Free rate l’occasion d’accélérer dans la 4G
L’opérateur, allié à Numericable-SFR, aurait pu récupérer des fréquences de Bouygues, et limiter l’itinérance avec Orange.
Par Romain Gueugneau
Deux échecs en deux ans. Le coup est rude, aussi, pour Xavier Niel. L’an dernier, Free avait apporté son concours à Bouygues Telecom pour l’aider à racheter SFR, moyennant un morceau de son réseau pour 1,8 milliard d’euros. C’est finalement Numericable qui l’avait emporté. Cette année, il avait misé sur Altice pour récupérer à nouveau - en payant sa part - des fréquences et des antennes. Encore raté... Certes, Free, le seul opérateur mobile en croissance, n’a rien perdu dans l’affaire. Et rien ne dit non plus que Patrick Drahi ne reviendra pas à la charge dans les prochains mois. Mais le trublion des télécoms voit filer une belle occasion d’accélérer le déploiement de son réseau, notamment en 4G.
Miser gros lors des enchères pour la bande 700
L’opérateur est en effet à la traîne par rapport à ses concurrents. S’il possède par exemple plus de sites 4G que SFR, sa couverture est toutefois moindre (33 % de la population contre 53 %, à fin 2014), car son portefeuille de fréquences est moins riche : Free possède seulement des fréquences en 2.600 MHz. En récupérant du spectre de Bouygues Telecom, l’opérateur aurait vu sa couverture en très haut débit mobile bondir. Le non « catégorique » opposé par le groupe Bouygues à Patrick Drahi va certainement encourager Free à miser gros lors des enchères pour la bande 700, qui seront organisées à l’automne par l’Arcep. « Free n’a jamais fait mystère qu’il avait besoin de fréquences. Il allait de toute façon y participer largement », observe un expert du secteur.
En récupérant un morceau du réseau de Bouygues Telecom, Free aurait également pu en profiter pour limiter l’itinérance en cours avec Orange, qui lui loue une partie de son réseau en 2G et 3G. Ce contrat va donc se poursuivre. Mais il pourrait être davantage encadré. L’Arcep a en effet indiqué mercredi qu’elle allait suivre de plus près l’évolution de ce contrat, très critiqué par les concurrents, et qui court jusqu’en 2018. Le gendarme des télécoms va engager le dialogue avec Orange et Free pour mieux « comprendre la teneur de ce contrat » et « en préparer la fin ». « Il y a des limites dans le partage des réseaux qui ne doivent pas être franchies », a rappelé Sébastien Soriano, le président de l’Arcep, qui souhaitait déjà en début d’année « organiser le sevrage » de Free.
Le régulateur profite des nouveaux outils qui lui seront offerts avec la loi Macron, dont le vote est imminent, pour prendre la main sur le sujet. En 2013, l’Autorité de la concurrence avait déjà demandé que l’Arcep fixe un calendrier et des modalités précis pour l’extinction de l’itinérance. « A l’époque, nous n’avions pas les outils juridiques pour le faire. Ce sera désormais le cas », indique-t-on chez le régulateur. Un point d’étape sera fait à l’automne avec les parties concernées et des orientations seront fixées au premier trimestre 2016. « C’est un vrai point d’inflexion dans la politique de régulation », se félicite un concurrent, qui regrette néanmoins que le processus prenne autant de temps.