LETTRE OUVERTE À M. MACRON
ministre de l’Économie de l’Industrie et du Numérique
Toulouse, le 24 juin 2015
Monsieur le Ministre,
Le 4 décembre 2014, vous avez annoncé votre choix du repreneur pour les 49,99 % du capital de la Société Anonyme Aéroport Toulouse Blagnac (ATB) détenus par l’État.
Contrairement à certaines affirmations dans les médias, le fait que la nationalité de l'acquéreur, le groupe Symbiose (rebaptisé Casil Europe depuis), soit chinoise n’est pas la cause de la mobilisation de tout un territoire dans sa complexité et dans sa diversité.
Il faut chercher ailleurs les raisons de cette mobilisation qui résident dans le sentiment de mépris ressenti par les citoyens en général et les riverains en particulier, car à aucun moment, vous n’avez pas jugé opportun d’ouvrir le dialogue. Si nous avons rencontré le 28 mai dernier des membres de votre cabinet, nous sommes sortis de cette entrevue sans aucune réponse concrète ni aucun document nous permettant de vérifier des éléments essentiels de ce dossier. À notre demande citoyenne, votre ministère a opposé le secret des affaires, confirmant ainsi qu'il s'agit bien d'une privatisation.
Pourtant :
- la démission le 17 juin 2015 de Mike Poon, PDG de Casil Europe, cité dans une affaire de corruption, puis sa disparition, laissent un parfum de prévarication flotter sur ce dossier, entachant par là-même l’État français de soupçon : un élément qui s'ajoute à la présence dans cette vente du groupe Lavalin, à la fois interdit de marché public pendant 10 ans par la Banque mondiale et actuellement aux prises avec des accusations de corruption et de fraude en lien avec la Lybie déposées par la Gendarmerie Royale du Canada ;
- nous maintenons notre exigence de consultation du pacte d’actionnaire secret, du détail du projet industriel de CASIL Europe et, de tous documents prouvant que les 308 millions d’euros ont bien été versés au Trésor Français ;
- l’impact sur la santé et la qualité de vie de plus de 109 000 riverains et populations survolées par le trafic de cet aéroport enclavé dans la ville de Toulouse, dépend de l’évolution du nombre de mouvements aériens à venir : comment croire qu’il n’y aura pas d'aggravation irrémédiable au vu du projet de multiplication par 3 du trafic aérien présenté par le nouvel acquéreur ?
- la « privatisation de fait » de la gestion de l’aéroport d’ATB est insupportable pour nombre de citoyens de la Région attachés à la propriété publique d'un équipement stratégique dont l'impact sur l'environnement n'est plus à démontrer.
Monsieur le Ministre, vous avez vendu un bien public stratégique pour notre tissu industriel local mais aussi national et, déjà payé par nos deniers. Ce n’est pas acceptable et, nous ne pouvons qu’être inquiets sur l’influence de ce groupe dans notre ville, avec les annonces de possibles participations dans les infrastructures publiques toulousaines, dont le futur Parc des Expositions.
Estimant indispensable d'être en mesure de vérifier l’étendue de la prise de contrôle en cours de réalisation, nous maintenons notre action en justice pour faire constater un abus de pouvoir en disposant du capital d’une société qui appartient à la Nation.
Nous attendons avec impatience votre réponse et sommes certains que vous ferez mentir ceux qui ne vous croient pas capable de donner une suite favorable à nos demandes.
Dans l’attente, recevez, monsieur le Ministre, l’expression de notre considération distinguée.
Pour le collectif unitaire, Chantal Beer-Demander
https://www.facebook.com/collectifcontreprivatisationaeroporttoulouse