snapchat. Toutes ces initiatives ont en commun de proposer aux grands médias de publier des articles et des vidéos directement sur les plates-formes en échange de l’espoir de toucher un nouveau lectorat, voire des revenus publicitaires. Tous proposent un format attractif, adapté au mobile, qui se charge plus rapidement que les articles hébergés sur les sites mobiles des médias.

Concessions

Comme Facebook, Apple a présenté une première liste de médias partenaires, qui incarnent le gratin de la presse anglophone : le quotidien britannique The Guardian, le spécialiste de sports américain ESPN, la chaîne d’information CNN, le quotidien américain New York Times mais aussi des acteurs issus du Web comme le groupe Vox Media ou le site de divertissements et d’infos Buzzfeed.

Pourquoi les médias donnent-ils ainsi leur contenu à des plates-formes comme Apple ou Facebook, alors qu’ils essaient par ailleurs d’attirer les lecteurs directement vers leurs propres applications et sites ? « Il est parfois écrit dans la presse que nous, les médias, ne réfléchissons pas au rapport entre les coûts et les bénéfices de ces partenariats, a expliqué Mark Thompson, le directeur du New York Times, cité par Mashable. L’avantage de participer aux plates-formes des autres est l’accès à une distribution potentiellement beaucoup plus vaste que celle que nous pourrions espérer atteindre à court terme via nos propres offres numériques. »

Pour convaincre les éditeurs, Apple et Facebook ont toutefois fait certaines concessions dans leur offre initiale de partenariat : les médias pourront vendre eux-mêmes de la publicité sur leurs articles hébergés par News. Ils garderont alors 100 % des revenus. Si Apple vend des annonces sur ces contenus, les éditeurs conserveront 70 % des recettes générées.

Conséquences sur le pluralisme

Le contrôle des données sur les habitudes des lecteurs est aussi un point sensible. Facebook a proposé aux médias d’agréger les « vues » des « instant articles » à leur audience et d’avoir accès aux statistiques. Apple ajoute qu’elle respectera la vie privée des utilisateurs : les données de lecture ne seront pas partagées avec les autres applications Apple ou des parties tierces, assure l’entreprise.

Malgré cela, le débat sur le risque couru par les médias ne fait que commencer : n’abandonnent-ils pas trop de pouvoir aux géants du Net ? « Qu’une organisation comme le New York Times, si soucieux du contrôle de sa marque, choisisse ce chemin, montre à quel point le changement des usages force les entreprises les plus déterminées à faire des compromis », s’inquiète Emily Bell, directrice du Tow Center for Digital Journalism, dans un essai annexé au rapport du Reuters institute. Une fois l’usage créé, les grandes plates-formes pourraient de plus changer les termes des partenariats avec les éditeurs, comme Google l’a fait avec son fonds de soutien à la presse.

Plus largement, l’absence de transparence sur les données – et sur la façon dont les contenus sont mis en avant sur des plates-formes comme Facebook – « peut créer des problèmes commerciaux pour les éditeurs, mais soulève aussi des questions démocratiques », argue Mme Bell, estimant que les algorithmes font des choix éditoriaux pouvant influer sur le pluralisme, par exemple. « La fragmentation des médias, qui affaiblit leur pouvoir de négociation, a coïncidé avec la concentration des pouvoirs dans quelques plates-formes », note Mme Bell. Face au risque de dépendance envers un gros acteur comme Facebook, Buzzfeed, grand spécialiste de la diffusion de ses contenus sur les réseaux sociaux, a choisi de coloniser le maximum de plates-formes différentes, et s’emploie donc à disséminer ses contenus sur Twitter, Instagram, Pinterest, Vine…

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