Ile-de-France : la révolution du vélo en marche ?

 

Ile-de-France : la révolution du vélo en marche ?

    Avril 1967, au JT du soir, un reportage affirme que l' «un des problèmes les plus préoccupants à Paris est celui de la circulation ». Il y est ensuite question d'un projet visant à interdire les voitures à Paris en faveur du vélo (voir la vidéo ci-dessous).

    Chaque habitant de la capitale y va alors de son petit commentaire. Les avis divergent : «On peut quand même appuyer sur les pédales ! Malheureusement, on est arrivé à un siècle où les gens n'aiment pas faire un effort.» dit l'un. «Je suis contre ce projet. C'est un retour de 50 ans en arrière. Vous comprenez, la bicyclette, c'est fini !» s'indigne un autre.

    La traversée du désert

    L'idée de bannir les voitures dans les rues parisiennes n'a finalement pas été sérieusement envisagée. C'est même tout l'inverse qui a eu lieu : en 1991, 0,4 % du trafic avec 24 600 déplacements.

    Ã? Paris, quand les derniers dispositifs pour vélos disparaissent au tournant des années 1970, les associations de cyclistes n'arrivent pas à se faire entendre. Chassée hors de la capitale, la petite reine va donc devoir ronger son frein, et ce jusqu'au milieu des années 1990 où elle repointe le bout du guidon. Il n'y a alors que 6 km d'aménagements cyclables dans Paris. «Ce sont les grandes grèves de 1995 qui vont faire redécouvrir ce mode de transport oublié», indique Dominique Riou, chercheur à l'Institut d'aménagement et d'urbanisme (IAU).

    Datavisualisations WeDoData - Merci au mag IDF (Cliquez sur l'image pour l'agrandir)

    Le partage de la voirie

    Les pistes cyclables fleurissent peu à peu, mais restent insuffisantes. L'émergence, en 1990, des zones où la vitesse est limitée à 30 km/h favorise enfin la cohabitation. Seul hic, elles impliquent des aménagements coûteux de voirie, ce qui limite leur développement. Des villes comme Nogent-sur-Marne (94), Fontainebleau (77), Fontenay-aux-Roses et Sceaux (92) sont ainsi passées complètement en zone 30. « Dans les villes à forte densité, il est préférable de réfléchir aux endroits où autoriser les voitures à accélérer plutôt que l'inverse, d'autant que la vitesse moyenne n'excède pas les 15 km/h », ajoute Jérémy Courel, second co-auteur de l'étude de l'IAU sur le vélo.

    Autre avantage des zones 30, la possibilité, depuis 2008, d'y aménager des doubles-sens cyclables, ce qui permet de faire des aménagements vélo à moindre frais.

    L'arrivée des Vélib' en 2007 ou encore l'autorisation faite aux cyclistes de tourner à droite au feu rouge, a redonné des ailes au vélo. Entre 2001 et 2010, on est ainsi passé de 83 800 déplacements quotidiens à 242 200 dans la capitale, ce qui représente 3 % du trafic au lieu de 1,3 %. L'évolution est la même à l'échelle de l'Ã?le-de-France qui affiche près de 652 500 déplacements quotidiens à vélo, soit 1,6 % du trafic, contre 302 200 déplacements et 0,9 % du trafic en 2001.

    Changement de mentalité

    D'autres facteurs expliquent cette reconquête de terrain par la bicyclette. «Il faut y voir un changement de culture lié à une prise de conscience écologique ainsi qu'à l'appropriation du vélo par des catégories sociales, comme les cadres, qui ne l'utilisaient pas du tout auparavant», analyse Jérémy Courel.

    Une étude de l'Observatoire régional de la santé publiée en 2012 montre que la pratique régulière du vélo est un moyen de se prémunir contre les principales maladies chroniques (certains cancers, maladies cardio-vasculaires, diabète, obésité, ostéoporoseâ?¦) et améliore la santé psychologique.

    Un moyen de transport encore limité...

    Pour autant, il reste encore au vélo quelques étapes à franchir avant de s'imposer comme un incontournable dans la chaîne des transports. «L'accès aux gares est un point stratégique, soulève Dominique Riou. Jusque-là, le choix a été fait en Ã?le-de-France d'aller chercher les gens en bus ou de proposer des parkings. Le vélo est encore balbutiant, mais le potentiel est considérable.»

    L'installation des consignes à vélo sécurisées Véligo dans une vingtaine de gares dans la région est une façon d'encourager les voyageurs à se percher sur leurs deux-roues. «Mais ce qui fait défaut avant tout aux cyclistes, c'est la légitimité, et elle s'acquiert aussi par la visibilité», affirme Dominique Riou. Chez Vélorution, on mise donc sur l'effet de nombre.

    Chaque 21 du mois et ce jusqu'à la COP21 (Paris-Climat 2015), en décembre, l'association organise à Paris des grands rassemblements où les cyclistes prennent possession de la chaussée pour changer le tempo du trafic.

    Regardez le reportage du journal télévisé de 1967, place de la Concorde, à Paris :